Le premier ministre François Legault se dit confiant de pouvoir légiférer pour interdire le port de signes religieux chez les employés de l'État en position d'autorité sans avoir recours à la disposition de dérogation de la Charte canadienne des droits et libertés.

À l'issue d'une rencontre avec la mairesse Valérie Plante, vendredi à Montréal, M. Legault a réitéré son intention d'agir rapidement avec le dépôt d'un projet de loi en ce sens, probablement au printemps prochain.

Il a affirmé que le ministre responsable du dossier, Simon Jolin-Barrette, un avocat, est « convaincu que ce ne sera pas nécessaire d'utiliser la clause nonobstant », soit la disposition qui permet à un gouvernement provincial d'échapper aux obligations de la Charte.

Réagissant aux propos du sociologue Gérard Bouchard, qui a condamné à son tour la position du gouvernement Legault dans des propos rapportés par la CBC, le premier ministre a dit répondre non pas à une quelconque base théorique, mais bien à « la position d'une majorité de Québécois ».

M. Bouchard, coauteur du rapport Bouchard-Taylor sur la question des accommodements raisonnables, s'oppose à l'intention du gouvernement caquiste d'élargir l'interdiction de porter des signes religieux ostentatoires aux enseignants du primaire et du secondaire, estimant que ces derniers ne représentent pas du tout le même genre d'autorité coercitive que les juges, policiers et gardiens de prison.

Son rapport suggérait de limiter l'interdiction à ces trois derniers groupes, faisant valoir que ceux-ci doivent apparaître aussi neutres qu'il est possible de le faire dans l'exercice de leur autorité.

François Legault croit pour sa part que l'interdiction doit inclure « les enseignants qui sont avec des enfants qui sont, d'une certaine façon, vulnérables ».

Le crucifix comme objet patrimonial

Par ailleurs, Gérard Bouchard maintient la recommandation faite dans son rapport de 2008 de retirer le crucifix de l'Assemblée nationale « au nom de la séparation entre l'État et les Églises, au nom aussi de la neutralité de l'État », écrivait-il à l'époque. Selon lui, il sera très difficile d'obtenir un consensus parmi les Québécois autour d'un modèle de laïcité « aussi longtemps que ce crucifix sera là », selon ce que rapporte CBC.

François Legault a cherché à rappeler les limites de ses intentions pour éviter des interprétations exagérées.

« Il y a des gens qui pensent que notre interdiction (du port de signes religieux) serait très large, alors que c'est limité à quatre groupes », a-t-il dit.

« Il n'a jamais été question que des élus, par exemple, ou des fonctionnaires se voient interdire le port de signes religieux. »

Le premier ministre se laisse tout de même des portes de sortie, rappelant que lorsque viendra le temps de déposer le projet de loi, « nous aurons une discussion et nous entendrons tout le monde », mais il a dit croire qu'il y a déjà « un consensus autour de notre position ».