(Ottawa) Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé jeudi la nomination d’une juge francophone de l’Alberta, Mary Moreau, à la Cour suprême du Canada.

La juge Moreau remplacera au plus haut tribunal du pays le juge Russell Brown, qui a démissionné en juin après avoir fait l’objet d’allégations d’inconduite.

En arrêtant son choix sur la juge Mary Moreau, Justin Trudeau écrit une page d’histoire. Pour la première fois depuis la création de la Cour suprême du Canada, les femmes y seront majoritaires. La Cour suprême du Canada compte neuf juges en tout. La nomination de la juge Moreau portera à cinq le nombre de femmes qui y siègent.

Les huit juges actuels sont le juge en chef Richard Wagner, la juge Andromache Karakatsanis, la juge Suzanne Côté, la juge Sheila Martin, la juge Michelle O’Bonsawin, ainsi que les juges Malcolm Rowe, Nicholas Kasirer et Mahmud Jamal.

« Je suis convaincu que son impressionnante carrière dans le milieu juridique et son attachement envers l’équité et l’excellence font de la juge en chef Moreau un choix inestimable pour le plus haut tribunal de notre pays », a affirmé le premier ministre dans une déclaration publiée par son bureau.

Depuis 2017, Mary Moreau est juge en chef de la Cour du Banc du Roi de l’Alberta. Elle est d’ailleurs la première francophone et la première femme à occuper ces fonctions. Auparavant, elle a siégé à la Cour suprême du Yukon et à celle des Territoires du Nord-Ouest.

Avant d’accéder à la magistrature, Mary Moreau a exercé le droit criminel, le droit constitutionnel et le droit civil à Edmonton, en Alberta. Tout au long de sa carrière, elle a pris fait et cause pour les droits des francophones. Elle a d’ailleurs plaidé devant la Cour suprême du Canada dans l’affaire Mahé. Dans ce dossier, le plus haut tribunal du Canada avait reconnu à l’unanimité en 1990 le droit des francophones en milieu minoritaire de gérer leurs établissements scolaires.

Durant sa carrière comme avocate, elle a participé à la fondation en 1990 de l’Association des juristes d’expression française de l’Alberta, une organisation qui a pour but d’améliorer l’accès aux services juridiques en français dans cette province de l’Ouest.

Avant d’entrer en fonction, la nouvelle juge sera appelée à témoigner devant le comité de la justice de la Chambre des communes le 2 novembre pour répondre aux questions des députés. Au cours de cette audience, le ministre de la Justice, Arif Virani, et le président du Comité consultatif indépendant sur les nominations des juges à la Cour suprême du Canada, Wade MacLauchlan, vont aussi prendre la parole.

La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Liane Roy, a salué cette nomination.

« Le premier ministre a fait un excellent choix et pour les communautés francophones et acadiennes, c’est une avancée formidable. Franco-Albertaine, la juge Moreau possède une connaissance non seulement des réalités de la francophonie, mais aussi des droits linguistiques », a dit Mme Roy.

L’Association du Barreau canadien (ABC) a également exprimé sa satisfaction.

« Pour la première fois en 148 ans d’histoire et 41 ans après que l’honorable Bertha Wilson a été la première femme nommée à la Cour suprême du Canada, une majorité de femmes siégera au plus haut tribunal de notre système judiciaire. Cette nomination représente une avancée importante pour faire progresser l’égalité des sexes. L’ABC est convaincue que la juge Moreau sera un atout précieux pour la Cour suprême du Canada, et nous avons hâte de travailler avec elle », a indiqué le président de l’ABC, John Stefaniuk.

L’ancien juge Russell Brown a démissionné du plus haut tribunal du pays en juin. Il faisait alors l’objet d’une enquête du Conseil de la magistrature concernant des allégations d’inconduite liées à un évènement mondain à la fin du mois de janvier aux États-Unis.

M. Brown a vigoureusement nié les allégations selon lesquelles il était en état d’ébriété et il aurait harcelé un groupe d’amis après avoir participé à un évènement dans un hôtel de Scottsdale, en Arizona. Le Conseil canadien de la magistrature a mis fin à son examen lorsque M. Brown a démissionné, affirmant qu’il n’avait plus habilité à enquêter sur cette affaire.

M. Brown avait été nommé à la Cour suprême en 2015 par le premier ministre conservateur Stephen Harper.

Avec La Presse Canadienne