Des chercheurs américains ont développé un nouveau test qui permet de prédire le risque d’accident des jeunes conducteurs en 15 minutes. Cette nouvelle approche pourrait permettre de réduire le nombre de blessés et de morts sur les routes, les jeunes conducteurs étant 2,5 fois plus susceptibles d’être impliqués dans une collision.

« En identifiant les conducteurs les plus à risque, on les sensibilise », explique l’auteure principale de l’étude publiée en octobre dans la revue Pediatrics, Elizabeth Walshe, de l’Hôpital pour enfants de Philadelphie (CHOP). « Nous pouvons aussi, en théorie, intervenir par la suite chez ces jeunes, leur offrir par exemple une mise à jour quelques mois après l’obtention du permis de conduire. J’utilise le simulateur avec mes patients adolescents qui viennent d’avoir leur permis. Leurs parents, s’ils les accompagnent, peuvent aussi jouer un rôle. »

La Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) s’intéresse à cette technologie. « L’essai sur simulateur fait partie de la panoplie de moyens que la Société regarde afin d’identifier les jeunes conducteurs plus à risque d’accident et voir comment ils réagissent en situation d’urgence », répond Geneviève Côté, relationniste à la SAAQ. « La Société s’intéresse à toutes les approches qui peuvent permettre une amélioration de la sécurité routière. Nos équipes de recherches effectuent une vigie des meilleures pratiques. »

L’étude, menée auprès de 17 000 jeunes qui venaient de réussir leur examen de conduite du département de la Sécurité routière de l’Ohio (OTSO), consistait en une simulation de conduite de 15 minutes sur un ordinateur portable.

Les cobayes ont été divisés en dix groupes selon leur degré de dangerosité au volant.

Un an plus tard, le groupe jugé le plus dangereux avait eu 11 % plus d’accidents que la moyenne et le groupe plus sécuritaire, 10 % de moins. Les variables évaluées durant la simulation incluaient notamment la vitesse, l’accélération, le délai avant de freiner, la distance maintenue avec les autres voitures et la capacité de rester dans sa voie. À titre de comparaison, dans l’étude, les cobayes de moins de 18 ans avaient 18 % plus de risque d’avoir fait un accident dans l’année suivant l’obtention de leur permis par rapport à l’ensemble du groupe.

Le taux d’accidents avec blessés et morts diminue depuis quelques années chez les conducteurs québécois. Mais la SAAQ n’a pas réussi à diminuer le risque additionnel posé par les jeunes conducteurs, malgré l’introduction de nouvelles mesures. En 2018, le Québec a instauré un couvre-feu empêchant la conduite la nuit pour les apprentis, qui n’ont pas encore réussi leur examen pratique, et une interdiction d’avoir plus d’un jeune passager la nuit, pour les moins de 19 ans qui ont réussi leur examen pratique.

« Faire un suivi chez des gens plus à risque identifiés par un simulateur me semble tout à fait juste », dit Jacques Bergeron, professeur honoraire du département de psychologie de l’Université de Montréal. M. Bergeron a longtemps travaillé sur l’identification, avec des simulateurs, des risques associés à la personnalité de jeunes conducteurs ainsi qu’à leurs aptitudes motrices et visuelles. « On pourrait imaginer des formations supplémentaires dans les premiers mois après l’obtention du permis. »

Taux de réussite

Marc Thompson, directeur de l’Association des écoles de conduite du Québec, n’a jamais entendu parler d’une telle évaluation ici.

Ce qui nous préoccupe davantage, c’est que la SAAQ ne publie plus depuis quelques années les statistiques sur le taux de réussite des élèves des différentes écoles de conduite.

Marc Thompson, directeur de l’Association des écoles de conduite du Québec

Selon les données de la SAAQ, en 2019, 71 % des candidats à l’examen pratique l’ont réussi, contre 74 % en 2020 et 73 % durant les six premiers mois de 2021. Certains apprentis conducteurs doivent parfois recommencer l’examen pratique plus de 20 fois.

La Dre Walshe a continué un certain temps à utiliser le simulateur avec des jeunes ayant réussi leur examen de conduite avec le département de la Sécurité routière de l’Ohio. « Je sais qu’ils ont continué même après la fin de mes collectes de données après la fin de l’étude », dit-elle.

Mais depuis, l’OTSO a plutôt misé sur l’imposition de cours de conduite obligatoires. « Nous évaluons les résultats de l’étude » de Pediatrics, dit Judy Converse, relationniste de l’OTSO. « Nous avons utilisé une étude antérieure du CHOP pour améliorer l’accès aux cours de conduite, notamment à l’aide de bourses pour les jeunes défavorisés. »

La Dre Walshe utilise maintenant son simulateur avec des patients adolescents. « Quand ils viennent avec leurs parents à leurs rendez-vous médicaux, je les informe que le risque d’accident peut être prédit par ce simulateur. Les parents sont évidemment plus intéressés par le simulateur que les adolescents. »

En savoir plus
  • 61 %
    Proportion des jeunes de 16-24 ans qui étaient titulaires d’un permis de conduire au Québec en 1992
    SOURCE : SAAQ
    54 %
    Proportion des jeunes de 16-24 ans qui étaient titulaires d’un permis de conduire au Québec en 2022
    SOURCE : SAAQ
  • 8 %
    Proportion des jeunes de 16-24 ans parmi les titulaires d’un permis de conduire au Québec en 2017-2021
    SOURCE : SAAQ
    19 %
    Proportion des jeunes de 16-24 ans parmi les conducteurs impliqués dans des accidents avec blessures ou décès au Québec en 2017-2021
    SOURCE : SAAQ