L’accès aux soins de santé en Abitibi-Témiscamingue est plus difficile que dans d’autres régions comparables au Québec, selon une nouvelle étude de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) publiée jeudi.

Par manque d’accès aux soins, environ 2400 résidants de l’Abitibi-Témiscamingue se sont tournés vers l’Ontario en 2019 pour recevoir des soins, ont appris les chercheurs Krystof Beaucaire et Bertrand Schepper en formulant une demande d’accès à l’information à la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ).

Selon l’équipe de l’IRIS, qui se décrit comme un institut de recherche « progressiste », 72 % des visites aux urgences en Abitibi-Témiscamingue « sont le fait de personnes qui nécessitent des soins de première ligne, contre 53 % en moyenne au Québec ».

Ce qui fait dire aux chercheurs que « le mauvais accès aux soins de première ligne et aux médecins de famille s’observe à la quantité importante de personnes qui se rabattent vers les urgences, déjà engorgées, pour recevoir des soins de base » en Abitibi-Témiscamingue.

Après avoir analysé la question de l’accès aux soins de santé en Outaouais en 2021, l’IRIS s’est penché sur l’Abitibi-Témiscamingue. Les chercheurs ont notamment noté que le ratio d’infirmières auxiliaires par millier d’habitants est plus faible dans certaines MRC de l’Abitibi-Témiscamingue que dans des régions similaires.

CONSULTEZ l’étude de l’IRIS

Ratio de personnel infirmier par millier d’habitants

Abitibi-Témiscamingue : 7,8

Côte-Nord : 8,4

Gaspésie : 9,3

Krystof Beaucaire reconnaît que le nombre de médecins de famille par millier d’habitants en Abitibi-Témiscamingue est semblable à la moyenne québécoise (1,2 contre 1,3 pour le Québec). Mais certaines sous-régions, notamment la Vallée-de-l’Or, sont nettement moins bien desservies avec un ratio de 0,9 médecin de famille par 1000 habitants. « Notons toutefois que l’accès à un médecin de famille est un enjeu partout au Québec et que le fait de s’approcher de la moyenne québécoise n’est aucunement un signe de bonne accessibilité des services », écrivent les chercheurs.

L’Abitibi-Témiscamingue possède aussi « un plus grand ratio de personnes en attente d’une chirurgie d’un jour par millier d’habitants » (9,6) que les régions de la Côte-Nord (8,5) et de la Gaspésie – Îles-de-la-Madeleine (6,7), selon l’IRIS.

M. Beaucaire précise qu’il faut aussi tenir compte de la réalité géographique de l’Abitibi-Témiscamingue, qui compte seulement 148 242 habitants répartis sur le quatrième territoire en matière de superficie de la province. Si bien que les besoins en personnel sont « plus grands » que dans des régions plus denses.

Des maux « qui pourraient être évités »

Au cours des derniers mois, le manque de personnel a entraîné des diminutions de services en Abitibi-Témiscamingue. Le département d’obstétrique de l’hôpital de Ville-Marie a notamment été fermé pendant près de cinq mois en 2021. Les heures de services dans certains CLSC ont aussi été diminuées, notamment durant la nuit.

Pour les chercheurs, l’accès diminué aux soins de santé en Abitibi-Témiscamingue « cause à sa population du stress et des souffrances qui pourraient être évités si la situation de la région était prise au sérieux ».

Pour M. Beaucaire, le « plus grand problème en santé en Abitibi-Témiscamingue est la pénurie de personnel ». Une situation qui date d’avant la pandémie. « Ça fait longtemps que la situation dure et on ne fait pas assez pour redresser la situation », dit-il. La prochaine région qui passera sous la loupe de l’IRIS est Lanaudière.

Le CISSS de l’Abitibi-Témiscamingue n’a pas voulu commenter la situation, mercredi, n’ayant pas pris connaissance de l’étude.