Des infirmières ont réagi à notre appel à tous au sujet de la prime de 12 000 $ à 18 000 $ offerte par le gouvernement Legault pour les attirer et les retenir dans le réseau de la santé public. Voici quelques réactions :

Ma qualité de vie vaut plus que ça

Étant infirmière clinicienne à temps partiel et mère de famille, jamais je ne retournerai à temps plein, même pour 18 000 $. Ma qualité de vie vaut bien plus que ça. Il faut redonner aux infirmières le goût de travailler, regarder les changements possibles pour augmenter les heures sans nuire à la qualité de vie. Parmi toutes les collègues à temps partiel que je connais, aucune ne va passer à temps plein pour la prime.

Aline Beaupère

Un petit appât

J’ai accueilli l’annonce de la prime avec un sourire en pensant d’abord que ce montant était un début d’accord annuel. J’ai vite compris qu’il s’agissait d’un petit appât simplement pour nous mettre en appétit. Rien qui n’équivaille aux salaires que j’ai rencontrés chez les travailleurs de la construction, les employés de la Ville, les électriciens, les plombiers et tous les corps de métier que j’ai dû côtoyer durant ma convalescence. […] Ostéopathe, kinésiologue, chiropraticien, tous ont un meilleur salaire que l’infirmière clinicienne.

Une infirmière qui a reçu un diagnostic de COVID-19 longue et qui désire garder l’anonymat

Ça ne réglera pas le problème

Je suis infirmière depuis 10 ans. L’argent, c’est bien beau, mais ça ne réglera pas le problème. Ce qu’on souhaite, c’est une conciliation travail-famille. Par exemple, il y a 5 ou 6 ans, il y avait la semaine de 32 heures où l’on travaillait 4 jours/semaine tout en cotisant pour la retraite comme à temps plein. Cependant, on ajoutait 1 heure de plus à notre journée et beaucoup de gens appréciaient cette formule. […] La solution, d’après moi : conciliation travail-famille, qui va attirer plus de gens et surtout leur donner envie de rester, des ratios patients/infirmière raisonnables, et arrêter de montrer les agences du doigt et accepter leur aide ! Avec une augmentation salariale adéquate bien méritée, on pourrait régler le problème à long terme.

Neigely Gardet

Primes insuffisantes

Je suis infirmière depuis 30 ans. Non, les primes ne sont pas suffisantes ! Vous devriez donner des primes à celles qui s’engagent à devenir infirmières avec une garantie de travailler au public pour une durée prédéterminée, en plus d’offrir un meilleur salaire aux infirmières déjà en place (soit le même salaire qu’au privé). Nous sommes sous-payées pour ce que nous faisons. Il faut attirer les jeunes dans cette merveilleuse carrière.

France Houle

Pourquoi accepter une mesure temporaire ?

Je suis infirmière depuis huit ans et j’ai quitté le système de santé public après sept années à l’urgence. Les mesures annoncées sont irréalistes, étant donné que les infirmières sont épuisées et qu’elles n’obtiennent pas ce qu’elles demandent depuis longtemps : des conditions décentes et humaines. Pourquoi les infirmières au privé retourneraient-elles dans le système public ? Elles ont l’argent et les conditions au privé, alors qu’elles n’auraient que l’argent au public, et ce, de manière temporaire.

Émilie Harrison

Non, merci !

Après 15 ans comme infirmière dans le domaine public, je suis maintenant au privé. Ce ne sont pas 15 000 $ qui me feront revenir dans le réseau ! L’horaire de travail (jour, soir, nuit) dans la même semaine, les appels de dernière minute, les congés refusés ! Non, merci ! Oui, mon salaire a diminué un peu, mais j’ai du temps avec ma famille, et cela n’a pas de prix.

Mélanie Quirion

Pour ma santé mentale

L’argent ne nous donne pas de meilleures conditions de travail. […] Pas de temps plein pour moi, je garde mon temps partiel, ma santé mentale vaut plus que ça.

Lise Drouin

Une révolution, vraiment ?

Je suis déçue de cette proposition annoncée comme étant une révolution. Vraiment ? Je n’arrive pas à m’expliquer pourquoi le gouvernement n’a pas été vraiment novateur et plutôt proposé un horaire type temps plein 9 jours sur 15 en ajustant fériés et congés de maladie au prorata ? Combien ça aurait coûté aux contribuables une proposition comme celle-là ? Je serais curieuse de savoir si cela a même été évoqué dans leur réunion de grands penseurs de la semaine dernière. Pourtant, selon mes discussions avec d’autres infirmières, il aurait s’agit là d’une piste de solution réalisable et surtout durable dans le temps.

Une infirmière aux urgences qui désire garder l’anonymat

M. Legault, venez voir l’ampleur de la situation

C’est bien beau, le cadeau de 15 000 $ (qui ne sera pas 15 000 $ quand toutes les déductions seront enlevées), mais il aurait été préférable d’avoir une augmentation de salaire importante qui aurait, par exemple, eu un effet sur notre régime de retraite. […] J’invite M. Legault à venir faire quelques nuits de travail en observation sur mon unité, pour qu’il réalise l’ampleur de la situation. Qu’il voie à quel point nos petits patients peuvent être malades, et comment cela ajoute à l’épuisement du travail. Peut-être à ce moment pourrait-il consulter et entendre la détresse de toutes nos infirmières à bout de souffle et trouver enfin une solution qui sera efficace et appréciée de toutes et tous.

Sylvie Vézina