Les inquiétudes du directeur national de santé publique, le DLuc Boileau, se concrétisent déjà : le taux d’achalandage dans les urgences du Québec s’est établi à 127 % en moyenne dans la dernière semaine. La dernière fois qu’il avait été aussi élevé, c’était en janvier 2020, avec 130 % d’occupation, quelques mois avant le début de la pandémie de COVID-19.

« Lundi, on a eu un flot de patients incroyable. Malheureusement, le système a très peu de réserves, donc beaucoup de patients ont quitté sans être vus. Les salles d’attente sont bondées », a dit le président de l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec, le DGilbert Boucher.

Les urgences reçoivent 10 780 visites par jour en moyenne. Du nombre, 53 % sont jugées comme « moins urgentes ou non urgentes ».

Les Québécois ont besoin de beaucoup de soins, mais le personnel de la santé est à bout de souffle. C’est difficile de voir la lumière au bout du tunnel, mais on y va une journée à la fois.

Le DGilbert Boucher, président de l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec

La situation est particulièrement critique dans le Grand Montréal, indique-t-il. À l’heure actuelle, « 75 % des urgences de Montréal sont en haut de 130 % ».

Le mois de décembre risque d’être « difficile » avec la forte transmission de la COVID-19 et de la grippe dans la province, avait prévenu lundi le DBoileau. Il a d’ailleurs révélé que les cas de grippe sont en forte hausse dans la province. Dans la dernière semaine, 3356 cas d’influenza ont été recensés au Québec, surtout en milieu hospitalier. La transmission de la COVID-19 semble également en hausse, mais Québec note toutefois une baisse de la transmission du virus respiratoire syncytial (VRS).

Le DBoucher constate déjà les impacts de cette forte transmission des virus respiratoires. « La demande avec l’influenza a beaucoup augmenté », dit-il.

Après les enfants, c’est au tour des adultes et des personnes âgées de se retrouver en grand nombre aux urgences, observe-t-il.

Si les gens à risque attrapent l’influenza, ça pourrait être très difficile pour la congestion des hôpitaux.

Le DLuc Boileau, directeur national de santé publique du Québec

Fait plus réjouissant : le nombre de patients en attente d’une intervention chirurgicale depuis plus d’un an est pour l’instant en baisse. Dans la dernière semaine, 691 patients ont été retirés de cette liste, pour un total de 21 066. Ce chiffre suit déjà une tendance à la baisse depuis le début de l’automne.

Une pression « inévitable »

À l’Hôpital général juif, le DMatthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses, s’inquiète aussi de ces données : « 127 %, ça vous montre à quel point les urgences sont surchargées actuellement ».

Jusqu’à présent, la multiplication des virus balayant le Québec cet automne a malmené particulièrement les enfants. Deux semaines plus tôt, davantage d’élèves étaient absents des écoles qu’au sommet de la vague Omicron, et près d’un enfant sur quatre hospitalisé en raison d’un virus respiratoire combattait plus d’une infection.

« Je m’attends à ce que le même phénomène de hausse atteigne bientôt les hôpitaux réguliers avec la même intensité. Tous ces enfants infectés par un virus vont le transmettre à leurs parents, leurs grands-parents, leurs professeurs. C’est inévitable », poursuit le DOughton, en parlant d’une période des Fêtes « très difficile en vue ».

Interrogé à savoir quels gestes la population doit maintenant faire pour soulager le réseau de la santé, M. Oughton se fait sans équivoque. « On devrait avoir appris à ce stade-ci que de porter un masque dans des endroits clos achalandés, de rester à la maison lorsqu’on est infecté ou de réduire ses contacts, c’est la clé. Il faut continuer de le faire », persiste-t-il.

Enfin, l’expert appelle le gouvernement Legault à faire « plus durement » la promotion du vaccin contre l’influenza, qui est maintenant offert gratuitement partout au Québec. « C’est la taille des listes d’attente dans le réseau de la santé et, plus globalement, l’accès aux soins pour la population qui en dépend présentement », conclut le médecin.