L'économiste américain Nouriel Roubini a estimé vendredi qu'une grande «fatigue de l'austérité» s'est emparée du Portugal et que le pays risque un deuxième plan de sauvetage si la Cour constitutionnelle continue à freiner des mesures de rigueur.

«Il y a une fatigue de l'austérité au Portugal, tout comme dans les autres pays périphériques de la zone euro, qui a atteint non seulement l'opposition, mais aussi le gouvernement», a-t-il déclaré lors d'une conférence à Lisbonne.

La crise politique en juillet et le rejet par la Cour constitutionnelle d'une mesure permettant de licencier des fonctionnaires ont engendré «une brusque augmentation des taux d'intérêt» du pays, qui évoluent au-dessus de 7 % pour l'échéance à 10 ans, a-t-il rappelé.

Si le gouvernement de centre droit sort affaibli des élections municipales du 29 septembre et n'arrive pas à se mettre d'accord avec la troïka de ses créanciers, «les taux d'intérêt vont monter, le Portugal n'aura pas accès aux marchés et un deuxième plan de sauvetage sera nécessaire», a-t-il prévenu.

En cas de nouvelles élections législatives, le scénario sera encore plus sombre selon cet économiste devenu célèbre pour avoir prédit la crise financière de 2008 : si le parti vainqueur des élections «n'est pas un adepte de l'austérité», le Portugal court le danger d'une «restructuration de sa dette».

Il a exprimé l'espoir que «le gouvernement et l'opposition arrivent à un consensus pour éviter le scénario défavorable» et obtenir un simple «programme de précaution», c'est-à-dire une ligne de crédit à laquelle le pays aura recours en cas de nécessité.

Le Portugal tente actuellement de négocier avec la troïka (UE-BCE-FMI) un allègement de son objectif de déficit public en 2014 pour le porter à 4,5 % au lieu des 4 % prévus.

Pour l'économiste «il y a une chance de voir la troïka accepter» cet assouplissement. Mais si dans la foulée la Cour Constitutionnelle «invalide d'autres mesures d'austérité», le pays «se retrouve avec un trou budgétaire pouvant atteindre 1,2 milliard d'euros».

Même si le Portugal s'est montré jusqu'ici «exemplaire» en termes d'assainissement budgétaire et de réformes structurelles, «le pays n'est pas sorti de l'auberge» et la reprise constatée au premier trimestre est encore «bancale», a-t-il commenté.