(New York) Des archéologues ont déterré au Kenya certains des plus anciens outils de pierre jamais trouvés, mais on ne sait pas qui les utilisait avec certitude.

Les experts supposaient depuis un moment que seuls nos ancêtres directs fabriquaient des outils. Mais deux dents fossilisées trouvées avec les outils au Kenya appartenaient à un cousin humain disparu, Paranthropus, selon l’étude publiée jeudi par le journal Science.

Cela porte à penser que nos ancêtres directs de la lignée Homo n’étaient possiblement pas les seuls à savoir fabriquer des outils à l’âge de pierre, a dit l’auteur de l’étude, le chercheur Rick Potts du programme Human Origins du Smithsonian.

« Ces dents sont un vrai mystère, a-t-il dit. On se demande qui étaient ces anciens fabricants d’outils ? »

Les outils ont été fabriqués il y a environ 2,9 millions d’années, quand les premiers humains les ont utilisés pour dépecer des hippopotames avant de les manger, selon l’étude.

Des outils de pierre fabriqués il y a quelque 3,3 millions d’années ont déjà été trouvés au Kenya, bien avant l’émergence de nos ancêtres Homo. Ces outils étaient un peu plus simples, et jusqu’à présent ils n’ont été trouvés qu’en un seul endroit, a dit l’archéologue Shannon McPherron de l’Institut d’anthropologie évolutionnaire Max Planck, en Allemagne.

La plus récente découverte est dans la lignée de la tradition des outils Oldowan, a dit M. Potts. Ces outils ont été retrouvés à travers l’Afrique et ailleurs sur une échelle de plus d’un million d’années, ce qui témoigne de leur popularité.

Les anciens humains tenaient une pierre dans une main et la frappaient avec une autre, créant des éclats extrêmement coupants, a expliqué l’anthropologue Kathy Schick, du Stone Age Institute de l’Indiana.

Avec ces pierres et ces éclats, nos ancêtres pouvaient découper et écraser plusieurs matériaux, a dit l’auteur principal de l’étude, l’anthropologue Thomas Plummer, du Queens College de l’université new-yorkaise City.

Le site, connu sous le nom de Nyayanga, est un environnement de collines verdoyantes sur les rives du lac Victoria. Depuis le début des fouilles en 2015, des chercheurs y ont trouvé de grandes quantités d’objets et d’os d’animaux, en plus des deux dents de Paranthropus.

Des marques sur plusieurs os d’hippopotames montrent qu’ils avaient été découpés pour leur viande, qui aurait été mangée crue, a dit M. Plummer. Les premiers humains utilisaient aussi probablement leurs outils pour fracasser les os d’antilopes pour en extraire la moelle, ou encore pour apprêter des racines coriaces, concluent les auteurs.

« Les outils de pierre leur permettent, même il y a de cela si longtemps, d’extraire beaucoup de ressources de leur environnement, a expliqué M. Plummer. Si tu peux dépecer un hippopotame, tu peux dépecer pas mal n’importe quoi. »

Il était facile, dans le passé, de supposer que nos ancêtres directs utilisaient ces outils, a-t-il ajouté. Mais les dents ne permettent pas d’exclure que d’autres humains anciens fabriquaient leurs propres outils, précisent les chercheurs ― même des cousins disparus comme Paranthropus, avec leurs grosses dents et leurs petits cerveaux.

Le mystère ne sera pas élucidé de sitôt.

On ne peut pas savoir, par exemple, si Paranthropus utilisait ces outils, ou s’il est simplement mort, par hasard, là où ils se trouvaient, a dit Mme Schick : « Quand on trouve des restes d’hominidés avec des outils de pierre, on doit toujours demander s’il s’agit du repas ou du chasseur. »