Le réseau privé de télécommunications d’Hydro-Québec, un des plus importants en Amérique du Nord, pourrait apporter l’internet dans des régions mal desservies. Le hic, c’est que la plupart de ces régions sont encore trop éloignées pour cette solution.

Telles sont deux des conclusions d’une étude interne d’Hydro-Québec, commandée par le gouvernement Couillard en 2017 et obtenue le 15 janvier dernier par La Presse après une demande d’accès à l’information.

La société d’État avait été mandatée à l’époque pour étudier la possibilité de rendre accessibles les portions inutilisées de son réseau de fibre optique. Québec espérait y trouver une façon d’améliorer l’accès à l’internet dans des régions mal desservies à ce chapitre.

À l’époque, on estimait que 340 000 ménages étaient privés de l’internet et un programme, Québec Branché, doté d’un budget de 100 millions, avait été mis sur pied. L’objectif était que tous les Québécois aient accès à l’internet haut débit d’ici 2023.

Un millier de kilomètres disponibles

Pour Hydro-Québec, l’utilisation de son propre réseau de fibre optique pour arriver à cette fin devait être soumise à trois conditions : d’abord ne pas mettre en péril sa mission de fournir de l’électricité et ne pas lui coûter un sou. La troisième condition a été caviardée dans le document remis à La Presse.

L’infrastructure de télécommunications d’Hydro, indépendante de l’internet pour des raisons de sécurité, est composée de 14 340 km de fibre optique qui sert à l’exploitation et à la surveillance du réseau électrique.

Après analyse, Hydro-Québec conclut dans ce document que 6,7 % de sa fibre optique, soit près d’un millier de kilomètres, peut être considérée comme « excédentaire ». La société d’État propose de céder, en « une transaction unique », cette fibre optique au gouvernement, qui devra les louer aux entreprises privées de télécommunications.

Pas question, toutefois, de permettre par la suite des interconnexions entre le réseau d’Hydro et ceux d’autres entreprises, tranche-t-on. « L’étude démontre des risques de sécurité physique et cybernétique, opérationnels, financiers, légaux et fiscaux importants », peut-on lire.

« Peu utile »

Mais voilà, une analyse plus poussée des secteurs où se trouve cette « fibre optique excédentaire » a permis de constater qu’elle est peu accessible. Ainsi, 81 % des foyers dans les secteurs ciblés par Québec comme étant mal desservis étaient à plus de 10 km de ces fibres optiques; 62 % étaient même à plus de 25 km.

« Très peu de foyers sont à distance intéressante des segments de câbles ayant de la capacité excédentaire », note dans un courriel envoyé à La Presse Maxence Huard-Lefebvre, porte-parole d’Hydro-Québec.

Du côté de Québec, on retient la même conclusion de l’étude : « La fibre optique inutilisée est essentiellement située en dehors des zones habitées, donc peu utile pour brancher des municipalités de régions mal desservies », dit Noémie Prégent-Charlebois, conseillère politique au cabinet du ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon.

Les deux porte-parole précisent qu’aucune discussion ou négociation n’est présentement en cours pour l’utilisation de cette fibre optique excédentaire. Par contre, on n’a pas abandonné l’idée de profiter des infrastructures d’Hydro pour l’internet en région, dit Mme Prégent-Charlebois. « On continue de travailler avec Hydro-Québec pour regarder les partenariats possibles, mais ça touche plutôt les infrastructures passives, comme les poteaux. »

— Avec la collaboration de William Leclerc, La Presse