Un proxénète ultraviolent qui a fait vivre un enfer pendant deux ans à une jeune femme vulnérable a été condamné jeudi à une peine de 10 ans de pénitencier. Pour maintenir le contrôle absolu sur sa victime, Antonio Dujorn Casanova n’hésitait pas à la soumettre à d’ignobles agressions sexuelles et à lui poser un pistolet au visage.

Le Montréalais de 31 ans, reconnu coupable en décembre 2020 d’une quinzaine de chefs d’accusation, dont traite de personne, a également été déclaré délinquant à contrôler par la juge Lori Renée Weitzman. Il sera ainsi soumis à une surveillance pendant sept ans après sa libération.

Le calvaire vécu par Valérie* s’apparente à une forme d’esclavage moderne. Isolée et asservie, la Montréalaise était carrément « conditionnée » à croire qu’elle était l’« objet » de son bourreau. Antonio Dujorn Casanova contrôlait ainsi tous les aspects de la vie de sa victime.

C’est en mai 2017 que Valérie rencontre l’accusé, lors d’un séjour à Toronto. Elle a seulement 19 ans. Cocaïmane, Valérie commence à se prostituer pour l’accusé en banlieue de Toronto avec son amie Jessica. Très vite, Antonio Dujorn Casanova a recours à la violence pour asseoir son autorité.

Un jour, alors que Jessica lui « fait de l’attitude », le proxénète pose son pistolet sur sa tempe devant Valérie. « Je pourrais te tirer, salope. Ferme-la ! », crache-t-il.

Pendant des mois, Valérie se prostitue jour après jour et remet tous ses gains à son proxénète, qu’elle appelle « papa ». Sa soumission est totale. Par exemple, quand elle revient de séjours à Montréal pour se prostituer, la jeune femme doit se soumettre à des « inspections » de ses organes génitaux avant d’avoir la permission de prendre sa douche.

« Je peux te tuer »

Les épisodes de violence se multiplient. En mars 2018, Antonio Dujorn Casanova sort son pistolet, le charge et le pointe vers la jeune femme en plein jour, rue Notre-Dame à Montréal. « Si tu essaies de me piéger, vraiment, je peux te tuer », menace-t-il en la frappant au visage.

À une autre occasion, le proxénète, fou de rage dans une chambre d’hôtel, roue de coups Valérie et la menace de mort. Il appuie le canon de son pistolet si fort sur le front de la jeune femme que du sang coule sur son visage. « Regarde ce que tu m’as fait faire », dit-il.

Lors d’un évènement « particulièrement violent », selon la juge, Antonio Dujorn Casanova frappe Valérie à coups de ceinture quand il découvre qu’elle texte un autre homme. Il étrangle ensuite la jeune femme, au point qu’elle croit mourir, puis l’agresse sexuellement pour la faire « sentir mieux ». Des circonstances « particulièrement aggravantes » aux yeux de la juge.

Valérie pensait finalement se libérer de son bourreau en le dénonçant à des policiers ontariens, mais sa plainte est restée lettre morte pour des raisons bureaucratiques. Son cauchemar ne s’est donc terminé que neuf mois plus tard dans des circonstances dramatiques.

Fou de rage en apprenant que Valérie a eu un accident de voiture à Montréal, Antonio Dujorn Casanova menace de la poignarder, elle et son père. « Je vais être heureux parce que je vais t’avoir poignardée », dit-il. Il sera finalement arrêté in extremis devant chez elle. « C’est comme ça que tu me montres ton amour ? », lui crie-t-il.

Malgré tout, Antonio Dujorn Casanova nie être une personne violente et reproche à la victime d’avoir tout inventé. Il soutient avoir été traité injustement par le système judiciaire québécois, parce qu’il est noir et anglophone, indique un rapport d’évaluation.

Un risque élevé de récidive

Selon une psychologue, l’accusé affiche des traits de personnalité antisociale et présente un risque de récidive « significatif » en raison de ses comportements « impulsifs et asociaux ». D’ailleurs, l’accusé a accumulé pas moins de 26 réprimandes en prison, certaines pour détention d’une arme artisanale.

Il purge en ce moment une peine de 18 mois pour possession d’une arme à feu prohibée avec des munitions. Il s’agit du même pistolet utilisé contre la victime.

Le procureur de la Couronne, MAlexandre Gautier, réclamait dix ans et demi de détention, alors que MAlexie Galarneau, de la défense, demandait cinq ans de prison.

Bien que la peine imposée soit de dix ans, il reste six ans et quatre mois à celle-ci, compte tenu de la détention préventive (un crédit de peine de 1,5 jour par journée de détention préventive est accordé).

* Nom fictif afin de protéger l’identité de la victime