C’est la fin d’un feuilleton judiciaire : Tony Accurso devra purger sa peine de quatre ans de pénitencier, 10 ans après son arrestation. La Cour suprême a refusé jeudi d’entendre l’ultime appel de l’entrepreneur corrompu qui était au cœur du plus grand scandale de corruption de l’histoire récente au Québec.

Comme c’est toujours le cas, la Cour suprême du Canada n’a pas indiqué les motifs justifiant le refus d’entendre l’appel. Ce refus n’est pas étonnant, sachant que la juge en chef de la Cour d’appel avait critiqué l’approche du camp Accurso, l’an dernier.

En liberté sous conditions depuis des années, Tony Accurso – de son vrai nom Antonio Accurso – doit se livrer « immédiatement » aux autorités carcérales. Le jury l’avait reconnu coupable en 2018 de nombreux crimes, dont corruption, fraude et complot, au terme de son second procès. Il avait été condamné à quatre ans de pénitencier.

C’est le point d’orgue d’une chute monumentale pour ce magnat des affaires, jadis à la tête d’un véritable empire québécois de la construction. Or, Tony Accurso a tout perdu en participant activement à un système de collusion et de corruption à la Ville de Laval. Les nombreuses entreprises complices obtenaient des contrats publics en échange de financement politique et de pots-de-vin aux élus et fonctionnaires municipaux.

De 1996 à 2010, les entreprises de Tony Accurso ont ainsi empoché des millions de dollars grâce à ce système criminel instauré par l’ex-maire de Laval Gilles Vaillancourt. Tony Accurso a personnellement déjà donné 200 000 $ en mains propres à un collecteur de pots-de-vin du maire corrompu.

L’entrepreneur déchu espérait la tenue d’un troisième procès en raison des circonstances très particulières de l’avortement de son premier procès. Ce dernier s’était terminé abruptement après les plaidoiries de la défense, lorsqu’une jurée a révélé avoir reçu de l’information de son oncle sur des valises pleines d’argent dans les bureaux d’un témoin de la Couronne.

L’Unité permanente anticorruption (UPAC) a alors lancé une enquête exceptionnelle pour déterminer si quelqu’un avait tenté de contaminer les jurés pour entraver la justice. Pour ce faire, les policiers ont interrogé les trois jurées mises au courant de l’histoire de l’oncle, puis ont conclu en janvier 2018 qu’aucun crime n’avait été commis. Ils en avaient toutefois appris par la bande sur l’opinion des jurées sur le procès.

L’an dernier, la Cour d’appel a sévèrement blâmé l’UPAC et la Couronne, notamment pour ne pas avoir informé la défense de l’existence de cette enquête. Ainsi, les policiers ont fait preuve d’une « imprudence inouïe » en obtenant des informations concernant le secret des délibérations, selon la Cour d’appel.

Cependant, ces incartades n’étaient pas suffisantes pour justifier un nouveau procès. En effet, rien n’indique que les policiers ou les procureurs ont eu accès à des éléments permettant de réévaluer leur stratégie au second procès. Il n’y a donc pas eu atteinte à l’intégrité du système judiciaire ou au droit de l’accusé à un procès équitable, selon la Cour d’appel.