Tous les Québécois d'âge adulte sont appelés à voter, demain, afin d'élire les deux citoyens qui les représenteront sur les conseils d'administration des 185 établissements de santé de la province. Lors des dernières élections en 2004, moins de 36 000 personnes avaient voté. Et cette année, la majorité des établissements ne tiendront même pas d'élections, car trop peu de candidats se sont présentés. Le ministère de la Santé ignore combien coûte ce scrutin. Alors que l'exercice est si peu populaire, doit-on remettre en question sa pertinence?

Sur chaque conseil d'administration composé d'un maximum de 21 personnes, deux sièges sont réservés à des membres du public élus par la population. Les gens intéressés à poser leur candidature avaient jusqu'au 3 octobre pour le faire.

Dans 101 établissements, seulement deux candidats se sont présentés et ont donc été élus d'emblée. Dans six autres, seulement un, voire aucun candidat ne se s'est présenté. Les agences de la santé locales devront nommer des représentants.

Des élections auront donc lieu dans seulement 78 établissements de santé, soit des hôpitaux, des centres de santé et de services sociaux (CSSS), des centres de réadaptation et des centres jeunesse. Moins de 400 candidats au total sont dans la course.

Pour poser sa candidature, il faut respecter une liste de critères, notamment être majeur et ne pas travailler dans l'établissement concerné. Parmi les candidats de cette année, on compte entre autres plusieurs retraités, des ingénieurs, des secrétaires et des étudiants. Les dernières élections dans le réseau de la santé remontent à 2004. Le mandat de quatre ans des élus venait à échéance en 2008, mais il a été reconduit jusqu'à cette année.

Coût inconnu

Le ministère de la Santé ignore les coûts de ces élections et réfère plutôt à chaque établissement. Or, plusieurs n'ont pu transmettre la note de leur scrutin de cette année, prétextant que les dépenses n'étaient pas encore toutes comptabilisées. Obtenir le coût des élections de 2004 a aussi été difficile, plusieurs établissements exigeant une demande d'accès à l'information.

Parmi les rares qui ont accepté de divulguer leurs dépenses, le CSSS de Laval affirme que sa facture s'élèvera cette année à 4400 $. Ces frais couvrent principalement les coûts de publication des appels de candidatures dans les journaux et d'impression des bulletins de vote. Le jour des élections, des employés des établissements coordonneront le vote. Les frais liés à leurs salaires n'ont toutefois pas été inclus dans le coût total.

Même situation à l'hôpital Pierre-Boucher de Longueuil, où le coût de l'élection est de 20 000 $. «Cette somme inclut le coût des élections pour tous les postes du conseil d'administration, et non pas seulement pour les deux postes ouverts à la population», note la porte-parole de l'établissement, France Descoteaux. Par exemple, les membres du personnel non clinique de l'hôpital Pierre-Boucher ont voté par la poste pour leur représentant au conseil d'administration, ce qui a entraîné des coûts.

Processus inutile

Professeur en administration de la santé à l'Université de Montréal, André-Pierre Contandriopoulos explique que la présence de membres de la communauté sur les conseils d'administration vise à garantir que les besoins de la population sont comblés.

Or, M. Contandriopoulos note que la loi 127, adoptée en juin dernier, a fait passer le nombre de représentants de la population sur les conseils d'administration de quatre à deux. Conséquence: leur rôle est atténué. «Certains peuvent avoir l'impression que les élections ressemblent de plus en plus à une parodie de démocratie. Et plus on a ce sentiment, moins on peut mobiliser les gens autour des élections», ajoute-t-il.

La directrice générale de l'Association québécoise des établissements de santé et services sociaux (AQESSS), Lise Denis, a milité récemment pour abolir le scrutin universel. «Il faut se demander si l'effort en vaut le résultat. Ça a l'air très démocratique comme processus. Mais ce ne l'est pas vraiment parce qu'on n'atteint pas les objectifs. C'est beaucoup de travail. S'il y avait un vote significatif, ça vaudrait la peine. Mais là...», dit Mme Denis. Elle croit que les conseils d'administration devraient plutôt nommer les représentants de la population en se basant sur des listes de volontaires.

Directeur adjoint aux ententes de gestion au ministère de la Santé, Pierre Laflamme croit au contraire que «la démocratie vaut l'effort». «On pourrait nommer des gens, mais ce serait compliqué. La meilleure façon de solliciter la population, c'est des élections. Cette année, on a des établissements où il y a de 8 à 1 candidats. Ce n'est pas rien», dit-il.

ÉLECTIONS DANS LA SANTÉ

> Établissements avec élections: 78

> Sans élection, car seulement 2 candidats se sont présentés: 101

> Sans élection, car un seul ou aucun candidat ne s'est présenté: 6