(Québec) Pour éviter d’augmenter le nombre de patients orphelins, Québec, les médecins de famille et leur ordre professionnel s’entendent pour permettre des retraites progressives aux médecins de famille, qui n’auront plus à abandonner d’un coup leur clientèle.

C’est une entente qui était hautement attendue à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) dans le contexte où un médecin de famille sur quatre est âgé de 60 ans et plus. « Je me faisais poser la question régulièrement parce que la seule option qui s’offrait à eux, c’était soit 100 % ou 0 % », se réjouit le président de la FMOQ, le DMarc-André Amyot.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, le DMarc-André Amyot

« Nous, on souhaite garder ces médecins-là le plus longtemps possible. On ne veut pas qu’ils partent de façon prématurée. On comprend qu’à 60, 65 ans, et même plus, peut-être qu’ils ne veulent plus travailler à temps plein, mais qu’ils peuvent continuer de contribuer. Mais, avant c’était difficile », illustre-t-il. Selon la FMOQ, il manque au moins 1170 médecins de famille au Québec.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Pour la première fois cette année, l’arrivée de nouveaux médecins n’a pas compensé le nombre de départs. « Cette année, on est à moins 48 [médecins de famille] », précise le DAmyot. Selon la FMOQ, la possibilité de favoriser une transition graduelle vers la retraite incitera des médecins à rester plus longtemps, ce qui permettra d’éviter que le nombre de patients orphelins augmente dans les prochaines années.

Le rôle du Collège des médecins

C’est le Collège des médecins qui a lancé un chantier l’an dernier sur l’accès aux soins et la cessation d’exercice pour identifier des voies de passage et permettre aux médecins qui le souhaitent de diminuer leur charge. « Une des recommandations où tout le monde s’entendait, c’était comment on pourrait trouver des mesures […] vers la cessation progressive de l’exercice », indique le président, le DMauril Gaudreault.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le président du Collège des médecins du Québec, le DMauril Gaudreault

On ne veut plus se retrouver avec des médecins qui ont l’âge de leur retraite […] et qui, tout à coup, pour certains qui suivent 1000, 1200 ou 1500 personnes, délaissent leurs patients, et que 1500 patients se retrouvent sans médecin de famille.

Le DMauril Gaudreault, président du Collège des médecins

Le ministre Christian Dubé s’était d’ailleurs montré favorable aux retraites progressives à l’automne dernier. Un protocole a finalement été élaboré après des discussions avec le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), la FMOQ et le Collège pour déterminer une marche à suivre. « La démarche sera balisée », a assuré le DGaudreault. Or, les détails seront connus en 2024.

Un guide d’accompagnement sera diffusé en début d’année et viendra préciser les obligations déontologiques du médecin de famille qui voudra réduire ses activités professionnelles, comme la démarche pour aviser les patients d’une cessation graduelle d’exercice. Une première communication sera faite auprès des médecins vendredi pour leur permettre d’amorcer « leur réflexion » pendant la période des Fêtes.

Le nouveau mécanisme viendra simplifier la démarche, résume le DGaudreault. « Par exemple, je suis médecin de famille et je pense à la retraite, j’ai 1000 patients et je pourrais continuer à la condition d’en conserver 500, bien des mesures vont me permettre de faire ça », illustre-t-il. Les mesures n’impliqueront pas non plus « d’avoir été discutées avec les 10-15 collègues du bureau », illustre le président.

C’est que pour l’heure, les médecins près de la retraite qui travaillent en groupe de médecine familiale (GMF) peuvent réduire le rythme s’ils parviennent à transférer une partie de leurs patients à des collègues. Cette autorisation avait aussi ses limites, nuance le DAmyot.

« Peut-être que [dans certaines situations], je n’ai plus personne dans mon GMF qui peut les prendre. Donc [avec l’entente], il va y avoir une priorisation de certains patients. Qui a le plus besoin de suivi, par exemple. C’est tout ce protocole-là, cet algorithme-là, qu’on est venu mettre en place avec le Collège des médecins », explique le président de la FMOQ.

Le GAP comme « filet de sécurité »

Dans ce contexte, des patients pourront être dirigés vers un autre professionnel de la santé et d’autres, redirigés vers le Guichet d’accès à la première ligne (GAP). Selon le DAmyot, le GAP permet maintenant d’ajouter un « filet de sécurité » qui n’existait pas avant pour les patients qui ont des besoins ponctuels de consultations médicales. « Avec le GAP […], des patients vont pouvoir avoir un service, et pour les plus malades, nous, on va s’assurer d’avoir une continuité de soins », explique-t-il.

Le GAP a néanmoins connu des ratés depuis son implantation. Le ministre Christian Dubé a d’ailleurs nommé en octobre un « coordonnateur d’accès », l’ex-PDG du CIUSSS de la Capitale-Nationale, Michel Delamarre, pour qu’il améliore le fonctionnement et la performance du guichet. Québec veut notamment qu’un patient puisse discuter de plusieurs problèmes de santé lors d’un même rendez-vous.

En savoir plus
  • 590 316
    Nombre de personnes sans médecin de famille, donc admissibles au GAP, au 15 novembre 2023
    Source : ministère de la Santé et des Services sociaux