(Ottawa) Les premiers ministres des provinces demandent formellement une rencontre au sommet avec Justin Trudeau afin de faire le point sur les investissements qui seront requis au cours des prochaines années pour financer les « infrastructures stratégiques » au pays.

Ce qu’il faut savoir

  • Le gouvernement fédéral doit annoncer un nouveau programme d’infrastructures cet automne ;
  • Les premiers ministres des provinces veulent une rencontre avec Justin Trudeau pour en établir les paramètres ;
  • La crise du logement serait aussi au menu de cette rencontre au sommet ;
  • Justin Trudeau n’est pas friand de ce genre de rencontre.

Le président du Conseil de la fédération, le premier ministre de la Nouvelle-Écosse Tim Houston, a envoyé une lettre à M. Trudeau à ce sujet jeudi, au nom de l’ensemble de ses homologues provinciaux, afin de plaider pour la tenue de cette rencontre le plus rapidement possible.

Dans sa lettre, M. Houston ajoute un élément qui pourrait faire pencher la balance en faveur des provinces : la crise du logement qui frappe toutes les régions du pays et qui a contribué à la chute de popularité du gouvernement Trudeau devrait être aussi à l’ordre du jour.

PHOTO JOHN WOODS, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le premier ministre de la Nouvelle-Écosse et président du Conseil de la fédération Tim Houston

Nous devons développer et améliorer nos infrastructures alors même que nous accueillons de nouveaux Canadiens, que nous devons répondre aux besoins en matière de logement et que nous saisissons les multiples possibilités qui s’offrent à nous.

Tim Houston, premier ministre de la Nouvelle-Écosse et président du Conseil de la fédération

Au cours des dernières années, M. Trudeau s’est montré réticent à rencontrer l’ensemble des dirigeants des provinces, craignant, comme la plupart de ses prédécesseurs, que ces rencontres ne deviennent des séances de critiques envers le gouvernement fédéral.

À titre d’exemple, les provinces ont réclamé pendant près de trois ans une rencontre avec M. Trudeau afin de discuter d’une hausse des transferts en santé. Le premier ministre a refusé d’acquiescer à cette demande au motif qu’il serait préférable de discuter de cette question une fois la pandémie de COVID-19 terminée.

Après quelques mois de pourparlers entre des ministres de son gouvernement et des provinces, M. Trudeau a convoqué ses homologues à une rencontre à Ottawa pour leur soumettre une offre finale d’une hausse moyenne des transferts d’environ 4,6 milliards de dollars par année au cours de la prochaine décennie. Les provinces réclamaient une hausse de 28 milliards par année.

Pour régler la crise du logement qui sévit au pays, le gouvernement Trudeau doit obtenir le concours des provinces et des municipalités. En insistant sur les investissements dans les infrastructures et le logement, les provinces pourraient forcer la main au premier ministre.

D’autant que le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, a fait de la crise du logement un enjeu national et qu’il tient le gouvernement Trudeau responsable de cette crise. Le Parti conservateur détient une avance de 7 à 10 points sur les libéraux de Justin Trudeau dans les intentions de vote, selon une série de sondages publiés au cours des trois derniers mois.

« Les provinces et les territoires sont les mieux placés pour comprendre les besoins particuliers qui existent sur les plans régional, municipal et local, et possèdent l’expertise nécessaire à la prise en charge des priorités des Canadiens en matière d’infrastructures, dans nos provinces et nos territoires respectifs », souligne M. Houston, qui prend le relais de la première ministre du Manitoba, Heather Stefansen, à la présidence du Conseil de la fédération pour la prochaine année.

Le bureau de M. Trudeau n’a pas réagi jeudi à cette demande des premiers ministres des provinces. De passage à Toronto, où elle a rencontré une famille pour discuter du dossier du logement, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, a dit souhaiter que l’on s’attaque à cette crise en adoptant l’attitude « Team Canada », comme cela a été fait lors des négociations visant à moderniser l’Accord de libre-échange nord-américain avec l’administration Trump.

« Je pense que c’est une très bonne chose que l’économie canadienne soit en croissance et que la population du Canada augmente. Mais il est vrai que l’offre de logements ne suit pas et notre gouvernement se concentre absolument sur la collaboration avec les provinces et les municipalités pour faire construire plus de maisons au Canada », a-t-elle commenté.

Les leaders provinciaux souhaitent que cette rencontre au sommet ait lieu avant qu’Ottawa annonce la nouvelle mouture de son programme d’infrastructures cet automne et que l’on tienne aussi compte de la hausse de l’inflation qui contribue à faire monter en flèche les coûts de construction.

« Les provinces et les territoires sont confrontés à une augmentation sans précédent des coûts des projets et des initiatives en la matière, en raison notamment des enjeux liés aux chaînes d’approvisionnement et à la hausse du prix des intrants. La solution ne réside pas dans l’idée d’étirer les fonds disponibles pour couvrir les coûts en diminuant l’ampleur des projets ou en les reportant », a plaidé M. Houston.