« J’ai toujours eu peur de Claude. Il me terrifiait », souffle Johanne*. Agressée à répétition pendant son enfance, une femme a livré un témoignage bouleversant devant le tribunal. Son bourreau, Claude Thibodeau, a été condamné à huit ans de pénitencier pour avoir agressé sexuellement cinq fillettes pendant trois décennies.

« Plusieurs victimes utilisent la phrase : il m’a volé mon enfance. Moi, il m’a volé bien plus que mon enfance. Claude Thibodeau m’a volé mon insouciance, ma naïveté, mon amour propre, ma confiance en moi, mon respect de moi-même, mon estime, ma dignité », a confié Johanne, maintenant dans la quarantaine.

L’homme de 62 ans a reconnu sa culpabilité à une dizaine de chefs d’accusation vendredi au palais de justice de Montréal, mettant fin à un éprouvant processus judiciaire de quatre ans pour les victimes. Le juge Thierry Nadon a ensuite entériné la suggestion commune de huit ans de détention.

Claude Thibodeau a fait cinq victimes entre 1984 et 2015, des filles âgées de 6 à 14 ans. Si la plupart des fillettes faisaient partie de son entourage, l’une d’entre elles a eu le malheur de cogner à sa porte pour vendre du chocolat, alors qu’il résidait à Saint-Jean-sur-Richelieu.

Une autre victime était encore à l’école primaire lorsqu’elle faisait des fellations à Claude Thibodeau. C’est ensuite pour lui « faire du bien » qu’il a proposé à l’enfant une relation sexuelle avec pénétration. Quand elle s’est plainte de douleurs, l’agresseur l’a rassurée que ça ferait « moins mal » la prochaine fois.

« Claude aimerait ça vous voir nue », a lancé Claude Thibodeau à deux autres victimes. Le pédophile aimait particulièrement regarder des films pornographiques avec les enfants. À une occasion, il a demandé à sa victime si elle voulait faire comme la fillette dans le film. Il lui disait souvent que c’était leur « secret ».

« J’avais peur qu’il me tue »

« J’ai l’impression qu’on a volé une partie de mon innocence », a confié à la cour une autre victime. Elle avait à peine 7 ans lors de la première agression. Depuis, la jeune femme vit dans une peur « omniprésente » de recroiser son bourreau, au point de ne jamais répondre à la porte.

Johanne*, elle, avait si peur de Claude Thibodeau quand elle l’a dénoncé à la police qu’elle se barricadait dans sa maison. « J’avais peur qu’il me tue. Je dormais avec un marteau sous mon oreiller », a-t-elle confié. Anxiété généralisée, trouble de stress post-traumatique : Johanne est marquée au fer rouge par les agressions subies à l’enfance.

Étant la première victime de Claude Thibodeau, dans les années 1980, elle vit depuis des années avec la « honte » de ne pas l’avoir dénoncé plus tôt. « Si j’avais parlé il y a 30 ans, ces jeunes filles auraient peut-être échappé aux agressions sexuelles », regrette-t-elle.

Néanmoins, Johanne a été libérée par sa dénonciation. Elle décrit comme le « cadeau d’une vie » l’appel d’une sergente-détective pour savoir si elle était victime de Claude Thibodeau.

« Enfin ! Ça faisait 30 ans que je rêvais à ce jour. Merci à tous ceux qui travaillent dans le système judiciaire. Merci de nous permettre d’être enfin entendues. »

*Prénom fictif