(Ottawa) Le député conservateur Michael Chong accuse le gouvernement Trudeau d’avoir « manqué de transparence » en octroyant en catimini un permis grâce auquel six turbines destinées à un gazoduc russe pourront faire des allers-retours entre le Canada et la Russie pendant deux ans.

Avec ses collègues du comité permanent des affaires étrangères et du développement international, il a exigé – et obtenu – la tenue d’une rencontre d’urgence afin d’obtenir un éclairage sur la décision du gouvernement libéral de faire entorse à son propre régime de sanctions contre la Russie.

« Initialement, on a voulu donner l’impression qu’il était question d’une seule turbine qui se trouve à Montréal en ce moment pour des réparations. Mais on a appris que la décision permet l’importation de turbines qui font actuellement partie de l’infrastructure de Gazprom pour être réparées, puis retournées, pendant les deux prochaines années », a-t-il dénoncé.

« Ce dont nous avons besoin de façon urgente, c’est d’obtenir des détails précis sur ce que le gouvernement a choisi de faire », a ajouté le député Chong. À son avis, la décision « aux effets pervers » vient de condamner l’Allemagne à « une dépendance de deux autres années au gaz naturel russe », et permet ainsi au régime de Vladimir Poutine de « continuer à financer sa machine de guerre ».

Le comité parlementaire se réunira vendredi matin.

Le premier point à l’ordre du jour devrait être un vote sur le souhait des membres de tenir des audiences sur l’enjeu des turbines. Si une majorité des élus du comité dit oui, ce à quoi Michael Chong s’attend, on pourrait ensuite commencer à discuter des témoins que l’on aimerait voir comparaître.

Lui-même voudrait entendre les explications du ministre des Ressources naturelles, Jonathan Wilkinson, qui a accordé le permis, mais également celle de la vice-première ministre Chrystia Freeland, l’une des critiques les plus féroces du Kremlin.

Avis de recherche de turbine

Le premier ministre Justin Trudeau a plaidé mercredi que la décision d’accorder la dérogation avait été « très difficile » à prendre, mais que le régime de sanctions était là « pour punir [Vladimir] Poutine et ses amis, et non pas pour punir nos alliés et les populations de l’Europe ».

Le même jour, la compagnie énergétique russe Gazprom a semé le doute dans un tweet en affirmant être dans l’impossibilité de confirmer qu’il récupérerait la fameuse turbine qui était en réparation dans les installations de Siemens, non loin de l’aéroport Montréal-Trudeau.

Où est la turbine ? « Aucun commentaire », a tranché une porte-parole de Siemens Energy, mercredi.

Au cabinet du ministre des Ressources naturelles Jonathan Wilkinson, qui a accordé le permis « révocable et d’une durée limitée », on a refusé de répondre à la question, jeudi. « Toute question sur les allées et venues des turbines ou l’endroit où elles se trouvent devraient être adressées à Siemens », a indiqué un porte-parole.

Le permis est valide pour deux ans, il est révocable « à tout moment », et il a été octroyé pour six turbines au total. L’entreprise énergétique allemande a la permission de les recevoir et les livrer à des fins d’entretien, en fonction du calendrier de maintenance des pièces.

Un rassemblement en opposition à l’octroi du permis aura lieu dimanche après-midi devant le parlement. La manifestation est organisée par le Congrès Canadien-Ukrainien, selon qui le contournement des sanctions est un « dangereux précédent » qui mènera à « l’affaiblissement du régime de sanctions » contre le Kremlin.