L'ex-secrétaire principal de Justin Trudeau, Gerald Butts, est catégorique : le bureau du premier ministre n'a exercé aucune pression indue sur l'ancienne ministre de la Justice et Procureure générale Jody Wilson-Raybould pour qu'elle intervienne afin de conclure un accord de réparation avec SNC-Lavalin qui lui éviterait une procès criminel.

Et si l'ex-ministre estime avoir fait l'objet de pressions indues, elle n'a jamais exprimé son malaise avant que le premier ministre ne lui confie un autre ministère lors d'un remaniement causé par le départ d'un autre ministre, Scott Brison, a affirmé mercredi M. Butts durant un témoignage tant attendu devant le comité de la justice.

En tout temps, le bureau du premier ministre était d'avis que la décision de négocier ou non un accord de réparation avec la firme québécoise lui revenait entièrement. Mais le premier ministre tenait néanmoins à ce que la meilleure décision soit prise compte tenu qu'un procès criminel pourrait mettre en péril 9000 emplois, a ajouté M. Butts.

« Il nous a dit de garder à l'esprit en tout temps que la décision de demander à la directrice des poursuites pénales d'entamer des négociations en vue de la conclusion d'accords de réparation relève de la procureure générale, et d'elle seule. Nous avons mis en oeuvre cette directive fidèlement et avec intégrité. J'ai personnellement participé au dossier à quelques reprises seulement, mais il m'incombait de m'assurer que la directive du premier ministre soit suivie par les membres du personnel du cabinet du premier ministre. Je n'ai aucun doute qu'ils s'y sont conformés selon les normes les plus strictes », a dit M. Butts.

« Il revenait et revient toujours au procureur général de prendre cette décision. Ce sont toutefois les Canadiens qui devront vivre avec cette décision », a-t-il ajouté du même souffle.

Selon lui, le but des discussions qui ont eu lieu entre des proches collaborateurs du premier ministre et Mme Wilson-Raybould et son bureau visaient à s'assurer que la meilleure décision soit prise, d'où l'invitation à solliciter un avis juridique externe.

« Nous estimions qu'un avis externe était approprié en raison des conséquences extraordinaires d'une condamnation. Le fait que l'entreprise en cause emploie un si grand nombre de personnes dans l'ensemble du pays a accru l'importance de cette question pour le public. Ce point de vue a été analysé par les avocats de la fonction publique. Cela constituait l'intégralité des conseils que nous avons donnés à la procureure générale et nous avons clairement indiqué qu'elle était libre de les suivre ou non », a-t-il soutenu.

D'autant plus qu'il appert que la décision de Mme Wilson-Raybould de ne pas infirmer la décision du 4 septembre de la directrice des poursuites pénales de ne pas conclure un accord de réparation a été prise en quelque 12 jours.

M. Butts a aussi déclaré que l'affaire SNC-Lavalin n'avait rien à voir avec la décision du premier ministre de remanier son cabinet et de confier de nouvelles fonctions ministérielles Jody Wilson-Raybould lors du remaniement du 14 janvier.

Ce remaniement a été provoqué par la décision du président du Conseil trésor, Scott Brison, de quitter la politique. D'ailleurs, M. Butts a indiqué qu'il a tenté par tous les moyens de convaincre M. Brison de revenir sur sa décision, Justin Trudeau ne voulant pas modifier son cabinet avant les prochaines élections.

M. Butts a donc offert ce qu'il considère une version « très différente » des événements de celle que Mme Wilson-Raybould a donnée au comité la semaine dernière.

L'ancienne ministre affirmait alors avoir fait l'objet de pressions incessantes et inappropriées pour qu'elle interrompe les poursuites pénales engagées contre SNC-Lavalin en lien avec des contrats en Libye. Un tel accord aurait obligé la société à payer des pénalités sévères tout en évitant une condamnation qui pourrait la paralyser financièrement.

M. Butts démissionné de ses fonctions le 18 février en affirmant que ni lui ni aucun autre membre du cabinet du premier ministre n'avait mal agi, mais a déclaré qu'il ne voulait pas être une distraction au travail du gouvernement.