(Ottawa) Les groupes juifs appellent à faire davantage pour lutter contre la haine après l’arrestation d’un jeune d’Ottawa dans le cadre d’un prétendu complot contre la communauté juive.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a confirmé que le jeune arrêté la semaine dernière pour terrorisme a été accusé de trois infractions supplémentaires après que la police a exécuté un mandat de perquisition, notamment de possession d’explosifs avec l’intention de mettre des vies en danger.

La police affirme avoir trouvé des matériaux utilisés pour créer des substances explosives. Une source proche du dossier a déclaré lundi que les informations judiciaires indiquaient que les explosifs étaient de l’acétone et un oxydant.

La PDG par intérim de la Fédération juive d’Ottawa, Sarah Beutel, a déclaré mardi dans un communiqué que les accusations constituent une évolution stupéfiante en raison d’un antisémitisme incontrôlé, et que les dirigeants des écoles et les gouvernements doivent lutter contre les discours de haine.

Elle a mentionné que son groupe « appelle les dirigeants des écoles, des campus universitaires, de tous les niveaux de gouvernement et d’autres institutions à prendre conscience qu’ils sont responsables de ce qui est dit et partagé ».

Le premier ministre Justin Trudeau a déclaré dans une entrevue accordée à Global News que l’arrestation était « un moment extrêmement important » démontrant ce que le gouvernement fait tout ce qu’il peut pour « assurer la sécurité de la communauté juive de ce pays ».

PHOTO ETHAN CAIRNS, LA PRESSE CANADIENNE

Le premier ministre Justin Trudeau

Dans l’entrevue diffusée mardi après-midi, M. Trudeau a qualifié de « terrifiante » la montée de l’antisémitisme au Canada liée à la guerre entre Israël et le Hamas, et a rappelé que c’était un problème sur lequel le gouvernement agissait.

Le ministre fédéral de la Sécurité publique a annoncé mardi un financement supplémentaire de 5 millions pour un programme temporaire visant à aider les communautés exposées au risque de crimes motivés par la haine, invoquant une montée de l’antisémitisme et de l’islamophobie.

L’argent devrait aider à sécuriser des sites tels que des bureaux et des garderies, notamment grâce à l’embauche d’agents de sécurité pour une durée limitée.

Hausse des attaques haineuses

Les dirigeants juifs et musulmans de partout au Canada ont signalé une augmentation des attaques motivées par la haine depuis que les militants du Hamas ont lancé une attaque en Israël le 7 octobre, provoquant une réponse militaire israélienne massive dans la bande de Gaza.

Le Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA) a affirmé mardi que le gouvernement libéral aurait déjà dû introduire une loi sur la haine en ligne, promise depuis longtemps.

Les libéraux ont promis de présenter le projet de loi dans les 100 jours suivant leur victoire électorale de 2021. Le ministre de la Justice, Arif Virani, a récemment dit qu’il espérait présenter le projet de loi l’année prochaine.

Le vice-président des affaires extérieures du CIJA, Richard Marceau, estime que si ce projet de loi avait été déposé, on aurait pu assister à une conversation différente sur le web et il a souligné que ce qui se retrouve en ligne n’y reste jamais.

Il a déclaré que les accusations de terrorisme portées à Ottawa ont été un choc, mais qu’elles n’étaient pas non plus surprenantes compte tenu de l’atmosphère actuelle.

« Nous l’avons dit aux gouvernements, aux forces de police et à tous ceux qui voulaient bien écouter, et nous assistons désormais à une forme d’antisémitisme potentiellement violente et très meurtrière et dangereuse », a-t-il dénoncé, soulignant des incidents tels que des cocktails Molotov lancés sur une synagogue et un centre communautaire à Montréal et une alerte à la bombe dans une école à Toronto.

« Les Juifs de tout le pays se sentent menacés. Ils se sentent assiégés. Ils s’inquiètent pour eux-mêmes et pour leurs enfants. »

Dans une note adressée mardi à ses partisans, le centre a exhorté les personnes victimes d’antisémitisme dans les écoles et les universités à se manifester et à porter plainte, affirmant qu’il fournirait un soutien juridique.

Michael Mostyn, PDG de B’nai Brith Canada, un groupe de défense des personnes juives, a souligné dans un communiqué que les accusations portées contre les jeunes d’Ottawa devraient être un signal d’alarme.

« Nous manquons à nos devoirs à l’égard de nos jeunes lorsque nous les laissons assister à des actes de haine publique contre la communauté juive dans tout le pays, semaine après semaine, par des radicaux nationaux », a-t-il dénoncé.

La GRC a répété dans un communiqué lundi soir qu’elle était préoccupée par « la tendance croissante à l’extrémisme violent » et « en particulier par l’augmentation de la participation des jeunes ».

Cinq jeunes Canadiens ont été arrêtés dans des affaires liées au terrorisme depuis juin.