Le chef de la direction et actionnaire de contrôle de Québecor Pierre Karl Péladeau a intenté une « procédure judiciaire abusive » contre une des avocates impliquées dans son dossier de divorce, lui réclamant 60 000 $ « de manière déraisonnable et constituant un détournement des fins de la justice », a tranché la Cour du Québec, lui ordonnant de payer des honoraires qu’il refusait de lui verser.

Le litige remonte à 2019, lorsque l’avocate Nicole Parent, aujourd’hui à la retraite, a déposé une poursuite de 54 543 $ pour réclamer à l’homme d’affaires le paiement de ses trois dernières factures, qu’il refusait d’honorer.

Entre janvier 2016 et octobre 2018, MParent lui a facturé un total de 1 047 101 $ dans le cadre de son dossier de divorce « hautement contesté et acrimonieux » avec l’animatrice Julie Snyder, qui nécessitait des interventions « régulièrement sur une base journalière ». « La preuve révèle qu’elle [MParent] fut entièrement dévouée, disponible et investie à veiller aux intérêts supérieurs de son client et à le conseiller adéquatement », note le juge Pierre Cliche, dans son jugement de 20 pages, lourdement caviardé pour protéger la vie privée de M. Péladeau et de sa famille.

En réponse à la procédure intentée par l’avocate, M. Péladeau a lui-même déposé une contre-poursuite, lui réclamant 60 000 $ à titre d’indemnité pour « préjudice moral » qu’il soutenait avoir subi pour des « négligences professionnelles » qu’il reprochait à MParent. Il l’accusait d’avoir « manqué à son obligation de renseignements et conseil » parce qu’elle n’a pas discuté avec lui de la possibilité de porter en appel un jugement intérimaire rendu dans le cadre de son dossier de divorce, et parce qu’elle a omis de caviarder certains éléments confidentiels dans le dossier de cour déposé au tribunal dans le cadre de sa poursuite de 54 543 $.

« Aucune chance raisonnable de succès »

Or, la décision que M. Péladeau souhaitait porter en appel « n’avait aucune chance raisonnable de succès », estime le tribunal. Si son avocate a commis une faute en omettant de lui parler de la possibilité de porter la cause en appel, celle-ci se situe « au bas de l’échelle de gravité objective », a tranché la Cour. Quant aux informations non caviardées qu’il reproche à l’avocate d’avoir rendues publiques dans sa poursuite, le juge souligne que M. Péladeau s’en est plaint près de deux ans et demi après en avoir pris connaissance, ce qui est « révélateur d’une légèreté blâmable de sa part ».

M. Péladeau n’a pas donné suite à notre demande de commentaires pour cet article. MParent, actuellement à l’extérieur du pays, n’a quant à elle pas pu être jointe.

Les faits dans leur ensemble « laissent transpirer de la part [de M. Péladeau] une intention de créer une pression indue sur [MParent] dans le but qu’elle accepte de conclure une entente lui permettant d’éviter le paiement de ses honoraires professionnels ou d’en obtenir la réduction de manière substantielle », souligne le juge Cliche.

Sa poursuite de 60 000 $ contre son avocate « constitue une procédure judiciaire abusive », « manifestement mal fondée » et « déposée dans un but oblique, soit celui de contrebalancer indûment sa réclamation », ajoute le magistrat, condamnant l’homme d’affaires à verser les 54 543 $, plus intérêts, à MParent, ainsi que les frais de justice découlant des deux poursuites.

Dans le cadre de son dossier de divorce, M. Péladeau a aussi dû répondre d’une poursuite de 92 000 $ intentée par l’avocate Anne-France Goldwater, qui l’a brièvement représenté. Leur différend s’est réglé à l’amiable pour une somme qui n’a pas été divulguée.