(Québec) La présumée victime d’Harold LeBel a raconté mardi au tribunal la « nuit interminable » qu’elle dit avoir vécue en octobre 2017 dans l’appartement rimouskois de l’ancien député péquiste qui fait face à des accusations d’agression sexuelle.

La jeune femme a raconté au jury comment l’ancien élu de 60 ans l’avait touchée à répétition cette nuit-là, même si elle avait repoussé ses avances. Elle était de passage à Rimouski pour le travail et était hébergée dans le condo de M. LeBel, qu’elle considérait « comme un ami ».

Une ordonnance de la cour empêche de divulguer le nom de la jeune femme ou des détails cruciaux qui pourraient l’identifier. Mais en octobre 2017, elle a dû se rendre à Rimouski pour le travail en compagnie d’une collègue. Harold LeBel aurait proposé de les héberger deux nuits.

Lors de la seconde soirée, les trois étaient à discuter quand, vers minuit, l’autre femme est allée se coucher. La plaignante et M. LeBel se sont retrouvés seuls, a-t-elle raconté, puis la conversation aurait pris un tour plus personnel. M. LeBel aurait commencé à parler de la rupture avec son ex-conjointe et de moments difficiles qu’il vivait.

« Puis, à un moment donné, alors que je ne m’y attendais pas du tout, Harold a mis les mains sur mes cuisses puis m’a embrassée », a raconté la plaignante. Elle assure avoir été surprise de ça. Elle considérait l’homme, beaucoup plus vieux qu’elle, comme une « figure paternelle ».

« J’ai pris un pas de recul, je lui ai dit : “Écoute, moi, je suis fatiguée, je vais aller prendre ma douche et aller me coucher” », a-t-elle dit aux membres du jury au palais de justice de Rimouski.

L’homme aurait alors tenté de la dissuader d’aller se coucher. « Il s’est approché de moi et a mis sa main dans mon dos et détaché mon soutien-gorge. […] J’ai répété encore une fois que je ne voulais pas, que j’étais fatiguée et voulais prendre ma douche et aller me coucher. »

« C’était très agressif »

La jeune femme s’est enfermée dans la salle de bains et a verrouillé la porte. À un moment, elle raconte avoir senti que l’homme tentait de l’ouvrir.

« J’étais complètement sous le choc dans la salle de bains, je ne comprenais pas ce qui était en train de se passer. Il y a un instant, c’était un bon ami, et là, il était devenu quelqu’un d’autre. C’était très agressif. »

Elle raconte avoir texté sa collègue couchée dans l’appartement, mais celle-ci, endormie, n’aurait vu les textos qu’au petit matin.

La plaignante est finalement sortie pour aller se coucher dans un sofa-lit, le même que la veille, situé dans le salon, pensant que son hôte avait compris qu’elle n’était pas intéressée par ses avances. Mais quelques instants plus tard, elle raconte que M. LeBel s’est approché et lui a demandé s’il pouvait simplement se coucher à côté d’elle.

« C’est niaiseux, mais je me sentais mal de lui avoir dit non. J’avais peur qu’il ne veuille plus être mon ami. Aujourd’hui, je trouve ça niaiseux, a-t-elle expliqué. Je me suis dit : “Il a compris le message, il ne se passera rien.” J’ai dit OK. »

Puis, elle a raconté comment l’homme avait commencé à la toucher tranquillement, notamment aux fesses et à l’anus. « Je me demandais : “Si je dis non, est-ce qu’il va se transformer en cette personne agressive ?” »

« Je ne me rappelle pas avoir dormi cette nuit-là. C’était absolument interminable. Je mobilisais tout mon corps pour ne pas bouger d’un poil. Je me sentais tellement vulnérable, pourquoi je me suis mise dans cette situation-là, qu’est-ce que je fais ici ? »

L’affaire « a duré toute la nuit ». Elle dit se souvenir qu’au petit matin, sa collègue a enfin lu les textos envoyés dans la nuit, puis a trouvé les deux dans le lit. La plaignante ne dormait pas. Elle dit se souvenir d’un « immense malaise ». Harold LeBel les a reconduites de bonne heure à un endroit où les deux femmes avaient réservé un service de covoiturage (AmigoExpress) pour rentrer à Québec. « Personne n’a parlé dans l’auto. »

« Merci de m’avoir laissé te coller, c’est certain que je ne suis pas à l’aise ce matin, mais ça me fait beaucoup de bien », a écrit un peu plus tard Harold LeBel à la plaignante dans un message texte.

Le témoignage de la plaignante se poursuivra mercredi avec le contre-interrogatoire. Les 14 jurés – 10 femmes et 4 hommes – devront décider si l’homme est coupable d’agression sexuelle à l’issue de ce procès qui doit durer de deux à trois semaines. M. LeBel a plaidé non coupable.

Harold LeBel a été arrêté le 15 décembre 2020 par des policiers de la Sûreté du Québec. L’homme élu pour la première fois en 2014 dans la circonscription de Rimouski, puis réélu en 2018, a rapidement été exclu du Parti québécois pour au moins la durée du processus judiciaire. Il a décidé de ne pas se représenter aux dernières élections.