Air Canada a annoncé ses résultats de fin d’année vendredi, déclarant des pertes de revenus de 70 % en 2020 à cause de la pandémie de COVID-19. En même temps, l’approbation de son achat de Transat A.T. par le gouvernement fédéral a continué de faire des vagues, ses critiques craignant une perte de concurrence en transport aérien au pays.

La réaction la plus vive à l’approbation par le gouvernement canadien de la transaction entre Air Canada et Air Transat est venue d’Ed Sims, PDG de WestJet, concurrent direct. Les autorités ont fait preuve d’un « mépris flagrant » pour la concurrence entre transporteurs aériens, selon lui. Quand l’industrie pourra reprendre ses activités, les Canadiens « auront moins de choix et des tarifs plus élevés », a-t-il écrit dans un communiqué vendredi.

Mehran Ebrahimi, directeur du Groupe d’études en management des entreprises de l’aéronautique de l’UQAM, reconnaît que cette transaction réduira la concurrence au Canada, mais il s’agit d’une conséquence acceptable, étant donné qu’Air Transat aurait probablement dû cesser ses activités sans ce rachat par Air Canada et que la concurrence aurait alors également été touchée.

« Une consolidation des compagnies aériennes se fait à grande échelle partout dans le monde », entre autres à cause de la concurrence de compagnies proposant des vols à bas prix, rappelle Mehran Ebrahimi au bout du fil.

« C’est la pire période de l’histoire de l’aviation pour les compagnies aériennes ; il est donc logique que les deux se combinent », analyse pour sa part Karl Moore, professeur agrégé à la faculté de gestion Desautels de l’Université McGill. « En revanche, cela réduira considérablement la concurrence au Canada. »

Le choix d’Air Canada pour acheter le groupe Transat constitue un moindre mal, selon M. Ebrahimi.

Les autres options pour assurer la pérennité d’Air Transat étaient le Groupe Mach, qui sont des gens dans l’immobilier, et M. Péladeau, qui ne connaît rien au transport aérien.

Mehran Ebrahimi, directeur du Groupe d’études en management des entreprises de l’aéronautique de l’UQAM

M. Ebrahimi explique qu’à une exception près, toutes les tentatives de rachat de compagnies aériennes par des personnes qui ne sont pas du secteur ont échoué depuis au moins 20 ans.

L’achat d’Air Transat par Air Canada a été approuvé par le gouvernement, jeudi, à condition qu’Air Transat maintienne sa marque de commerce et garde son siège social au Québec. Air Canada doit également s’assurer de maintenir un minimum de 1500 employés dans l’entité Transat et de continuer à offrir ses services dans les deux langues officielles.

Les actions des deux entreprises ont monté en Bourse vendredi. L’annonce de l’approbation a été faite après la fermeture des marchés jeudi. L’action d’Air Canada a clôturé à un prix 5,3 % plus haut que la veille, à 22,33 $, alors que celle de Transat A.T. a pris plus de 13 % d’augmentation, à 5,26 $.

Résultats d’une année désastreuse

Les résultats financiers de l’exercice 2020 d’Air Canada illustrent à quel point la pandémie de COVID-19 a été désastreuse pour le transport aérien.

Les revenus d’Air Canada ont baissé de 70 % en 2020 à cause de la COVID-19 et des restrictions imposées aux voyageurs. Le transporteur aérien, établi à Montréal, rapporte vendredi une perte nette de 4,6 milliards, soit une perte par action diluée de 16,47 $, alors qu’en 2019, Air Canada avait dégagé un bénéfice net de 1,5 milliard, soit un bénéfice dilué par action de 5,44 $.

L’entreprise calcule que le nombre de passagers transportés a baissé de 73 % durant ce que son PDG qualifie de « l’année la plus sombre de toute l’histoire de l’aviation commerciale », écrit Calin Rovinescu, dans un communiqué.

L’entreprise continuera ses activités de façon réduite en 2021, alors qu’elle prévoit de fonctionner à seulement 15 % de sa capacité de 2019 lors du premier trimestre.

Au quatrième trimestre de l’exercice 2020, l’entreprise a subi une perte nette de 1,2 milliard, soit une perte par action diluée de 3,91 $, alors qu’un an plus tôt, elle rapportait un bénéfice net de 152 millions, ou 0,56 $ par action diluée. De plus, le 31 décembre dernier, la dette nette d’Air Canada s’est établie à 5 milliards, en hausse de 2,1 milliards par rapport au 31 décembre 2019.

Les dirigeants d’Air Canada ont profité du dévoilement de leurs résultats pour réitérer leur demande d’aide au gouvernement fédéral, rappelant que leurs concurrents américains avaient reçu environ 65 milliards de dollars US en prêts et en subventions depuis le début de la pandémie.

Au cours de la dernière année, Air Canada a notamment dû procéder à des réductions d’effectif visant plus de 20 000 employés, soit plus de la moitié de son personnel, en raison de la crise provoquée par la pandémie.

L’entreprise a également procédé au retrait devancé de certains appareils plus anciens et moins efficaces, et a dû revoir certaines commandes à la baisse, y compris sa commande d’appareils Airbus A220, l’ancienne C Series de Bombardier.

Dans son appel aux analystes financiers vendredi, l’entreprise a refusé de commenter l’approbation de la transaction avec Air Transat, citant des enjeux de confidentialité et de concurrence. Air Canada maintient que la transaction devait être clôturée au plus tard lundi prochain, mais rappelle que le délai peut être prolongé à tout moment en vertu d’un accord des parties et reste en vigueur à moins de résiliation par l’une des parties. La Commission européenne doit encore approuver la transaction.

Calin Rovinescu a également confirmé sa retraite imminente. Le 15 février prochain, le PDG sera remplacé à la tête d’Air Canada par Michael Rousseau, actuel chef adjoint de la direction et chef des affaires financières.

— Avec La Presse Canadienne