(Montréal) Un enquêteur de la Sûreté du Québec a raconté jeudi au procès pour le meurtre de Guylaine Potvin, à Saguenay il y a près de 24 ans, comment lui et son partenaire avaient traqué le suspect jusqu’à une salle de cinéma, en 2022, puis discrètement récupéré son gobelet de boisson gazeuse jeté dans une poubelle après le film, afin d’obtenir son ADN.

Le sergent-détective Christian Royer a témoigné jeudi matin au procès de Marc-André Grenon, accusé de meurtre au premier degré et d’agression sexuelle grave. Les crimes avaient été commis en avril 2000 à Jonquière, aujourd’hui un arrondissement de Saguenay.

M. Royer a raconté jeudi aux jurés qu’il s’était rendu devant l’appartement de Grenon, à Granby, en août 2022, après que le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale du Québec l’a identifié comme un possible « sujet d’intérêt » dans la mort de la jeune étudiante Guylaine Potvin, 19 ans, retrouvée sans vie chez elle 22 ans plus tôt. Un pathologiste a conclu qu’elle avait été agressée sexuellement et étranglée à mort.

PHOTO SÛRETÉ DU QUÉBEC/LA PRESSE CANADIENNE

Guylaine Potvin

Alors qu’il lui avait été demandé de vérifier l’adresse de Grenon, M. Royer et son collègue l’ont vu monter sur le siège passager d’un véhicule conduit par une femme et ont décidé de le suivre.

« Comme le but était de récupérer de l’ADN, on s’est dit, qu’on allait les suivre pour voir où ils allaient », a-t-il affirmé lors du procès.

De là, M. Royer et son partenaire ont suivi Grenon et sa compagne jusqu’à un cinéma, où le policier a acheté un billet pour le même film, qui avait des places assignées.

Il s’est avéré que le dernier siège disponible dans la section où était assis Grenon était directement à la gauche de celui-ci. Pendant que son collègue était assis près des poubelles les plus proches, M. Royer a passé les deux heures du film à moins d’un mètre de Grenon, le regardant siroter son verre et vérifiant si quelqu’un d’autre touchait la tasse.

« Je n’ai pas besoin de vous le dire, je n’ai pas été très absorbé par le film », a-t-il déclaré devant le tribunal, provoquant des rires.

L’agent Royer a raconté que lui et son partenaire avaient suivi Grenon hors du cinéma, où ils l’avaient vu jeter son gobelet de boisson gazeuse à la poubelle. Le policier a déclaré qu’il l’avait repêché après avoir enfilé des gants, et qu’il avait envoyé pour un test ADN.

La Couronne a précédemment raconté que l’accusé était devenu une personne d’intérêt dans l’affaire en 2022 après qu’une base de données reliant l’ADN aux noms de famille masculins ait suggéré que l’échantillon prélevé sur les lieux du crime pourrait être lié au nom « Grenon ».

La Couronne a déjà plaidé que le matériel génétique sur le gobelet et les pailles correspondait à l’ADN retrouvé sur les lieux du crime 22 ans plus tôt, ce qui a conduit à l’arrestation de Grenon en 2022 à Granby.

Les avocats de la Couronne ont affirmé que Grenon avait été arrêté après que l’ADN recueilli dans la tasse et les pailles au cinéma correspondait à l’ADN masculin non identifié recueilli sur la scène du crime commis il y a plus de 20 ans.

Un deuxième policier, Pierre-Antoine Côté, a décrit avoir arrêté Grenon à Granby le 2 octobre. Le suspect a ensuite été emmené à Montréal, où un mandat avait été émis pour une prise d’empreintes digitales, un test d’empreintes dentaires et un nouveau test ADN, a témoigné M. Côté, en précisant que Grenon était coopératif.

Plus tôt jeudi, le jury a appris que Grenon avait été décrit en 2001 comme une « personne d’intérêt » dans le crime parce qu’il avait auparavant vécu dans un immeuble derrière la résidence où vivait Mme Potvin.

Grenon, âgé de 49 ans, a plaidé non coupable. En contre-interrogatoire, l’agent Royer a déclaré à la défense qu’il n’avait pas pris de photos du suspect tenant le verre ou assis dans le cinéma. Il a également reconnu que le sac de preuves avait été étiqueté à tort comme contenant une paille et non deux.

Le procès doit reprendre lundi.