Andrew Scheer défie Justin Trudeau de donner suite à sa menace de le poursuivre pour avoir affirmé que le premier ministre s'est ingéré dans les procédures judiciaires contre la firme d'ingénierie montréalaise SNC-Lavalin.

Le chef du Parti conservateur du Canada a dévoilé dimanche une lettre qui lui a été transmise le 31 mars dernier par l'avocat du premier ministre, Julian Porter, menaçant de le poursuivre pour diffamation.

M. Scheer y voit une « tactique d'intimidation » visant à faire taire les conservateurs qui réclament une enquête indépendante, de même qu'une « tentative flagrante » de l'empêcher de remplir son devoir de chef de l'opposition.

« Voilà ce que fait Justin Trudeau quand on lui tient tête. Il nous menace », a-t-il lancé en conférence de presse.

M. Scheer invite le premier ministre à aller de l'avant avec cette poursuite afin que l'affaire soit amenée devant les tribunaux - où, souligne-t-il, les libéraux ne pourront pas contrôler les procédures.

« Je serais ravi de pouvoir soumettre M. Trudeau à un interrogatoire préalable le plus tôt possible, a-t-il enchaîné. Je suis impatient que M. Trudeau présente sa preuve aux Canadiens sous serment, dans le cadre d'une audience publique. »

Mais M. Scheer semble croire que Justin Trudeau bluffe.

Dans un communiqué, le cabinet du premier ministre a déclaré que M. Scheer et son parti « ont tenu des propos faux et diffamatoires à répétition. Nous l'avons averti que faire des déclarations complètement fausses et diffamatoires comporte des conséquences ».

La menace de poursuite émane plus précisément des propos tenus par M. Scheer le 29 mars dernier. Il avait alors affirmé que les documents fournis par Mme Wilson-Raybould au comité de la justice - y compris l'enregistrement secret d'une conversation téléphonique avec le greffier du Conseil privé, Michael Wernick - constituent « une preuve concrète que Justin Trudeau a fait campagne pour interférer politiquement avec les poursuites criminelles contre SNC-Lavalin ».

L'avocat de M. Scheer, Peter Downard, estime que si le premier ministre renonce à intenter une poursuite, il reconnaîtra par le fait même que les propos de son adversaire conservateur étaient appropriés.

L'ex-procureure générale Jody Wilson-Raybould dit avoir fait l'objet de pressions indues de la part du cabinet du premier ministre pour qu'elle permette à SNC-Lavalin d'échapper à des poursuites criminelles en lien avec des pots-de-vin versés en Libye.

Elle croit avoir été écartée du ministère de la Justice et transférée à celui des Anciens Combattants en janvier dernier en raison de son refus d'obtempérer. Elle avait démissionné de son poste un mois plus tard.

Elle ne croit toutefois pas qu'un geste illégal ait été posé.

Mme Wilson-Raybould a finalement été expulsée du caucus libéral la semaine dernière, aux côtés de Jane Philpott. Cette dernière avait également remis sa démission à titre de ministre, disant avoir perdu confiance en son gouvernement en raison de cette saga.

Bien que les conservateurs aient bien accueilli tous les autres aspects du témoignage de Mme Wilson-Raybould, ils n'acceptent pas sa conclusion selon laquelle rien d'illégal ne s'est produit.

Andrew Scheer dit n'avoir eu aucune nouvelle de la Gendarmerie royale du Canada depuis qu'il demandé, le 28 février dernier, à ce qu'elle vérifie si la loi a été enfreinte.