Une association vouée à la promotion de l’amitié entre le Canada et la Chine a promis, mardi, de se battre pour la libération de l’employé d’Hydro-Québec accusé d’espionnage, comme elle s’était battue pour la libération de Meng Wanzhou, la directrice financière du géant chinois Huawei détenue à Vancouver jusqu’en 2021.

« Ce genre de chose affecte vraiment la relation entre les deux pays », a déploré Tina Zhu, représentante de l’Association de promotion de l’amitié Canada-Chine.

Mme Zhu était présente au palais de justice de Longueuil pour la comparution de Yuesheng Wang, ce chercheur au service d’Hydro-Québec arrêté lundi par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et accusé d’espionnage économique au profit de la République populaire de Chine.

« Monsieur travaille pour Hydro-Québec depuis des années. Je viens de parler à sa blonde, elle m’a dit : “Il est retourné en Chine et à son retour, ces choses se sont produites.” Nous sommes inquiets, ce n’est pas normal », a déclaré Mme Zhu, qui travaille comme courtière immobilière dans la grande région de Montréal.

PHOTO TIRÉE DE LINKEDIN

Yuesheng Wang

Émotive, les larmes aux yeux, la dame a juré n’avoir aucun lien formel avec le gouvernement chinois, mis à part le fait qu’elle invite parfois des diplomates lors des activités de son association. « Nous sommes un organisme à but non lucratif, des gens ordinaires », a-t-elle martelé.

Elle déplore que les médias « exagèrent » lorsqu’il est question de la Chine. Par exemple, les témoignages sur la présence de postes de police chinois clandestins sur le sol canadien, qui sont présentés « comme de l’ingérence au Canada », alors qu’il s’agit d’un simple service offert aux ressortissants chinois à l'étranger, selon elle.

« Nous avons déjà vu tellement d’incidents montés en épingle, comme pour Mme Meng. Mon association s’est battue pour elle », dit-elle, en promettant de faire la même chose pour M. Wang.

La représentante de l’association affirme que ce qui est présenté comme la lutte contre l’ingérence étrangère par les autorités canadiennes attise « la discrimination » envers les citoyens d’origine chinoise.

« Je crois que notre gouvernement est dirigé par les Américains dans une mauvaise direction. C’est mon opinion », a-t-elle déclaré.

L’accusé demeure détenu

Lors de la comparution, la Couronne, représentée par MMarc Cigana et MClaudine Dib, s’est opposée à la remise en liberté de Yuesheng Wang, sous prétexte qu’il risque de fuir la justice.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Le procureur de la Couronne Marc Cigana (à droite) et l’avocat de la défense Gary Martin (à gauche) se sont exprimés devant les journalistes.

Une enquête sur remise en liberté sera tenue ultérieurement. Comparaissant par visioconférence à partir du quartier général de la GRC à Westmount, M. Wang s’agitait énergiquement en faisant non de la tête lorsque les accusations ont été lues par un interprète anglais-mandarin et lorsque la Couronne a évoqué un risque de fuite.

Son avocat, MGary Martin, lui a demandé d’être patient afin qu’il puisse bien prendre connaissance de la preuve avant l’enquête sur remise en liberté. « C’est dans votre meilleur intérêt », a-t-il assuré. La conjointe de l’accusé, présente sur place, a préféré ne pas faire de commentaires.

Un lien avec un fabricant chinois

La Presse révélait mardi matin que l’accusé, un spécialiste des batteries qui avait accès aux recherches de pointe en la matière chez Hydro-Québec, avait des liens avec HiNa Battery Technology, une entreprise chinoise qui promet de développer la prochaine génération de batteries pour véhicules électriques.

Après son embauche à Hydro-Québec comme chercheur, M. Wang a continué de publier des articles scientifiques sur des technologies liées aux batteries en collaboration avec un haut dirigeant de l’entreprise chinoise, selon plusieurs de ses publications consultées par La Presse.

Dans ces publications, il ne mentionnait pas son lien avec Hydro-Québec et s’identifiait comme un chercheur de l’Académie chinoise des sciences.

Dans au moins un de ses projets de recherche avec le dirigeant de HiNa Battery Technology, il mentionne avoir reçu un financement à travers le « Programme mille talents » du gouvernement du Parti communiste chinois. Ce programme, destiné à attirer les meilleurs chercheurs pour aider à l’avancée de la science en Chine, a été dénoncé par les services de renseignement canadiens et américains parce qu’il sert à s’approprier les résultats de recherches menées à l’étranger.