Est-il raisonnable et réaliste d'interdire l'accès à internet à un jeune homme qui a envoyé par messagerie une photo de ses organes génitaux à une gamine de 11 ans qui fréquentait un camp de jour où il était moniteur ?

Steven Hoai Trung Lam a pris le chemin des cellules pour neuf mois, menottes aux poings, hier, après avoir plaidé coupable en mai dernier à des accusations de leurre informatique sur une enfant de moins de 16 ans.

Mais pour déterminer les conditions qu'il devra respecter à sa sortie de prison, la cour s'est interrogée sur le rôle essentiel d'internet.

« L'internet est partout de nos jours, dans les voitures, dans les cellulaires. Ce genre d'interdiction devient très complexe », a souligné l'avocat Dominic Côté, qui représentait l'accusé.

« Faire une demande d'emploi ou s'inscrire à l'école est presque impensable sans ordinateur », a reconnu la juge Sylvie Durand, qui devait déterminer la peine à imposer au jeune homme.

OBLIGÉ D'ABANDONNER SES ÉTUDES

Déjà, depuis le dépôt des accusations contre lui en avril 2017, Steven Hoai Trung Lam ne pouvait plus se servir d'internet, ce qui a entraîné plusieurs problèmes, a expliqué sa mère devant le tribunal.

Il terminait un diplôme collégial de trois ans en design graphique lorsqu'il a été arrêté et n'a pas pu terminer son stage de fin d'études à cause de cette contrainte.

« Au début, on pensait que c'était juste les médias sociaux qui étaient interdits, mais quelqu'un a appelé la police parce qu'il s'était servi d'internet à l'école », a raconté la mère de l'accusé, Vicky Tran. « Comme c'était trop compliqué, il a juste arrêté l'école. »

« Mais c'est compliqué aussi pour la recherche d'emploi, parce que tous les employeurs demandent [de poser sa candidature] en ligne. Même pour consulter sa paye, il faut aller en ligne », a-t-elle ajouté.

La capacité de faire des études et de trouver un emploi est pourtant essentielle au processus de réhabilitation, a fait valoir l'avocat de Steven Hoai Trung Lam.

La juge Durand a donc décidé d'imposer une interdiction d'accès à internet pour trois ans à l'homme de 21 ans, sauf à des fins d'emploi ou d'inscription dans un établissement scolaire, et sous supervision de sa mère.

Il devra aussi poursuivre sa thérapie pour traiter sa déviance sexuelle, donner un échantillon d'ADN et sera inscrit au registre des délinquants sexuels pendant 10 ans.

Steven Hoai Trung Lam, qui a travaillé trois ans comme animateur de camp de jour à Rivière-des-Prairies, a envoyé une photo de son pénis à la fillette de 11 ans au début de 2017. La victime était la fille du propriétaire du camp, un ami de la famille de M. Lam.

Quand l'affaire a été révélée aux parents, le jeune homme s'est excusé auprès de la petite fille et de sa famille et a entrepris une thérapie, avant même que des accusations ne soient déposées.

Mais, dans une lettre lue par l'avocat de la Couronne Jérôme Laflamme, le père a souligné que cette histoire avait été dévastatrice pour la famille et pour la fillette, qui a perdu le sourire et se sent dorénavant très mal à l'aise en présence de jeunes hommes.