C’est le deuxième cancer au rang des plus meurtriers, 2600 Québécois en meurent chaque année, mais le cancer colorectal n’est toujours pas ciblé par un programme de dépistage systématique au Québec, contrairement au reste du Canada, dénonce l’organisme Cancer colorectal Canada.

Ce cancer est pourtant l’un des plus faciles à dépister et à soigner, surtout s’il est détecté à un stade précoce, souligne Barry Stein, PDG de Cancer colorectal Canada et survivant de la maladie.

Même avec une bonne équipe, on n’est pas capables de lancer le programme de dépistage ici. On est la dernière province au Canada, incluant les territoires, qui n’a pas lancé son propre programme.

Barry Stein, PDG de Cancer colorectal Canada

« Les tests de dépistage ne sont pas si compliqués, et ç’a été démontré que le dépistage amène une diminution de la mortalité, une diminution des diagnostics de stade avancé et une amélioration de la survie après cinq ans », renchérit le DMustapha Tehfe, hémato-oncologue au CHUM.

Le dépistage du cancer colorectal se fait à l’aide du test immunochimique de recherche de sang occulte dans les selles (RSOSi), un test simple qu’on peut effectuer soi-même à domicile, pour détecter des saignements invisibles à l’œil nu.

Ensuite, si nécessaire, ce test peut être suivi d’une coloscopie.

Actuellement, au Québec, ce sont les médecins qui proposent ce test à leurs patients de plus de 50 ans, ou alors à ceux qui sont à risque en raison de leurs antécédents familiaux. Mais tous les médecins ne le proposent pas systématiquement.

Au ministère de la Santé et des Services sociaux, on indique que 40 % de la clientèle admissible de 50 à 74 ans a passé un test RSOSi.

« Il serait inexact d’affirmer que le Québec est la seule province qui ne dispose pas d’un programme de dépistage du cancer colorectal », affirme Robert Maranda, porte-parole du ministère, répondant aux critiques de Cancer colorectal Canada.

Le programme complet n’est pas encore en place, admet-il, mais plusieurs éléments ont été introduits ces dernières années, et d’autres sont en cours d’implantation.

Par exemple, la capacité de coloscopie a été augmentée partout au Québec, grâce au rehaussement des installations et équipements, et des mécanismes de suivi ont été mis en place, explique M. Maranda, dans une réponse envoyée par courriel.

Retard technologique

Mais plusieurs mesures tardent encore. Comme pour le dépistage du cancer du sein, le programme de dépistage du cancer colorectal prévoit que les patients admissibles recevront une invitation à passer le test RSOSi par l’entremise d’une ordonnance provinciale. Des mesures particulières doivent être prises pour les clientèles à haut risque et pour les patients sans médecin de famille, afin d’assurer un suivi adéquat.

Mais pour assurer un bon suivi, le ministère de la Santé ne dispose toujours pas des systèmes d’information requis, indique Robert Maranda, qui précise que des travaux sont en cours pour leur mise en place.

Même s’il n’y a pas d’invitation systématique au programme de dépistage, « le Québec présentait en juin 2019 le troisième meilleur taux de participation au Canada au dépistage par test fécal », souligne le porte-parole.

« Bien qu’il ne soit pas possible actuellement de déterminer la date de déploiement du programme de dépistage sous sa forme complète avec invitation et suivi systématique des usagers visés, de nombreuses actions et de nombreux travaux se poursuivent au ministère de la Santé et des Services sociaux et dans le réseau […] pour faciliter l’accès au dépistage pour les patients orphelins, pour assurer l’accès à la coloscopie et pour doter le Québec des systèmes informatiques qui sont requis. »

Malgré ces avancées, la pandémie a eu un impact négatif sur le nombre de tests de dépistage, de coloscopie et d’opérations colorectales, déplore le DMustapha Tehfe.

Selon les données du ministère de la Santé, 480 495 tests RSOSi ont été effectués au Québec en 2020-2021, comparativement à 647 254 en 2019-2020.

« Les délais pour faire un diagnostic par coloscopie ont presque doublé », observe le DTehfe, ce qui pourrait se traduire par une augmentation de la mortalité, puisque les cancers détectés plus tôt peuvent être plus facilement soignés.

En savoir plus
  • 68
    Nombre de personnes qui reçoivent chaque jour un diagnostic de cancer colorectal au Canada
    SOURCE : CANCER COLORECTAL CANADA
    26
    Nombre de personnes qui meurent chaque jour d’un cancer colorectal au Canada
    SOURCE : CANCER COLORECTAL CANADA