(Ottawa) Le directeur général des Services de protection et d’urgence d’Ottawa s’est éloigné à plusieurs reprises de la barre des témoins, est passé devant des rangées de spectateurs et s’est rendu dans le couloir du palais de justice, alors que son témoignage dans le procès de deux organisateurs du « convoi de la liberté » a été interrompu à plusieurs reprises, mardi.

Kim Ayotte, qui supervise les règlements municipaux, les services ambulanciers et d’incendie ainsi que les évènements spéciaux, notamment lors des manifestations de l’année dernière, a été appelé comme témoin pour partager son point de vue sur le déroulement de la manifestation au cours des trois semaines.

Les retards dans son témoignage ont toutefois conduit une avocate de la défense à avertir le tribunal qu’elle devra envisager de demander le classement sans suite de l’affaire, si le procès continue à être en proie à des retards.

Chris Barber et Tamara Lich ont été arrêtés l’année dernière, le 17 février, dans les derniers jours des manifestations qui ont envahi les rues d’Ottawa pour s’opposer aux mesures de santé publique liées à la COVID-19.

Ils ont été co-accusés de méfaits et d’avoir conseillé à des personnes de commettre des méfaits et d’autres infractions.

Le procès a débuté le 5 septembre et devait durer 16 jours. Il a toutefois progressé lentement, et le tribunal n’a jusqu’à présent terminé que les dépositions de trois témoins.

Le calendrier initial semble désormais pratiquement impossible, car le juge prévoit d’autres dates de procès en octobre et en novembre.

L’avocate de M. Barber, Diane Magas, affirme que si les retards persistent, elle devra envisager de déposer une demande pour l’arrêt Jordan, qui stipule que toute personne accusée d’un crime a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable.

« Nous avons l’obligation, s’il y a un problème, de le soulever le plus tôt possible afin que la Couronne puisse répondre de manière appropriée », a déclaré Me Magas, en dehors du tribunal.

Le délai pour évaluer si la durée d’un procès est raisonnable est généralement de 18 mois après l’arrestation, mais dans le cas de Mme Lich et M. Barber, une partie du retard est attribuable à la défense.

Cela fait du délai une « cible mouvante » dans cette affaire, a indiqué Me Magas, car on ne sait toujours pas exactement quand le procès se terminera réellement.

Témoignage interrompu

Le témoignage de M. Ayotte a été interrompu à maintes reprises, car il semblait incapable de répondre à des questions spécifiques sur ses observations et ses actions pendant le convoi sans faire référence aux textos, aux messages WhatsApp, aux courriels et aux discussions Teams avec son personnel.

Aucune de ces communications n’a été obtenue par la Couronne ni divulguée à la défense.

M. Ayotte est arrivé au tribunal sans les notes qu’il avait prises tout au long de la manifestation du « convoi » et a déclaré au tribunal qu’il ne pensait pas qu’il en aurait besoin pour se rafraîchir la mémoire lors de son témoignage.

S’il a pu partager un récit général de ses actions et rappeler les dates de certaines réunions, des questions plus détaillées sur des dates et heures spécifiques sont restées sans réponse.

Il a déclaré au tribunal qu’il avait fait environ trois promenades dans la zone de manifestation, mais qu’il ne se souvenait pas des dates.

Il a témoigné sous serment devant une enquête fédérale sur l’utilisation par le gouvernement de la Loi sur les mesures d’urgence, l’année dernière, affirmant qu’il n’avait fait qu’une seule promenade. L’avocat de Mme Lich, Lawrence Greenspon, a évoqué que rien concernant les promenades supplémentaires n’avait été divulgué à la défense.

« Il s’agit d’un autre témoin pour lequel l’élargissement de ses preuves ne s’accompagne pas d’une divulgation appropriée », a déclaré Me Greenspon.

Le tribunal s’est retiré quelques minutes en début d’après-midi, mardi, afin que la Couronne puisse examiner ses options à la lumière des commentaires de Me Magas.

Les avocats ont toutefois pu mettre de côté une question pour l’instant : la recevabilité des publications et des vidéos de la page Facebook « Freedom Convoi 2022 ».

La Couronne dit qu’elle envisage d’utiliser ces messages pour faire valoir que M. Barber et Mme Lich ont collaboré si étroitement pendant la manifestation que les preuves contre l’un d’eux devraient s’appliquer aux deux.

La défense avait prévu de s’opposer à l’inclusion du contenu de la page Facebook, affirmant que les messages qui n’avaient pas été rédigés directement par Mme Lich ou M. Barber eux-mêmes n’étaient pas pertinents.

Les avocats de Mme Lich et M. Barber ont maintenant accepté d’admettre les publications comme éléments de preuve, mais ils ont déclaré qu’ils présenteraient leurs arguments sur la question de demande de complot publication par publication, à la fin du procès.

M. Ayotte a été invité à retourner au palais de justice mercredi pour poursuivre son témoignage.