(Montréal) Des jeunes ont subi des blessures graves aux poumons en utilisant leur vapoteuse « normalement », au point où certains ont dû être hospitalisés aux soins intensifs, révèle une étude publiée tout récemment par un chercheur montréalais.

Des 88 jeunes blessés rapportés par quelque 2700 pédiatres membres du Programme canadien de surveillance pédiatrique, 39 avaient subi des blessures aux poumons.

« Ça me touche que ce soit surtout des cas de jeunes qui utilisent la vapoteuse de façon "régulière" [et] il y avait 39 cas qui étaient des cas de détresse respiratoire ou de blessures pulmonaires », a dit l’auteur de l’étude publiée par le journal médical BMJ Paediatrics Open, le docteur Nicholas Chadi du CHU Sainte-Justine.

Des 13 jeunes qui ont été hospitalisés aux soins intensifs, 11 l’ont été pour de telles lésions aux poumons, a-t-il ajouté.

« Des jeunes qui vont aux soins intensifs parce qu’ils ont fumé une cigarette, on ne voit pas ça en pédiatrie, a souligné le docteur Chadi. Là, on a quarante cas de blessures pulmonaires sévères en un an, et c’est probablement la pointe de l’iceberg. Ce sont seulement les cas rapportés par les pédiatres. Il y a donc vraiment un profil de risque avec la vapoteuse qui n’existe pas avec la cigarette traditionnelle. »

Les pédiatres ont été interrogés entre les mois d’octobre et de décembre 2019. Les 88 blessures rapportées à ce moment représentaient un bond considérable par rapport aux 35 notées en 2015.

Seize de ces 88 jeunes ont conservé des séquelles de leurs blessures après leur hospitalisation. Le docteur Chadi lancera sous peu une nouvelle étude pour examiner le sort des jeunes dont les poumons avaient été abîmés.

« Est-ce qu’ils vont récupérer complètement ou non ? À voir les images sur les rayons X, on s’imagine qu’ils vont avoir des séquelles », a-t-il dit.

Comparaison avec la cigarette

La vapoteuse est trop souvent perçue comme étant essentiellement inoffensive, et certainement moins dangereuse que la cigarette traditionnelle, déplore le docteur Chadi.

Plusieurs parents préféreront en effet voir leur jeune vapoter que fumer la cigarette ou du cannabis, poursuit-il, mais « il y a encore une très grosse différence entre la perception des risques et les risques réels ».

« Dans ma pratique clinique, j’ai énormément de jeunes vapoteurs qui viennent me voir et qui disent qu’ils toussent et qu’ils ont de la difficulté à respirer et qu’ils sont moins en forme, a dit le docteur Chadi. C’est plutôt le genre de choses qu’on entend avec la cigarette pour des dommages chroniques. »

La comparaison entre la vapoteuse, la cigarette et d’autres substances est erronée, croit-il.

Il y aurait six fois plus de jeunes qui vapotent que de jeunes qui fument la cigarette. Un tiers des jeunes du secondaire auraient utilisé une vapoteuse au cours de la dernière année et un tiers au cours du dernier mois.

« Ça fait 30 ans qu’on n’a pas vu ces niveaux-là avec la cigarette », a souligné le docteur Chadi.

Le confinement engendré par la pandémie de coronavirus semble aussi d’avoir eu pour effet d’aggraver la consommation des jeunes chez qui elle était déjà problématique.

Le nombre de vapoteurs n’a pas nécessairement augmenté depuis le début de la crise sanitaire, a-t-il dit, mais on « voit un pattern d’utilisation en solitaire à la maison, des patterns de dépendance plus sévère, donc c’est plus difficile pour ces jeunes-là d’arrêter et ils deviennent accros à la nicotine et aux autres substances qu’ils utilisent ».

« Ça devient un casse-tête pour les professionnels de la santé qui essaient d’aider ces jeunes-là dans un système de santé et de santé mentale complètement surchargé », a conclu le docteur Chadi.