La Sûreté du Québec dit avoir géré une véritable explosion du nombre de missions de sauvetage pour retrouver des personnes disparues l’an dernier, ce qui montre que sa structure des interventions d’urgence est adéquate, malgré les récentes critiques de policiers retraités qui craignent une perte d’expertise en la matière.

Le nombre de missions de sauvetage menées par les modules d’intervention d’urgence du corps policier pour retracer des personnes disparues en forêt ou ailleurs a fait un bond impressionnant en 2021. Une hausse que les policiers attribuent à la pandémie et au fait que bon nombre de personnes sont restées au Québec pour faire du plein air pendant leurs congés. Alors qu’il y avait eu à peine 123 missions du genre en 2019, le nombre a atteint 428 l’année dernière, selon les chiffres fournis par la direction.

Nombre de missions de sauvetage à la Sûreté du Québec

2017 : 271

2018 : 180

2019 : 123

2020 : 373

2021 : 428

Cette hausse survient au moment où la gestion des opérations de sauvetage fait débat dans la grande famille policière. Récemment, d’anciens policiers spécialisés en la matière ont dénoncé sur les ondes de Radio-Canada ce qu’ils qualifient de manque d’effectifs et de désorganisation des unités de recherche de la Sûreté du Québec. Les policiers ont accepté de parler publiquement dans le cadre d’un reportage de l’émission Enquête sur la mort de Norah et Romy Carpentier, tuées par leur père Martin Carpentier en juillet 2020 après une embardée sur l’autoroute 20 à Saint-Apollinaire.

Après la sortie de route, Martin Carpentier avait disparu avec ses filles. Ses intentions n’étaient pas claires, et il avait fallu un certain temps avant que la police en vienne à conclure qu’il avait des visées criminelles. Une coroner a déjà déterminé qu’une alerte AMBER lancée plus tôt aurait maximisé les chances de sauver les enfants.

L’objectif était une fin heureuse

Les policiers interrogés par Radio-Canada montrent du doigt la réorganisation des équipes d’urgence menée quelques années plus tôt au sein de la Sûreté du Québec. Certains policiers hyper spécialisés avaient alors été réaffectés pour qu’ils contribuent davantage à d’autres tâches en l’absence d’opérations de sauvetage, ce qui avait provoqué beaucoup de grogne chez certains. Au sein de la Sûreté du Québec, ces équipes spécialisées jouissent de conditions de travail particulières et forment des groupes très soudés qui s’entraînent beaucoup pour demeurer au sommet de leurs capacités.

« C’est un démantèlement, et c’est un démantèlement sauvage en plus », avait déploré Alain Croteau, ancien sergent coordonnateur en recherche terrestre, dans le reportage.

L’inspecteur-chef Patrice Cardinal, de la direction des communications de la Sûreté du Québec, affirme aujourd’hui qu’il n’y a aucun lien entre cette réorganisation et la triste conclusion de la traque de Martin Carpentier.

« En recherche, on en remplit plus qu’avant, des missions ! Ce n’est pas une question de gestion d’effectifs. On a toujours eu les effectifs pour réaliser l’ensemble de nos missions et on ne lésinera jamais », dit-il.

« Notre objectif, c’était d’arriver avec une fin heureuse. Les gens sur le terrain étaient impliqués, mais les gestionnaires aussi », assure-t-il.

« Des réorganisations et des redéploiements, il y en a dans toute organisation. Dans chacun des cas, il y a des individus qui vont se sentir soit lésés, pas écoutés ou incompris. C’est humain », observe l’inspecteur-chef.

Une structure éprouvée

Le fait que les Carpentier n’aient pu être retrouvés à temps en 2020 ne signifie pas que l’ancienne répartition des effectifs était meilleure, affirme M. Cardinal. La formation et l’expertise demeurent en place au sein de l’organisation, même si certains policiers contribuent aussi à d’autres missions.

Quant à la structure de commandement lors de l’opération, c’est la même qui a mené à des succès dans nombre d’autres dossiers et qui est utilisée par les organisations policières à travers le monde, dit-il.

« La structure de commandement, elle n’a jamais changé, et force est d’admettre qu’elle fonctionne bien, même si on cherche toujours à s’améliorer et à apprendre de chaque dossier », ajoute-t-il.