Un Hells Angels, qui poursuivait au civil le Procureur général du Québec pour plus de 700 000 $, a obtenu gain de cause devant les tribunaux et pourra obtenir tout l’équipement médical et les soins nécessaires à son handicap physique en détention.

Cette décision profitera également à tous les détenus handicapés ou ayant un état de santé physique qui nécessite des soins particuliers, affirme son avocat, MRudi Daelman

Le Hells Angels est Serge Lebrasseur, 57 ans, membre de la section de Montréal. Il est très connu dans la région de Sorel, où il habite, et a une longue liste d’antécédents criminels. En mars 2015, il a plaidé coupable à un chef réduit de complot pour meurtre dans la foulée de l’opération SharQc.

En 1994, Lebrasseur a subi un trauma par balle qui lui a laissé de graves séquelles physiques permanentes.

Entre autres, il a une jambe paralysée, les intestins paralysés, une hernie intestinale, une lésion du plexus lombo-sacré et le syndrome de la queue de cheval, soit une douleur intense dans la colonne vertébrale.

Comme à peu près tous les Hells Angels du Québec, Lebrasseur a été arrêté lors de l’opération SharQc en avril 2009 et a ensuite été détenu préventivement, en attente de son procès, durant six ans à l’Établissement de détention de Montréal - communément appelé Bordeaux - et à l’Établissement Rivière-des-Prairies.

Le motard a déploré ne pas avoir reçu les soins appropriés à son état de santé durant ces années d’incarcération et affirmé que ses droits garantis par la Charte n’ont pas été respectés, et il a déposé une première poursuite civile contre le Procureur général du Québec en 2013.

Lebrasseur a été libéré alors que sa poursuite était toujours active, mais il a été de nouveau arrêté, condamné et incarcéré en 2021, pour avoir menacé un gardien de sécurité qui faisait la circulation près de la traverse Sorel-Tracy-Saint-Ignace-de-Loyola et pour avoir ensuite brisé l’une de ses conditions de remise en liberté provisoire.

Mais alors qu’il était incarcéré à l’Établissement de Sorel-Tracy entre mai et juin derniers, Lebrasseur a affirmé avoir été victime de mauvais traitement et de discrimination relativement à ses handicaps physiques.

Il affirme notamment avoir subi une fouille à nu au cours de laquelle il a été plaqué au sol, car il ne pouvait obtempérer aux directives des gardiens en raison de son handicap, ne pas avoir reçu de savon pour son hygiène, qu’on lui a remis une attelle non fonctionnelle et qu’il n’a pu bénéficier d’un matelas orthopédique malgré des demandes répétées de sa part.

Le motard a ensuite présenté une nouvelle demande introductive d’instance en dommages-intérêts devant la Cour du Québec chambre civile, contre le Procureur général du Québec, exigeant de recevoir les soins et équipements requis, et une somme de 30 000 $.

Un règlement survient

Mais au printemps dernier, une entente est intervenue entre Lebrasseur et le Procureur général du Québec et elle a été homologuée quelques semaines plus tard par la Cour supérieure, chambre civile.

En vertu de cette entente, le ministère de la Sécurité publique s’engage notamment à ce que tous les détenus ayant un handicap ou des problèmes de santé importants puissent bénéficier du matériel et des soins médicaux nécessaires dans un délai raisonnable, et qu’un suivi soit assuré.

Si jamais il retourne en prison, le motard devrait donc pouvoir bénéficier des équipements qu’il a réclamés dans ses requêtes, notamment un matelas orthopédique adapté, des coussins ergonomiques, une canne, un fauteur roulant ou un déambulateur pour ses déplacements, un banc ergonomique et des barres d’appui pour sa toilette et dans la douche, et des aliments adaptés à sa condition.

L’entente prévoit également un règlement monétaire dont on ne connait pas la teneur.

« Le Procureur Général du Québec s’est engagé par écrit à prévenir tous les centres de détentions provinciaux de cette situation particulière afin de prévenir que des évènements comme ceux que M. Lebrasseur a vécus ne se reproduisent tout simplement plus et ce, au grand bénéfice des personnes détenues ayant des handicaps ».

« Je ne peux qu’espérer que l’État québécois va réagir pour régler définitivement cette problématique que vit cette catégorie de personnes dans nos prisons au Québec alors que nous approchons de l’année 2022 ».

« Les personnes handicapées et détenues connaîtront la position de l’État suite à l’entente avec M. Lebrasseur sur cette problématique et verront effectivement qu’un changement de mentalité dans les prisons vient de faire son apparition », affirme l’avocat du motard, MRudi Daelman.

Pour joindre Daniel Renaud, composez-le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.