Deux semaines après avoir réussi à faire retirer sa reconnaissance de culpabilité dans une fraude de 750 000 $, Manon Hubert a été reconnue coupable jeudi dans un autre dossier pour avoir fraudé son employeur, alors qu’elle était gérante d’une station-service en attendant la tenue de son procès.

« Je n’ai pas cru son témoignage. Il soulève des questionnements tellement l’insistance avec laquelle elle diminue son rôle [est grande] », a tranché la juge Ellen Paré jeudi au palais de justice de Longueuil. La femme de 56 ans a ainsi été déclarée coupable de fraude, de faux et d’usage de faux au terme de son procès qui s’est déroulé au palais de justice de Saint-Hyacinthe.

En 2015, Manon Hubert supervisait une dizaine d’employés comme gérante d’une station-service de Mont-Saint-Hilaire. Pourtant, elle était en attente de procès à cette époque pour avoir fraudé un voyagiste pour des centaines de milliers de dollars en 2010 et 2011, flouant du coup des centaines de clients.

Notons que ce dossier s’étire depuis maintenant neuf ans au palais de justice de Montréal, alors que Manon Hubert a récemment fait retirer son « plaidoyer de culpabilité » trois ans après avoir plaidé coupable. L’accusée souffrait d’une « forme d’effondrement psychologique » à cette époque et était « proche d’une dépression majeure », selon le psychologue de la défense Hubert Van Gijseghem, dont le diagnostic a convaincu la juge Julie Riendeau.

PHOTO IVANOH DEMERS, ARCHIVES LA PRESSE


Manon Hubert en 2018

Contradictions

Il y a quelques années, donc, Manon Hubert a profité de ses responsabilités de gérante pour puiser dans les recettes de la station-service, a conclu la juge Paré. La perte du commerçant s’élève à environ 76 000 $. Au procès, la fraudeuse a rejeté la responsabilité sur un collègue. Or, même si ce dernier avait été congédié en décembre 2015 et se trouvait alors à l’étranger, l’argent a continué de disparaître dans les coffres du commerce en janvier 2016.

Deux jours avant d’être congédiée, en février 2016, Manon Hubert a déposé une plainte à la police pour dénoncer son ex-collègue. En contre-interrogatoire, l’accusée « lève le ton et devient volubile. Elle s’impose et interrompt le procureur, en disant qu’elle amassait de la preuve pour remettre aux policiers », a relevé la juge. Son ton « détonne ou surprend », puisque l’accusée se présente comme une femme qui souffre du cancer, a conclu la juge.

Aux yeux de la juge, Manon Hubert a mis l’accent sur son « rôle de justicier » pour mettre la faute sur son ex-collègue. « [L’accusée] se contredit facilement et souvent, elle ajuste sa version antérieure. Elle adapte à plusieurs reprises le rôle professionnel qui lui incombait, principalement en diminuant l’implication ou la responsabilité qu’elle pouvait avoir, l’éloignant le plus possible du rôle de gérant qu’elle s’était elle-même attribué en s’adressant notamment aux policiers pour porter plainte », a analysé la juge.

Au terme de l’audience, à laquelle Mme Hubert assistait par visioconférence, son avocat MGilles Pariseau a indiqué avoir l’intention de produire un rapport médical pour sa cliente, comme celle-ci souffre du cancer.

MCimon Sénécal représente le ministère public.