De la Colombie-Britannique au boulevard Saint-Laurent, Amélie* devait passer jusqu’à 10 « clients » par jour. Sa proxénète, Stéphanie Pommier, faisait des affaires d’or. Mais l’accusée a causé sa propre perte en envoyant des photos nues de la victime à la mère de celle-ci, poussant Amélie à porter plainte.

Stéphanie Pommier a plaidé coupable lundi à de nombreux chefs d’accusation au palais de justice de Montréal : proxénétisme, avantage matériel provenant de l’offre de services sexuels, publicité de services sexuels, extorsion et diffusion d’images intimes. La femme de 30 ans de Pointe-Fortune, en Montérégie, a fait deux victimes dans cette affaire entre 2017 et 2018.

Béatrice* contacte Stéphanie Pommier sur les réseaux sociaux en 2017 pour lui demander de l’aide : elle veut apprendre à se prostituer de façon indépendante. Stéphanie Pommier s’occupe de placer les annonces et prend les rendez-vous. La proxénète garde de 20 à 30 % des gains de Béatrice qui travaille à Toronto et en Colombie-Britannique.

À Toronto, Béatrice propose à Amélie de travailler pour Stéphanie Pommier. Amélie est alors sous l’emprise d’un proxénète. Ses conditions sont difficiles : elle est enfermée et n’a même pas de bottes. Stéphanie Pommier lui dit qu’elle sera bien traitée et qu’elle fera beaucoup d’argent.

Au départ, Amélie doit conserver la moitié des gains, mais très vite, Stéphanie Pommier garde tous les gains de la victime, entre autres pour lui payer une opération (ce qu’elle fera). Quand Amélie revient de Toronto, la proxénète la place dans un appartement du boulevard Saint-Laurent et lui dirige jusqu’à 10 « clients » par jour.

Stéphanie Pommier s’occupe de tout : placer les annonces, communiquer avec les « clients » et prendre les rendez-vous. Elles se rendent en Colombie-Britannique, puis reviennent à Montréal, où Amélie travaille pendant trois autres semaines. Elle gagne entre 250 $ et 1000 $ par jour, mais conserve à peine 20 à 25 $ pour manger.

Elle menace de faire « massacrer » les victimes

En janvier 2018, Amélie et Béatrice se rendent dans un hôtel fréquenté par Stéphanie Pommier, vraisemblablement sans lui en parler. La proxénète est furieuse que les deux victimes sollicitent l’un de ses clients. Elle leur réclame de l’argent et les menace de leur envoyer « des gars pour aller les massacrer ».

Stéphanie Pommier menace aussi Amélie d’envoyer à ses parents des photos d’elle nue si elle refuse de se soumettre à ses demandes. La proxénète va passer à l’acte, menant Amélie à porter plainte à la police. Stéphanie Pommier a été accusée en octobre 2019.

Malgré la gravité des crimes, les avocats ont déjà annoncé lundi leur intention de suggérer une peine d’emprisonnement à domicile à la prochaine audience.

« C’est une peine qui peut paraître clémente », a convenu MIsabelle Teolis, avocate de l’accusée. Toutefois, un rapport criminologique produit par la défense permet de comprendre les circonstances du passage à l’acte, selon MTeolis.

D’ailleurs, le processus judiciaire a mené à une « prise de conscience et à une introspection » de la part de Stéphanie Pommier, a fait valoir son avocate.

Le procureur de la Couronne, MAlexandre Gautier, a souligné que l’accusée avait respecté à la lettre ses strictes conditions de remise en liberté depuis sa mise en accusation en 2019.

Les observations sur la peine auront lieu en septembre.

*Noms fictifs