Plusieurs grands dirigeants de la finance internationale ainsi que la BCE se penchent jeudi à Berlin sur le sort des banques de la zone euro qui peuvent espérer une recapitalisation salvatrice.

Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a confirmé jeudi qu'il proposait «une action coordonnée» en Europe pour recapitaliser les banques afin de les débarrasser de leurs actifs toxiques.

Cette annonce, qui répond à une demande formulée mercredi par la chancelière Angela Merkel, a plu aux marchés, faisant notamment grimper les Bourses de Paris et Francfort au-dessus de 2% en milieu de matinée.

Les dirigeants de la zone euro craignent que la crise de la dette, notamment grecque, se transforme en crise du secteur bancaire, comme en 2008 après la faillite de Lehman Brothers aux États unis.

Outre l'aide de la Commission, les banques de la zone euro peuvent espérer celle de la Banque centrale européenne, basée à Francfort, qui tient exceptionnellement depuis 07h30 GMT (2h30 à Montréal) sa réunion mensuelle de politique monétaire dans la capitale allemande.

C'est donc à Berlin que Jean-Claude Trichet donnera à 12h30 GMT (7h30 à Montréal) sa dernière conférence de presse de président de la BCE, avant de céder la place à l'Italien Mario Draghi.

Le Français choisira-t-il de faire une sortie spectaculaire en baissant le taux d'intérêt principal, actuellement fixé à 1,50%? Les analystes sont divisés sur ce sujet, mais unanimes pour prévoir de nouvelles mesures d'aide aux banques, notamment le lancement d'un crédit exceptionnel sur un an.

Celui-ci bénéficierait principalement aux établissements des pays surendettés, considérés comme des pestiférés par leurs pairs.

Signe de la défiance entre établissements financiers, la somme d'argent déposée par les banques de la zone euro auprès de la BCE a atteint un nouveau record annuel dans la nuit de mercredi à jeudi.

Les établissements, au lieu de faire circuler leur argent et de se rémunérer mutuellement, se ruent sur les coffres de l'institution européenne, malgré des rendements plus faibles.

Un blocage des transactions interbancaires menacerait le financement de l'économie et donc la croissance déjà mal en point en Europe.

La débâcle de l'institut franco-belge Dexia, en cours de démantèlement, a encore attisé les craintes d'un «Lehman Brothers bis».

Les banques devraient également être évoquées lors d'une rencontre à partir de 13h00 GMT (8h00 à Montréal) à Berlin du gratin de la finance mondiale. Autour de Mme Merkel se presseront la directrice générale du FMI Christine Lagarde, le ministre français de l'Économie François Baroin ou encore le président de la Banque Mondiale Robert Zoellick, sans oublier M. Trichet.

Officiellement, le sommet porte sur la réforme du système monétaire international, voulue par la France qui préside actuellement le groupe des pays les plus riches du monde (G20), et qui conteste l'hégémonie mondiale du dollar.

Mais les participants pourront difficilement faire l'impasse sur la crise de la dette en zone euro, alors que mercredi le secrétaire d'État américain au Trésor Timothy Geithner a une nouvelle fois appelé les Européens «à en faire plus» avant qu'elle ne se propage au monde entier.

La recapitalisation annoncée des établissements européens leur permettrait notamment d'affronter une nouvelle décote de leurs titres de dette grecque, au-delà des 21% qu'ils ont déjà accepté de perdre sur leur mise auprès d'Athènes.

L'urgence pour la Grèce, qui a connu mercredi une nouvelle journée de grèves et de manifestations, n'est toutefois pas cette décote, mais la reprise des versements de l'aide internationale.

Celle-ci est suspendue au verdict des envoyés spéciaux de la BCE, de l'UE et du FMI, qui dissèquent actuellement les progrès de la Grèce sur la voie des réformes.

Outre cette «troïka», la Grèce verra arriver jeudi le ministre allemand de l'Économie Philipp Rösler.

En Allemagne, première contributrice aux plans d'aide européens, l'opinion publique est lasse des sauvetages à répétition. Jeudi le tabloïd Bild, le plus lu du pays et le plus virulent contre Athènes, lançait cet appel: «Arrêtez donc de tout casser, bande de Grecs fauchés!»