Selon plusieurs experts, les obligations à long terme pourraient bien être le pire investissement en 2010. Même que le rendement qu'elles rapporteront pourrait être négatif.

Le rendement d'une obligation est composé de deux éléments, soit les intérêts gagnés et le gain ou la perte en capital. Car le prix des obligations fluctue, et ce, inversement avec les taux d'intérêt. C'est-à-dire que si les taux d'intérêt montent, le prix des obligations baisse.

L'indice des obligations DEX Univers, qui inclut toutes les obligations canadiennes, a réalisé un rendement de 5,4% en 2009.

Mais les perspectives semblent maintenant fort différentes.

Le rendement du DEX Univers en 2010 pourrait être de 0%, prévient Pierre Lapointe, stratège des marchés financiers à la Financière Banque Nationale.

C'est que les banques centrales commenceront à hausser leurs taux directeurs, ce qui se répercutera sur les taux des obligations. Les détenteurs d'obligations continueront de toucher leurs intérêts, mais la valeur des obligations diminuera, ce qui viendra annihiler le rendement.

Que faire alors?

Pour ceux qui détiennent des obligations et qui comptent les conserver jusqu'à l'échéance, le problème ne se pose pas. Votre rendement sera égal au coupon d'intérêt, et la perte en capital ne sera que théorique, car à l'échéance vous allez récupérer la totalité de votre capital.

Les nouveaux investisseurs

Si vous pensez commencer à investir en obligations cette année, ou encore si vous croyez qu'il serait sage d'ajouter des obligations à votre portefeuille, voici quelques conseils de nos experts sur la façon de le faire.

D'abord, il vaut mieux éviter les fonds communs d'obligations, car ceux-ci tiennent compte de la perte en capital, explique Pierre Lapointe.

Les obligations sont continuellement réévaluées à la juste valeur marchande, et la dépréciation des obligations lorsque les taux montent apparaît aussitôt sur la valeur du fonds.

De plus, les investisseurs devraient privilégier les obligations qui se trouvent dans la charnière de la courbe de rendement, c'est-à-dire les échéances de quatre à sept ans, selon Viet Buu, président de CTI Capital Valeurs mobilières.

«Ce sont elles qui fourniront les meilleurs rendements parce qu'elles se déprécieront moins que les obligations à plus long terme dans l'éventualité d'une hausse des taux», dit-il.

En effet, plus l'échéance de l'obligation est éloignée, plus la sensibilité du prix à un changement de taux est grande.

De plus, les obligations de quatre à sept constituent une alternative intéressante aux titres à très court terme dont le taux de rendement est très bas, si ce n'est presque nul.

Bien que les obligations semblent être une classe d'actifs très peu attrayante pour l'instant, elles demeurent un placement essentiel dans tout portefeuille équilibré, explique Pierre Bernard, vice-président à la gestion des placements à l'Industrielle Alliance.

«Même si les obligations risquent de générer un rendement total de zéro, il faut quand même en détenir à cause de la volatilité des marchés boursiers», dit-il.

«Lorsque les Bourses ont perdu plus de la moitié de leur valeur l'année dernière, les investisseurs étaient heureux d'avoir aussi des obligations malgré les faibles rendements», ajoute-il.

Les obligations des sociétés

Si l'indice des obligations DEX Univers a généré un rendement de 5,4% en 2009, c'est en grande partie à cause des obligations des sociétés, explique Guy Liébart, président de Gestion Sodagep, une société de gestion de portefeuilles de Montréal.

Si l'on décortique l'indice, on réalise que le rendement des obligations du gouvernement fédéral, qui composent près de la moitié de l'indice, n'a été que de 1,5%.

Mais il fa été compensé par le rendement alléchant des obligations de sociétés qui a atteint 16,2%.

Le poids des obligations de sociétés dans l'indice est nettement inférieur à celui des titres gouvernementaux.

Ce qui explique cette performance des obligations de sociétés, c'est en quelque sorte le retour du balancier. Lors de la crise du crédit en 2008, les obligations des sociétés s'étaient dépréciées énormément comparativement aux obligations du gouvernement fédéral qui servaient alors de valeur refuge.

Au pire de la crise, les craintes de faillites massives faisaient en sorte que personne ne voulait plus détenir de titres de sociétés.

Cette situation s'est presque entièrement inversée en 2009 au fur et à mesure que la crise de crédit s'atténuait.

Doit-on encore investir dans les obligations des sociétés?

«Il y a probablement encore un peu de jus à tirer des obligations des sociétés, mais ne vous attendez pas à une performance semblable à celle de l'année dernière», dit Guy Liébart.

Pour égaler le rendement de 5,4% réalisé par l'indice DEX Univers l'an dernier, il faudra une participation positive des obligations des gouvernements, ce dont plusieurs doutent.