(Montréal) Une approche déployée aux États-Unis et qui pourrait bientôt être adoptée au Québec semble à la fois efficace et rentable quand vient le temps de convaincre les parents d’arrêter de fumer, démontre une étude à laquelle a participé un médecin du CHU Sainte-Justine.

Le programme CEASE (pour Clinical Effort Against Secondhand Smoke Exposure) a été développé à l’Hôpital général du Massachusetts. Il consiste à interroger les parents concernant leur utilisation du tabac (ou celle d’un membre de l’entourage de l’enfant) dès leur arrivée à la clinique pédiatrique et, le cas échéant, à sonder leur intérêt à recevoir de l’aide pour cesser de fumer.

« C’est un dépistage systématique du tabagisme chez les parents », a résumé le docteur Olivier Drouin.

Au moment de leur premier rendez-vous, la réceptionniste demande aux parents de remplir un sondage sur une tablette électronique. C’est à ce moment qu’on leur demande si quelqu’un fume dans l’entourage de l’enfant et si cette personne serait ouverte à recevoir de l’aide pour la cessation tabagique.

Le dépistage tabagique se fait donc « en amont » de la rencontre avec le médecin, qui ne devient plus le seul responsable de devoir soulever la question avec les parents fumeurs. Le message qui est envoyé aux patients est clair : tout le personnel de la clinique prend la cessation tabagique au sérieux.

« En enlevant cette tâche-là des épaules du clinicien, on s’assure qu’on le fait systématiquement pour [tous les parents], a dit le docteur Drouin. L’étude a démontré que le taux de tabagisme, après deux ans, fléchit d’à peu près quatre points de pourcentage de plus dans les cliniques où ce programme-là avait été implanté. »

L’analyse effectuée par l’équipe du docteur Drouin conclut que l’intervention CEASE, même si elle est modestement plus dispendieuse que l’approche traditionnelle, est aussi plus efficace.

La prévalence du tabagisme a ainsi diminué de 2,7 % dans les cliniques où l’intervention était présente, comparativement aux cliniques contrôles où elle a augmenté de 1,1 %.

La plupart des parents sont ouverts à une discussion concernant leur tabagisme, poursuit le docteur Drouin. Mais malheureusement, ce sont des autres, de ceux qui répondront au pédiatre de se mêler de ses affaires, dont le médecin se souviendra le plus et qui pourront le décourager d’aborder la question.

« Le problème pour les cliniciens, c’est que le goût qui nous reste dans la bouche, ce sont les expériences négatives, qui ne sont pas fréquentes, mais qui sont assez marquantes, a admis le docteur Drouin. Ça fait en sorte qu’il y a une peur qui s’installe d’aborder le sujet de peur de se mettre les familles à dos. »

Les retombées positives d’une intervention auprès des parents pourront être plus difficiles à mesurer ou à déceler, puisqu’ils ne se vanteront pas nécessairement d’avoir cessé de fumer lors de leur prochain rendez-vous.

Le docteur Drouin et ses collègues planchent actuellement sur un programme qui s’inspirera de CEASE et qui pourrait être déployé au CHU Sainte-Justine. En plus du tabagisme, le programme concernera des habitudes de vie comme l’activité physique, le sommeil, l’alimentation et le temps passé devant un écran.

« Ce sont des comportements qui sont assez prévalents dans la population, ce sont vraiment des problèmes de santé publique, mais on peut profiter de la rencontre médicale pour supporter les familles, dépister le problème, et leur donner des ressources pour les aider », a-t-il conclu.

Les conclusions de cette étude sont publiées par le journal médical JAMA Network Open.