Après avoir réalisé plus de 130 investissements dans des entreprises québécoises industrielles et de technologies au cours des 30 dernières années, voilà que la société de placement privé Novacap se lance dans la consolidation et le soutien à la croissance de firmes du secteur financier en créant un Fonds services financiers.

« On se faisait présenter beaucoup d’opportunités d’investissement dans le domaine, mais on n’y connaissait rien, on a donc décidé de s’y attaquer », résume Pascal Tremblay, PDG de Novacap.

Lancé en 1981 avec un budget de 8 millions, financé par quatre institutions québécoises — la Caisse de dépôt et placement, la Société générale de financement, la Banque Nationale et la Laurentienne —, le fonds Novacap a réalisé quelques interventions modestes à ses débuts.

En 1994, la société de capital de croissance avait 34 millions d’actifs sous gestion. Vingt-cinq ans plus tard, à la suite de plusieurs rondes de financement, ces actifs totalisent aujourd’hui 3,6 milliards.

Ces 3,6 milliards représentent les investissements qu’on a réalisés dans 32 entreprises, mais la valeur de ces investissements est évaluée aujourd’hui à 11,6 milliards.

Pascal Tremblay, qui s’est joint à Novacap en 2003 avant de devenir président du Fonds technologies-médias-télécommunications, et est maintenant président du groupe

Novacap offre du capital de croissance à des entreprises qui ont le potentiel, selon ses gestionnaires, de devenir des leaders mondiaux dans leur marché.

La société d’investissement a ainsi participé en 2002 au rachat d’une usine de fabrication de savon à Knowlton qui avait appartenu à Clairol, mais qui avait été rachetée par ses cadres. À l’époque, cette usine réalisait des revenus annuels de 60 millions.

Au cours des 15 dernières années, Novacap a réinvesti massivement avec ses partenaires pour faire du groupe KDC un leader mondial dans la fabrication de savons antibactériens et de désodorisants personnels avec des revenus annuels de plus de 1 milliard.

Novacap et ses partenaires ont vendu l’an dernier leur participation dans KDC pour plus de 1,2 milliard US à un fonds d’investissement américain et à la Caisse de dépôt.

« On vient de réaliser le même genre d’opération avec la firme de technologie montréalaise Syntax, qui fait de l’intégration de logiciels de planification de ressources d’entreprises. »

« On a racheté 70 % de ses actions en 2016 et on a investi 400 millions pour réaliser trois acquisitions qui ont consolidé sa position de leader dans l’infonuagique. Syntax est valorisée aujourd’hui à plus de 1 milliard », expose Pascal Tremblay.

Financement par fonds

Novacap réalise ses acquisitions de participations majoritaires ou prépondérantes dans les entreprises grâce à la mise sur pied de fonds Novacap auxquels souscrivent les caisses de retraite et les investisseurs privés.

Dans le secteur industriel, on vient de terminer la semaine dernière le financement du Fonds industriel 5 avec une souscription totale de 940 millions, dont 48 % ont été obtenus auprès d’investisseurs étrangers.

« Depuis 2014, on a ouvert nos fonds aux caisses de retraite étrangères : américaines, européennes, asiatiques, australiennes. La demande est forte, et ça nous permet de diversifier nos sources de financement. »

« Lorsqu’on a fermé notre dernier Fonds TMT 5 [technologies-médias-télécommunications], on a récolté 800 millions, mais l’offre dépassait les 2,5 milliards », souligne Pascal Tremblay.

C’est le même processus qui va encadrer le financement du nouveau Fonds services financiers (FSF) qui sera officiellement lancé mardi.

La souscription de départ a été fixée à 260 millions, mais on prévoit qu’une deuxième ronde — qui doit être terminée au cours du prochain trimestre — devrait porter le produit final de ce premier fonds à quelque 600 millions.

« On n’avait pas d’expertise dans ce secteur-là. Ça fait donc deux ans que l’on prépare le terrain. On a maintenant une équipe qui est dirigée par l’associé directeur Marcel Larochelle, qui est un véritable expert dans la gestion d’actifs, qui a fait sa marque chez UBS, Fiera Capital et Mercer. »

On a identifié quatre domaines du secteur financier dans lesquels notre équipe va pouvoir intervenir pour participer à la consolidation au Québec et en Amérique du Nord.

Pascal Tremblay

Le secteur de l’assurance générale est l’un de ceux-là, particulièrement au chapitre de la distribution, où on retrouve un nombre incalculable de courtiers qui sont fragmentés en petits regroupements.

Les activités de financement privé sont aussi une cible que vise Novacap. Tout le financement de type AccèsD pour l’achat de meubles, de chauffe-eau ou de systèmes de climatisation pourrait donner lieu à des regroupements intéressants.

Le FSF va également solliciter les firmes de gestion d’actifs comme Cote 100, Addenda Capital ou Letko Brosseau.

« Il y a des fondateurs qui veulent prendre leur retraite. On va être un partenaire qui va leur permettre de faire croître l’entreprise qu’ils ont créée », anticipe le PDG de Novacap.

Enfin, le fonds d’investissement prévoit être actif du côté des entreprises qui offrent des services aux institutions bancaires, comme le traitement des chèques ou des cartes de crédit.

« On a un plan, et il s’agit d’un immense marché », résume Pascal Tremblay.

Si Novacap réussit à répliquer le succès qu’elle a connu avec ses fonds industriels et technologiques, il faut s’attendre à ce que ses investisseurs habituels participent à cette nouvelle aventure.

« Le retour de nos fonds sur 10 ans est de deux fois et demie le capital investi. On a une bonne feuille de route parce qu’on choisit et qu’on s’associe aux meilleures entreprises et qu’on leur donne les moyens de développer leur plein potentiel », résume l’investisseur professionnel.