Après la pénurie de papier de toilette et de lait maternisé, voilà que les médicaments pour enfants à base d’ibuprofène et d’acétaminophène, contre la douleur et la fièvre, commencent à manquer. Les étalages vides de Tylenol, d’Advil, de Motrin et de Tempra dans certaines pharmacies donnent des maux de tête aux parents.

« On reçoit ces médicaments au compte-gouttes, confirme Benoit Morin, président de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires. On parle d’une pénurie partielle, mais pas complète, ce qui fait en sorte que les pharmacies n’ont pas tous les formats, toutes les saveurs et toutes les concentrations. »

Si vous cherchez une marque en particulier ou une saveur en particulier, ça se peut très bien que vous ne trouviez pas.

Benoit Morin, président de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires

Les fabricants d’Advil et de Motrin, à base d’ibuprofène, et de Tylenol et de Tempra, à base d’acétaminophène, expliquent qu’ils font face à une demande sans précédent. En revanche, les marques privées (aussi appelée « marques maison ») se trouvent sans trop de difficulté en pharmacie.

Bertrand Bolduc, président de l’Ordre des pharmaciens du Québec, affirme que la hausse de la demande a commencé en hiver lorsque beaucoup d’enfants ont contracté la COVID-19. Et maintenant que les mesures sanitaires sont assouplies, d’autres virus respiratoires se sont mis à circuler.

Dans ce contexte, des parents se sont rués dans les pharmacies pour se procurer des médicaments contre la douleur et la fièvre.

« Je ne blâmerais pas trop les fabricants, car personne n’a vu venir les vagues de COVID, explique M. Bolduc. Au début de la pandémie, les enfants étaient moins atteints par le coronavirus et ils souffraient de peu de symptômes. Par contre, les nouveaux variants ont semblé affecter davantage les tout-petits. »

Un problème bientôt réglé ?

Benoit Morin soutient que les fabricants ont déjà commencé à accélérer leur production. La pénurie devrait donc se résorber d’ici la fin de l’été, croit-il.

« L’Amérique du Nord, c’est un grand territoire. Ça ne prend pas un grand pourcentage d’augmentation de la demande pour créer ce qui arrive. Ce sont des produits qui sont limités dans le temps. Il y a une date d’expiration, donc il n’y a jamais un énorme surplus. »

Le pharmacien met d’ailleurs en garde les parents qui opteront pour un médicament de substitution s’ils ne trouvent pas celui qu’ils achètent habituellement. « Il y a un risque d’erreur quand on change de médicament. Si on est habitué à donner des gouttes à 80 mg/ml, mais qu’on change de sirop pour du 80 mg/5 ml, ce n’est plus la même concentration. Il faut que les parents soient attentifs », note-t-il.

Le spécialiste confirme que cette pénurie génère de l’incertitude chez les parents. « Mais il ne faut pas que cette incertitude fasse en sorte que tout le monde se précipite pour en acheter. Ça, il ne faut pas que ça arrive. Il faut que les gens soient assurés qu’on va en avoir suffisamment. »

« Je suis tannée »

Jessica Goulet a visité son Costco et trois magasins Walmart de sa région pour trouver de l’Advil pour son nourrisson, en Beauce. Les quatre commerces n’avaient pas le produit qu’elle cherchait. « J’ai finalement réussi à en trouver sur le site Amazon », explique cette mère de deux enfants.

PHOTO FOURNIE PAR JESSICA GOULET

Jessica Goulet avec son conjoint Jérémie Couture et leurs garçons Noah et Milan.

Mme Goulet est particulièrement exaspérée des pénuries qui frappent les produits de base pour enfants. Depuis le mois de février, elle dit avoir parcouru pas moins de 650 kilomètres pour trouver du lait maternisé hypoallergénique pour son bébé.

« Je suis tannée, mon Dieu, oui ! Je suis épuisée par toutes ces ruptures de stock. Mon bébé est né le 23 novembre et depuis le mois de février, il est malade tout le temps. »

« Le Tylenol et l’Advil, c’est important. À partir de 6 mois, les enfants font de la fièvre à rien. Ils ont un rhume, ils font de la fièvre. Ils ont une poussée de dents, ils font de la fièvre », explique cette mère qui est aussi infirmière et qui dit utiliser des médicaments seulement en cas de force majeure.

Carolane Morasse, elle, s’est rendue dans un Jean Coutu de toute urgence, en début de semaine, pour soulager l’otite de sa fille. Au lieu de trouver du Tylenol, elle s’est heurtée à une grosse affiche bleue qui indiquait : « Produit en rupture de stock ».

PHOTO FOURNIE PAR CAROLANE MORASSE

Carolane Morasse

« J’ai été chanceuse parce que je suis allée voir le pharmacien et il m’a dit que je pouvais switcher pour du Tylenol pour adultes vu que ma fille a 10 ans. Ça m’a soulagée ! », raconte cette femme de Donnacona.

« C’est la même chose avec nous [les adultes], poursuit-elle. Quand on a mal quelque part, on est habitués d’avoir du Tylenol ou des Advil sous la main. Quand on n’en a plus, ça peut devenir irritant et on peut devenir irritables. »