Les chances de revoir un budget équilibré à Ottawa d'ici 2020 sont «nulles» et elles remontent à peine à 5% pour l'année suivante, selon une étude dévoilée hier par le Directeur parlementaire du budget (DPB).

Pis, le déficit des deux prochaines années sera plus élevé de 8 milliards par rapport à ce qu'annonçait Bill Morneau il y a deux mois à peine. Des révélations qui ont soulevé la colère à gauche comme à droite dans les rangs de l'opposition.

Moins de 5%

Dans son rapport publié hier, le directeur parlementaire Jean-Denis Fréchette estime à environ 5% les chances que le budget fédéral soit «équilibré ou excédentaire» en 2020-2021. Il prévoit en outre que le déficit atteindra 22,1 milliards l'an prochain, alors que le ministre des Finances Bill Morneau avait annoncé en février dernier un trou de 18,1 milliards.

Pour l'année suivante, le DPB s'attend à un manque à gagner de 21,4 milliards contre une prévision de 17,5 milliards de Bill Morneau. L'écart totalise presque 8 milliards sur deux ans.

Pourquoi?

Le bureau du DPB avance une série d'hypothèses pour expliquer ce trou de 8 milliards. Parmi celles-ci, il mentionne des frais d'intérêt plus élevés pour le service de la dette publique et le coût plus important que prévu de certaines nouvelles mesures, comme les prestations pour enfants.

La mise en oeuvre de la nouvelle taxe sur le carbone du gouvernement fédéral produira par ailleurs «un vent contraire à moyen terme pour l'économie canadienne», a confirmé hier le DPB, dont la mission est de fournir une analyse indépendante de différents aspects des finances publiques. Cette taxe pourrait retrancher 0,5% au produit intérieur brut (PIB) canadien en 2022, soit 10 milliards.

Promesse rompue

Plusieurs députés de l'opposition en ont profité pour accuser Justin Trudeau d'avoir rompu l'une de ses principales promesses électorales, soit de revenir à l'équilibre budgétaire au plus tard en 2019 et de limiter les déficits à 10 milliards.

«On nous avait dit qu'on allait faire un léger déficit pour investir dans les infrastructures et qu'on allait ensuite revenir à l'équilibre budgétaire, a dénoncé le député néo-démocrate Alexandre Boulerice. Là, les dépenses en infrastructures, on ne les voit pas, le déficit explose, et il n'y a aucun plan pour arriver à l'équilibre budgétaire. Ils ont dit n'importe quoi.»

40 milliards en intérêt

Le conservateur Pierre Poilievre s'est montré particulièrement virulent envers Bill Morneau pendant la période des questions. Il a souligné que les coûts du service de la dette augmenteront de deux tiers d'ici 2022, pour atteindre 40 milliards. «C'est presque autant que ce que le gouvernement du Canada dépense dans les soins de santé!»

Le ministre des Finances a défendu les politiques - et les déficits - de son gouvernement. «Nous voyons le plus haut taux de croissance depuis longtemps, et c'est parce que les Canadiens ont décidé en 2015 de voter contre les politiques défaillantes du gouvernement précédent et d'investir dans leur avenir», a-t-il lancé.

Fait à noter, le rapport du DPB prévoit un déficit inférieur de 1,7 milliard aux prévisions gouvernementales en 2023, soit 10,6 milliards.