(Kyiv) Le gouvernement canadien promet de garder un œil ouvert sur la situation chaotique en Russie où le patron du groupe armé paramilitaire Wagner, Evgueni Prigojine, avait lancé ses troupes contre Moscou avant de les faire rebrousser chemin.

Affaires mondiales Canada, qui avait déjà recommandé aux Canadiens d’éviter de se rendre en Russie après l’invasion de l’Ukraine, a fait savoir qu’il « avait un risque de nouveaux troubles civils dans tout le pays ».

« Des restrictions en matière de sécurité, y compris des limitations de mouvement, ont été mises en place dans certaines régions, y compris à Moscou », peut-on lire dans un avis de voyage publié samedi sur le site internet d’Affaires mondiales.

Cet avis a été publié avant l’annonce par Prigojine qu’il renonçait à son avance vers Moscou. Il a décidé de rebrousser chemin pour éviter, selon lui, un bain de sang.

Le premier ministre fédéral Justin Trudeau a annoncé une réunion du Groupe d’intervention en cas d’incident pour examiner la situation en Russie.

M. Trudeau a rencontré la vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, la ministre de la Défense nationale, Anita Anand, le président du Conseil privé du Roi pour le Canada et ministre de la Protection civile, Bill Blair, le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, et de hauts fonctionnaires.

Le Groupe d’intervention en cas d’incident a fait le point sur les dernières mises à jour en provenance de Russie, selon le cabinet de M. Trudeau. Plus précisément, les efforts de coordination en cours auprès de partenaires internationaux ont été abordés et les fonctionnaires évaluent les conséquences de la situation pour les Canadiens et les membres du personnel canadien.

« Le Groupe a convenu de continuer à surveiller la situation et à travailler en étroite collaboration avec alliés et partenaires », a indiqué dans une déclaration écrite Alison Murphy, attachée de presse du premier ministre.

M. Trudeau a affirmé sur Twitter que le Canada était en contact avec ses alliés. « Nous continuerons de suivre la situation de près », a-t-il déclaré.

Plus tôt, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, avait écrit sur Twitter que ses homologues des pays du G7 et elle « se sont réunis pour discuter des évènements survenus en Russie ». Elle n’a pas donné plus de précisions à ce sujet.

Le secrétariat d’État des États-Unis et le ministère des Affaires étrangères de l’Allemagne ont donné peu de précisions sur la discussion à laquelle le responsable de la politique étrangère de l’Union européenne a aussi participé.

Les États-Unis ont réaffirmé l’appui du pays à l’Ukraine. Le secrétariat d’État continue de se coordonner avec ses alliés.

Le président de la direction et directeur général du Congrès des Ukrainiens canadiens a rappelé que la Russie maintenait son effort de guerre malgré les tumultes en cours.

« C’est le moment pour le Canada et les alliés de fournir toutes les armes dont l’Ukraine a besoin pour battre la Russie, a déclaré Ihor Michalchyshyn. Il faut aux Ukrainiens ce dont ils ont besoin pour gagner et ils vont gagner. »

Union européenne et G7

Le chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell, après avoir noté dans un premier temps que l’évènement était « un problème interne à la Russie », tout en indiquant suivre la situation « attentivement », a rappelé dans un tweet que « notre soutien à l’Ukraine est inébranlable ».

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LLe chef de la diplomatie de l’Union européenne, Josep Borrell

Il a également indiqué avoir activé le « centre de réponse de crise » de l’UE pour coordonner les échanges entre les Vingt-Sept, en amont d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’UE prévue lundi au Luxembourg.

Et ajouté que les ministres des Affaires étrangères du G7 s’étaient également entretenus samedi, sans livrer aucun détail sur le contenu de ces échanges.

Le Kremlin a indiqué que le président Vladimir Poutine avait reçu samedi le « plein soutien » de son homologue turc Recep Tayyip Erdogan lors d’un entretien téléphonique.

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Le président turc Recep Tayyip Erdogan

Biélorussie

La rébellion de Wagner est un « cadeau » fait à l’Occident, a estimé le Conseil de sécurité nationale biélorusse.

« Toute provocation, tout conflit interne dans les rangs militaires ou politiques, dans le champ de l’information ou dans la société civile, c’est un cadeau fait à l’Occident [et] cela peut aboutir à une catastrophe ».

« Protéger les civils »

Le premier ministre britannique Rishi Sunak a appelé samedi, à la BBC, « toutes les parties à être responsables et à protéger les civils », ajoutant qu’il suivait la situation « de près ».

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Le premier ministre britannique, Rishi Sunak

« Dans les heures qui viennent, la loyauté des forces de sécurité russes, en particulier de la Garde nationale russe, sera essentielle pour l’issue de la crise. Cela représente le défi le plus important pour l’État russe ces derniers temps », a écrit de son côté le ministère de la Défense, dans un point quotidien sur Twitter.

De nombreux pays européens (France, Italie, Allemagne, Suède, Norvège, Danemark, Belgique) ont réagi à la situation en Russie, assurant, par la voix de leurs services gouvernementaux ou de ministres, par communiqués ou sur Twitter, « suivre la situation de très près » ou « très attentivement », ajoutant pour certains d’autres commentaires ou des conseils de prudence à l’égard de leurs ressortissants en Russie.

« Nous restons concentrés sur le soutien à l’Ukraine », a déclaré la présidence française.

« Ces évènements montrent comme l’agression contre l’Ukraine provoque également de l’instabilité dans le pays », a dit la première ministre italienne Giorgia Meloni, citée par ses services.

« Nous nous coordonnons avec nos alliés les plus proches », a annoncé la chancellerie allemande.

Le ministère des Affaires étrangères conseille aux voyageurs « d’éviter le centre-ville de Moscou jusqu’à nouvel ordre », ainsi que « les installations gouvernementales, en particulier militaires ».

La Norvège déconseille également tout voyage en Russie.

Le Danemark recommande à ses citoyens en Russie « de rester à l’intérieur, [de] patienter et [de s’] informer par l’intermédiaire de médias tels qu’Itar-Tass ».

La Bulgarie demande aussi à ses ressortissants « d’éviter de se rendre en Russie » en raison des tensions actuelles.  

« Danger nucléaire »

Le chancelier autrichien conservateur Karl Nehammer, l’un des rares chefs de gouvernement à être allé rencontrer Poutine à Moscou après le déclenchement de l’invasion russe de l’Ukraine, a insisté quant à lui sur le danger nucléaire.

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Le chancelier autrichien Karl Nehammer

« Les opérations de la Fédération de Russie sont toujours de la plus haute importance, car [elle] possède un grand potentiel d’armes biologiques, chimiques et nucléaires. En cela, la cohésion et l’unité de l’UE sont de la plus haute importance ».

L’Autriche conseille aussi à ses ressortissants en Russie d’éviter les territoires russes frontaliers de l’Ukraine, dont les régions de Rostov et Krasnodar, et appelle à la vigilance à Moscou et dans les grandes villes.

Ironie

Enfin la République tchèque, par la voix de deux de ses ministres, a réagi samedi avec une certaine ironie.

« Voilà, nous savons enfin ce que les Russes entendaient par une Opération spéciale. Après 16 mois de guerre en Ukraine, la Russie fait la guerre à la Russie », a déclaré la ministre de la Défense Jana Cernochova.

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La ministre tchèque de la Défense Jana Cernochova

« Ce n’est pas une surprise. C’est une tradition chez eux. Les guerres ratées finissent toujours par l’exécution du Tsar, suivie de chaos et d’une guerre civile supervisée par les espions des services secrets. Félicitations ! », a-t-elle ajouté.

Quant au ministre des Affaires étrangères Jan Lipavsky, il s’est contenté d’un laconique : « Je peux voir que mes vacances d’été en Crimée approchent ».

Agence France-Presse