La Ville de Montréal poursuit sa réflexion sur l’avenir du bassin Peel, dans le sud-ouest du centre-ville. Elle vient de constituer une table de concertation pour l’aider à formuler sa vision de développement, mais sans y inviter les principaux promoteurs privés ayant un intérêt dans le secteur.

Aux abonnés absents figurent le Groupe baseball Montréal de Stephen Bronfman, qui veut y construire un stade de baseball des ligues majeures, et Devimco, qui détient des options d’achat sur de grands pans du territoire jouxtant le bassin Peel. Ce dernier souhaite y aménager un ambitieux quartier résidentiel doublé d’un pôle d’emplois dans les technologies propres ainsi que des équipements civiques.

Ce n’est pas la première fois que la Ville de Montréal ignore M. Bronfman. Au printemps dernier, dans le cadre d’une concertation citoyenne confiée à l’Institut du Nouveau Monde, la Ville avait oublié d’inviter Groupe baseball Montréal à participer aux trois premiers ateliers. Le groupe avait par la suite demandé et obtenu la permission de participer aux deux derniers ateliers.

Lisez l’article « Consultation au Bassin Peel : la Ville de Montréal avait oublié d’inviter Stephen Bronfman »

Le secteur du bassin Peel est stratégique en raison de son envergure, environ 8,5 hectares, et de sa localisation, porte d’entrée sud-ouest du centre-ville.

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Stephen Bronfman

Selon les informations reproduites dans un mémoire de l’Institut de développement urbain du Québec (IDU), publié ce lundi matin, la table de concertation est composée de 16 personnes, dont une majorité est formée de fonctionnaires de la Ville (4) et de membres de groupes communautaires (5).

Les propriétaires de terrains du secteur public, comme la Société immobilière du Canada, sont aussi autour de la table avec quatre représentants, de même que trois représentants des acteurs économiques : la Chambre de commerce et d’industrie du Sud-Ouest, la minoterie ADM Agri-industries et les Forges de Montréal.

Pour le moment, la présence de l’IDU autour de la table n’est pas non plus assurée. L’organisme, qui défend les intérêts des promoteurs immobiliers, a publié de sa propre initiative un mémoire pour faire entendre sa vision quant à l’avenir de ce secteur négligé autrefois à vocation industrielle.

« Outre notre présence à la table, on demande qu’il y ait cinq promoteurs pour qu’il y ait une compréhension des intérêts économiques, dit Jean-Marc Fournier, PDG de l’IDU, de la même façon qu’on y trouve des groupes de la société civile au nombre de cinq. C’est très bien que le comité ait une compréhension des intérêts sociaux, mais à la table, jusqu’ici, il n’y avait pas la même compréhension des intérêts économiques. On veut s’assurer d’avoir une répartition qui permet de voir tous les enjeux. » L’IDU propose aussi l’ajout de deux élus municipaux.

Par ailleurs, l’Institut invite la mairesse Valérie Plante et les autres candidats à la mairie à préciser, avant les élections municipales, leur vision concernant l’avenir du bassin Peel et de tout le secteur qu’on appelle Bridge-Bonaventure, lequel englobe notamment la Pointe-du-Moulin (le silo no 5) et la Cité-du-Havre.

« Les élections ne sont pas un prétexte pour retarder l’action, dit Jean-Marc Fournier, mais une bonne occasion pour partager sa vision et pour s’engager. Les élections sont toujours un bon moment pour dire quelque chose. Une des fins recherchées avec le dépôt de notre mémoire est de suggérer aux différents candidats d’exprimer publiquement ce qu’ils ont l’intention de faire et à quel rythme ils ont l’intention de le faire. »

Un port d’Hambourg cité en exemple

Pour sa part, l’IDU souhaite y voir un aménagement urbain intégré avec des activités économiques, culturelles, civiques – lire école – et résidentielles avec sa part de logements sociaux. Il cite l’exemple de la requalification urbaine réussie du port d’HafenCity à Hambourg, en Allemagne.

L’objectif est d’y réaliser un aménagement selon le principe de la « Ville du quart d’heure » élaboré par le professeur Carlos Moreno. M. Moreno sera d’ailleurs l’invité de l’IDU lors d’un prochain webinaire en septembre.

« La qualité des aménagements et l’intégration architecturale des bâtiments en font une référence européenne », lit-on dans le mémoire de l’Institut.

Selon les estimations de l’IDU, il est possible de construire 11 000 logements en plus d’aménager près de 4 millions de pieds carrés de terrain pour des usages civiques, sportifs, communautaires et des lieux d’emplois dans le secteur Bridge-Bonaventure (bassin Peel et Pointe-du-Moulin, entre autres).

L’Institut arrive à ces chiffres en fonction d’une densité de construction semblable à ce qui est proposé dans le programme particulier d’urbanisme (PPU) du quartier des Faubourgs, à l’entrée sud-est de la ville. L’organisme plaide aussi pour la construction d’une gare du Réseau express métropolitain au sud de la rue Wellington.

L’IDU propose qu’une ébauche de PPU pour le secteur Bridge-Bonaventure soit présentée dès le début de 2022. L’Office de consultation publique de Montréal entamerait ensuite ses travaux. L’objectif est d’adopter le règlement de zonage en 2023.

« Il faut aller de l’avant maintenant, soutient M. Fournier. Je l’ai écrit il y a un an. Je l’écris encore. J’espère qu’on va y arriver un moment donné. »