Les patients qui se sont rendus par eux-mêmes dans les urgences du Québec en 2013-2014 ont attendu en moyenne 4h22 min avant d'obtenir leur congé révèlent des données du ministère de la Santé obtenues par La Presse en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

C'est la première fois que la durée réelle de prise en charge des patients ambulatoires aux urgences est révélée au Québec.

Que ce soit pour l'otite d'un tout petit ou le bras cassé d'un plus vieux, la majorité des patients qui se présentent dans les urgences du Québec s'y rendent par eux-mêmes et non en ambulance. En 2013-2014, 68% des 3,5 millions de Québécois qui ont visité les urgences étaient des patients ambulatoires.

La durée moyenne de séjour des patients ambulatoires, qui tient compte du délai qui s'écoule entre le moment où ils sont vus par l'infirmière du triage et le moment où ils obtiennent leur congé, a été de 4h22 min en moyenne. Pour les patients sur civière, soit les cas plus graves, l'attente a été de 16h42 min.

Un délai «raisonnable»

Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, estime que «dans le contexte actuel de système sous-optimal, quatre heures d'attente pour les patients ambulatoires, c'est raisonnable». «Mais si la première ligne était plus efficace, on viserait moins de quatre heures, dit-il. Une de mes missions, c'est de rendre le système plus efficace.»

Le ministre compte notamment sur la création de 50 supercliniques pour améliorer la situation. «Par définition, ces cliniques seront des miniurgences qui pourront traiter plus rapidement les cas moins urgents», note-t-il.

Le président du Conseil pour la protection des malades, Paul Brunet, estime pour sa part que les données du ministère de la Santé ne témoignent pas de la réalité, car «tous les cas de priorité sont confondus». «On sait que les cas moins urgents attendent bien plus que quatre heures aux urgences. En mélangeant tous les cas de priorité, l'attente a l'air moins pire qu'elle ne l'est réellement», critique-t-il.

Inégalités régionales

De toutes les régions du Québec, c'est dans Lanaudière que les patients ambulatoires attendent le plus longtemps aux urgences (6h14 min), suivi de Laval (5h45 min) et les Laurentides (5h38 min).

Le directeur régional des affaires médicales pour l'agence de la santé de Lanaudière, le Dr Jean-Claude Berlinguet, dit se préoccuper de la situation. «Nous sommes l'une des régions où le manque d'accès à un médecin de famille est le plus criant. Améliorer cet accès est notre priorité pour améliorer la situation aux urgences», dit-il.

À Montréal, l'attente des patients ambulatoires a diminué d'une dizaine de minutes depuis 2011 et atteint aujourd'hui 4h39 min. La cible du ministère de la Santé est de quatreheures.

Certains hôpitaux ont vu leur situation se dégrader depuis 2011. À l'hôpital Fleury à Montréal, l'attente des patients ambulatoires est passée de 5h13 min à 6h18 min depuis 2011 et à l'hôpital Santa Cabrini, l'attente atteint 5h48 min.

À l'inverse, certains établissements ont radicalement amélioré leur situation, comme l'hôpital du Lakeshore où l'attente est passée de 8h15 min en 2011 à 4h28 min cette année et l'hôpital Maisonneuve-Rosemont où l'attente a diminué d'une heure pour atteindre 4h03 min.

Diffusion à l'automne

L'Ontario et l'Alberta publient depuis quelque temps déjà leurs données d'attente pour leur clientèle ambulatoire aux urgences. Le ministre Barrette promet que les statistiques seront publiées dès l'automne. Les détails de l'attente pour chaque catégorie de patients (catégorie P1 (très urgent) à P5 (non urgent) seront aussi diffusées au plus tard l'an prochain.

- Avec la collaboration de Serge Laplante