Des proches de la fillette livrent des témoignages poignants lors de l’audience sur la peine à imposer à la mère

« Maélie, ma princesse, je t’aime pour la vie », sanglote Steve Augusto-Nogueira. Ce cri du cœur, c’est celui d’un père qui s’est fait arracher sa fille de 6 ans de la plus horrible des façons : poignardée à 80 reprises par sa propre mère. Pour son « geste irréparable », Stéphanie Brossoit a été condamnée jeudi à 10 ans de prison.

« La description du décès de Maélie est à glacer le sang. Il n’y a pas de mot suffisamment fort pour décrire le caractère atroce de ce que la petite fille a subi la nuit du 23 juillet. Le décès d’une enfant fragile, innocente, qui débute sa vie, c’est bouleversant et même choquant. C’est un drame d’une tristesse inouïe », a affirmé le juge Yvan Poulin, en entérinant la suggestion commune des parties.

Le père, la grande sœur et la grand-mère de Maélie Brossoit-Nogueira ont livré des témoignages crève-cœur jeudi lors de l’audience sur la peine à imposer à Stéphanie Brossoit. La femme de 39 ans a plaidé coupable à une accusation réduite d’homicide involontaire au début du mois, alors que son procès pour meurtre devait s’amorcer.

En psychose après avoir ingéré un cocktail de drogues et de médicament, Stéphanie Brossoit a poignardé sa fille en utilisant deux couteaux, le 23 juillet 2020. Quatre-vingts coups donnés dans plusieurs pièces d’un logement de l’est de Montréal. Pendant l’agression, la fillette s’est réfugiée dans la salle de bains, mais sa mère a défoncé la porte pour continuer à la poignarder.

« Maman, tu veux pas que je meure ? », a supplié Maélie pendant l’agression. « Ben non, bébé », a alors répondu sa mère, selon son récit.

PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE DE LA VICTIME

La victime et sa mère, Stéphanie Brossoit

Steve Augusto-Nogueira a décrit sa « petite Maélie » comme une fillette toujours souriante qui avait la vie devant elle. « Malheureusement, ce n’est pas un cauchemar. J’aurais tant voulu t’empêcher de partir. Je n’ai pas de mots pour exprimer comment ton absence est douloureuse, comment j’aurais aimé pouvoir te serrer dans mes bras, te dire que tout ira bien », a soufflé l’homme, la voix brisée.

La grande sœur de Maélie souffre encore de profondes séquelles trois ans plus tard. « J’ai eu extrêmement mal et j’en souffre encore beaucoup. Non seulement j’ai perdu une sœur, mais j’ai également perdu une mère. […] Elle n’est plus une mère à mes yeux », a confié la jeune femme.

« J’essaie de trouver une paix intérieure, de me donner une deuxième chance, de vivre la vie que je mérite. Mais c’est extrêmement dur. […] Ma petite sœur n’aura jamais cette chance, celle de grandir et de devenir la femme qu’elle aurait eu envie d’être. […] Il me manquera toujours une partie de moi », a-t-elle ajouté.

« Un cauchemar sans fin »

Prise de sanglots, Stéphanie Brossoit a lu une lettre bouleversante pendant l’audience. « Tout ça, ça n’a juste aucun sens ! Je suis tellement désolée ! À quel point je suis désolée ! », a-t-elle hoqueté. « Cette personne, ce n’était pas moi ! »

Depuis qu’elle a « commis l’irréparable », la mère de Maélie dit vivre « le pire cauchemar imaginable ». Son « cadeau du ciel », son « rayon de soleil », sa fille dont elle était « tellement fière », elle l’a tuée. « Je n’étais jamais rassasiée de toi, mon bébé d’amour », a sangloté Stéphanie Brossoit.

Tu n’es plus là, tu es au paradis, moi, je suis prise dans ce cauchemar sans fin. Continue de briller dans le ciel, ma Maélie.

Stéphanie Brossoit

Selon les psychiatres, Stéphanie Brossoit était dans « un état d’intoxication altérant et perturbant sa perception de la réalité ». Elle avait consommé du speed, un gâteau entier de cannabis, du GHB et un médicament.

Selon les faits admis, elle s’est réveillée dans une « autre dimension » et entendait des voix. « J’avais l’impression que quelqu’un me parlait. […] Je lui faisais mal avec le couteau. Je ne sais pas pourquoi j’ai fait ça », a-t-elle déclaré, quelques heures après les faits.

« On parle d’une psychose toxique, on ne parle pas d’un évènement qui est volontaire », a affirmé son avocate, MElfriede Duclervil, qui a souligné que cette violence était imprévisible.

Stéphanie Brossoit a expliqué être tombée dans la drogue alors qu’elle était dans un centre d’hébergement pour femmes violentées. Battue par son conjoint de l’époque, elle s’est « souvent » retrouvée à l’hôpital avec des blessures.

Les parties ont présenté une suggestion commune de 10 ans, en soulignant la consommation « excessivement négligente » de l’accusée. Comme facteurs atténuants, la poursuite a relevé ses remords sincères et son amorce de réhabilitation. « Cette violence extrême mérite d’être dénoncée fortement », a plaidé le procureur Simon Lapierre.

Cette peine de 10 ans peut paraître « clémente à première vue », a convenu le juge Poulin. Cependant, il s’agit d’une peine « raisonnable » dans les circonstances. « Aucune peine ne peut ramener Maélie », a-t-il rappelé, en soulignant le « courage » et la « force » de ses proches.

Il reste six ans à la peine de Stéphanie Brossoit en tenant compte du temps qu’elle a passé en détention préventive.