(Québec et Montréal) Insatisfaite de la nouvelle mouture du REM de l’Est, l’administration Plante appelle CDPQ Infra à refaire ses devoirs pour présenter un projet « exemplaire ». À Québec, le gouvernement Legault appuie le report de l’étude du BAPE, mais se dit convaincu que le projet va se réaliser malgré les turbulences.

La Presse révélait jeudi que l’échéancier du prolongement du réseau de train électrique est repoussé. L’étude et les audiences publiques du BAPE n’auront pas lieu ce printemps. C’est que la Caisse de dépôt et placement du Québec refuse d’aller plus loin sans une position claire de la Ville de Montréal au sujet de la nouvelle mouture de son projet de 10 milliards présentée la semaine dernière. Il ne pourra y avoir de mise en chantier à la mi-2023 ni de mise en service en 2029.

« C’est un report du BAPE qui est raisonnable, a affirmé à La Presse Chantal Rouleau, ministre déléguée aux Transports et responsable de la métropole. On se donne un peu de temps pour réaliser le meilleur projet possible, et je pense que c’est tout le monde qui le veut. »

La Ville de Montréal a toujours des « préoccupations » à l’égard de ce projet, et « on veut y répondre ». « Il faut s’assurer de la meilleure adhésion possible des partenaires », a-t-elle insisté.

Des discussions sont toujours en cours au sujet de la demande de la mairesse Valérie Plante de créer un comité mixte avec la Caisse, une « condition gagnante » pour que le projet reçoive son appui, selon elle. « On est en train de régler tout l’aspect gouvernance de ce grand projet. Je ne donnerai pas de nom à ce comité-là, on est en train de régler cette question-là », a dit la ministre. La députée de Pointe-aux-Trembles a assuré que, malgré les turbulences actuelles, « le REM de l’Est [allait] se réaliser ».

Encore des « devoirs à faire »

Au cabinet de la mairesse de Montréal Valérie Plante, on soutient que CDPQ Infra doit « prendre le temps de bien faire les choses » et a encore « des devoirs à faire pour que le REM se fasse de façon exemplaire ». « Tous les experts endossent les conditions exigées par la Ville de Montréal depuis le début pour que ce projet soit un succès à la hauteur des attentes de la population », a indiqué son attachée de presse Catherine Cadotte, en disant « prendre acte » du report du BAPE.

Elle rappelle que le récent rapport du comité-conseil, qui redoutait notamment une « fracture urbaine » si le projet demeurait inchangé, « a clairement exprimé les améliorations qui doivent être apportées au projet pour qu’il soit acceptable, notamment en ce qui a trait à la gouvernance et à l’intégration urbaine ». « On s’attend à ce que CDPQ Infra fasse ses devoirs et réponde aux demandes exprimées dans le rapport du comité d’experts. Notre administration tient à ce que le projet qui sera soumis à la population respecte les ambitions des Montréalais et des générations futures », persiste Mme Cadotte.

Chez CDPQ Infra, le directeur des communications, Jean-Vincent Lacroix, affirme que son groupe « accorde une grande importance à ce que tous les partenaires adhèrent à un alignement commun ». « Prendre le temps pour s’assurer d’un tel alignement avant de lancer le processus du BAPE est naturel et nécessaire », a-t-il rétorqué jeudi.

À l’hôtel de ville, l’opposition officielle n’a pas manqué d’écorcher l’administration Plante. « En raison de son manque de leadership, la mairesse est en train de faire mourir le plus grand projet de transport collectif à Montréal. Elle a eu plus d’un an pour préciser auprès des parties prenantes ce qu’elle considère comme une intégration exemplaire du REM de l’Est depuis son annonce en décembre 2020 », a fustigé le chef d’Ensemble Montréal, Aref Salem.

Des citoyens de l’est de Montréal ont quant à eux demandé à la mairesse Valérie Plante, jeudi, de refuser le projet du REM de l’Est, tout simplement. « Cessez de quémander une place à la table de négociation de CDPQ Infra. Rejetez le projet du REM de l’Est qui sera nocif pour la Ville de Montréal et le transport collectif », a indiqué le vice-président du Collectif en environnement Mercier-Est, Daniel Chartier, en parlant d’un projet « pharaonique et coûteux » qui est déjà rejeté « par la majorité des populations touchées ».

Les partis de l’opposition à Québec réagissent

Je pense que ça témoigne de la gestion, de la gouvernance de la CAQ : ne pas impliquer les personnes en amont, les gens ne se parlent pas, la Ville n’est pas impliquée dans les décisions exécutives et décisionnelles. Le résultat des courses, c’est ce que l’on voit aujourd’hui.

Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec

Ce projet-là est très discutable. La forme qui nous a été présentée ne répond pas aux besoins. Est-ce qu’on doit tirer la plogue ? On n’est pas loin de ça.

Manon Massé, co-porte-parole de Québec solidaire

François Legault doit prendre le leadership et s’assurer que le comité soit mis en place, que la Ville ait son mot à dire – l’ARTM aussi doit être incluse –, pour qu’on trouve le meilleur projet pour desservir les citoyens et non pas pour augmenter les revenus de la CDPQ.

Joël Arseneau, chef parlementaire du Parti québécois