Seulement une ordonnance d'antidépresseurs sur deux au Québec vise à traiter la dépression, selon une nouvelle étude montréalaise. Et dans près d'un cas sur trois, les antidépresseurs sont utilisés dans un but non prévu par Santé Canada.

« Nous avions entendu parler de manière anecdotique de médecins de première ligne qui prescrivent des antidépresseurs pour des motifs très variés », explique Jenna Wong, auteure principale de l'étude publiée hier dans le Journal de l'Association médicale américaine (JAMA), qui fait un doctorat en épidémiologie à l'Université McGill.

« Mais il n'y avait pas de données chiffrées sur le sujet. Nous avons décidé de profiter d'une plateforme de recherche que nous avons mise sur pied. » La plateforme MOXXI fournit des services de gestion de données à une dizaine de cliniques médicales de Montréal et de Québec.

Les utilisations non autorisées (off label) ne sont pas nécessairement fautives, dit Mme Wong. « Il peut y avoir des données empiriques publiées, mais qui n'ont pas été encore prises en compte par les autorités médicales. Ou alors, il peut s'agir d'une utilisation qui n'intéresse pas les compagnies pharmaceutiques. Finalement, un médecin peut avoir entendu parler de cette utilisation par un collègue ou avoir constaté avec des patients qu'elle semblait fonctionner. Nous voulons maintenant voir où il y a des données empiriques pour les utilisations non autorisées. Et on pourrait penser à des études cliniques pour vérifier la validité d'autres utilisations non autorisées. »

102 000 ORDONNANCES ÉTUDIÉES

L'étude du JAMA, qui regroupe 102 000 ordonnances par 185 médecins de famille, évalue la proportion d'ordonnances d'antidépresseurs qui visent une utilisation non autorisée, en fonction de la raison invoquée par le médecin. Par exemple, les antidépresseurs étaient toujours autorisés pour traiter la dépression, presque jamais pour l'insomnie, le stress post-traumatique et les troubles urinaires, et jamais pour la migraine, les bouffées de chaleur de la ménopause, le déficit d'attention et les troubles sexuels.

Les médecins utilisant la plateforme MOXXI doivent indiquer la raison d'une ordonnance. Les notes du dossier médical étaient consultées pour évaluer si l'utilisation était autorisée ou non.