Après avoir aboli la protection de 15 ans pour les brevets pharmaceutiques, le gouvernement Marois prend à nouveau l'industrie de front. Québec décrétera au cours des prochains jours un prix fixe pour une famille de médicaments aussi répandus que coûteux utilisés dans le traitement des ulcères d'estomac, a appris La Presse.

Ces médicaments, des inhibiteurs de la pompe à protons, ou IPP, sont prescrits à plus de 200 000 Québécois. La mesure permettra d'épargner une quarantaine de millions par année, si l'on se fie aux échanges entre Québec et l'industrie. Ces médicaments stoppent les reflux gastriques et éliminent les symptômes liés aux ulcères gastriques. Mais ils coûtent cher: une étude du défunt Conseil du médicament, en 2010, précisait que les assureurs privés déboursaient en moyenne 800 $ annuellement par assuré pour ce type de médicament, extrêmement répandu.

Le navire amiral de cette famille est le Nexium, qui coûte 2,15 $ le comprimé. Sa version générique coûte 1,30 $ le cachet. Le ministre de la Santé, Réjean Hébert, tranchera dans ce dossier avant la fin de la semaine. Québec ne paiera pas plus que 55 cents le comprimé. Les patients qui tiennent au produit que leur prescrivait leur médecin jusqu'ici devront assumer la différence.

250 millions par année

Il s'agit d'un marché de plus de 250 millions par année, qui a augmenté très rapidement, selon les chiffres de l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux (INESSS) en 2010. Ce seul produit représente 7 % de la valeur des médicaments remboursés par la Régie de l'assurance maladie du Québec, selon cette étude.

L'organisme rendra publiques demain ses recommandations dans le dossier - un avis reçu il y a plusieurs jours par le ministre Hébert, qui pourra annoncer tout de suite la décision de Québec. Hier, son attachée de presse Ariane Lareau a confirmé qu'une décision serait annoncée avant la fin de la semaine dans ce dossier.

L'Institut avait attaché le grelot à la prescription répandue de ce médicament en 2010 en proposant des règles pour «optimiser» ces ordonnances coûteuses. Les malades avaient tendance à prendre leurs cachets plus d'une fois par jour et continuaient d'y recourir pendant plusieurs années, inutilement.

À l'automne

Québec prévoit toutefois que sa décision s'appliquera à l'automne, probablement le 1er octobre, pour éviter des inconvénients aux patients qui ont déjà en poche une ordonnance de longue durée.

La décision de Québec de fixer unilatéralement un prix constitue une première - un geste que l'industrie pharmaceutique, déjà échaudée par le budget de Nicolas Marceau, décrira comme «agressif». En novembre dernier, on a décrété la fin de la protection de 15 ans sur les brevets, qui existait depuis 1994. Cette mesure permettait au gouvernement d'économiser 190 millions.