Inflation, hausse des taux d’intérêt et explosion des prix d’engrais : des agriculteurs québécois sont au bout du rouleau. Ils ont lancé un véritable cri du cœur, mercredi, au premier ministre Justin Trudeau sur les effets du contexte économique difficile.

Ce dernier était de passage au siège social de l’Union des producteurs agricoles (UPA) à Longueuil pour entendre leurs doléances. Il s’agissait de la toute première visite d’un premier ministre canadien au siège social du syndicat, qui représente les 42 000 agriculteurs de la province.

Dans une séance de discussion ouverte qui a rassemblé une centaine d’agriculteurs, il a répondu à leurs nombreuses questions durant environ une heure.

« En ce moment, la relève, elle panique. Ça ne va pas bien, mais vraiment pas bien », lui a lancé d’entrée de jeu Leïla Arbour, une jeune agricultrice de la Gaspésie.

« À partir du moment où tu n’as pas de qualité de vie, tu n’as pas de moyens financiers, tu n’as pas de vie sociale : c’est une relation toxique […] Nos aides financières, c’est des prêts. On est tous accotés. On est tous en train d’étouffer et on nous offre des prêts », a-t-elle déploré.

« Moi, je peux vous le dire, je fais une tournée des régions présentement et c’est des centaines de familles qui m’ont dit qu’elles voulaient arrêter : parce qu’elles ne se sentent pas soutenues », a pour sa part ajouté le président des Éleveurs de porcs du Québec, David Duval.

Une question familiale

Le producteur de bleuets Yves Laurencelle s’est ensuite avancé au micro pour raconter l’histoire tragique d’un jeune agriculteur de sa région qui a récemment tenté de mettre fin à ses jours.

« Le petit jeune, il s’est passé la corde, mais heureusement ses parents l’ont retrouvé [à temps]. J’ai peur que ce soit ce qui va arriver de plus en plus dans les mois à venir, parce qu’une ferme familiale, c’est une question de cœur, c’est viscéral. Faire faillite et perdre l’entreprise de tes grands-parents, de tes parents, moi si ça m’arrivait, je ne sais pas comment je réagirais parce que j’aurais l’impression de trahir ma famille. »

Il estime que les agriculteurs sur le point de remettre « les clés à la banque » ont besoin d’une aide financière d’urgence.

« Je comprends, ça ne doit pas être facile d’être le père de 32 millions de personnes, mais aujourd’hui, s’il y a un cri du cœur que je peux vous lancer au nom des producteurs c’est que ça nous prend de l’aide rapide », a-t-il dit à M. Trudeau.

Trudeau répond

À la fin de la rencontre, Justin Trudeau a indiqué aux agriculteurs qu’ils avaient étés « vus » et « entendus ». Sans s’engager sur des aides concrètes, il a affirmé qu’il allait étudier les demandes des producteurs.

« Pour moi, la grande priorité, c’est de m’assurer qu’on va vous aider [sans] alimenter une nouvelle crise inflationniste, mais vous permettre de tenir bon pour qu’on passe à travers de ces mois difficiles. Vous êtes producteurs agricoles : vous savez qu’il y a de bonnes années et de mauvaises années. On est en train de vivre une très mauvaise année, pas à cause de la météo, mais à cause du contexte économique. On va être là pour vous aider parce qu’on a besoin que vous soyez là », a-t-il répondu.