S'il a poignardé ses deux voisins, c'était par «légitime défense», a plaidé lundi Vincenzo Pizzi lors de sa comparution au palais de justice de Joliette. Une vidéo de l'agression, captée par une caméra de surveillance, laisse toutefois planer des doutes sur cette affirmation.

Appuyé à la balustrade du box des accusés, Vincenzo Pizzi a écouté le juge François Landry énumérer les chefs d'accusation portés contre lui. «Légitime défense, a-t-il soudainement lancé au magistrat en lui coupant la parole. C'est rien que ça que je voulais vous dire.»

Vincenzo Pizzi, un homme trapu au crâne rasé, a été accusé sous sept chefs de voies de fait relativement à l'agression survenue samedi midi à Mascouche, dans Lanaudière. Il est aussi accusé de conduite dangereuse, d'introduction par effraction et de manquement à des conditions de liberté.

Pizzi, 48 ans, aurait d'abord tenté de heurter son voisin Pierre St-Onge avec sa camionnette dans la rue Alsace, où habitent les victimes et l'accusé. Vincenzo Pizzi aurait ensuite suivi Pierre St-Onge jusque dans l'entrée d'un autre voisin, Jocelyn Mathieu. C'est là qu'il aurait poignardé les deux hommes à l'abdomen avant de rentrer chez lui.

Une chicane de clôture qui s'envenimait depuis plusieurs mois serait à l'origine du drame. Dimanche, la femme de l'accusé, Dora Furino, a dit à La Presse que sa famille est victime de harcèlement et d'intimidation depuis qu'elle a emménagé dans sa maison de la rue Alsace, en juin 2009.

Les deux victimes, qui ont été opérées, sont hors de danger.

Pas d'avocat

Près de 48 heures après son arrestation, Vincenzo Pizzi s'est présenté au palais de justice de Joliette sans avocat, vêtu d'un t-shirt vert mousse et d'un manteau noir. Il portait une attelle au bras gauche, seul signe visible de l'incident de l'avant-veille.

Un brin désinvolte, Pizzi a précisé au juge qu'il se trouverait un avocat si sa cause était déférée au district judiciaire de Montréal, où habite sa famille. Le juge n'a pas accédé à cette demande. «Je vous suggère fortement de prendre un avocat», lui a-t-il répondu d'un ton autoritaire.

Le procureur de la Couronne, Laurent Kominik, s'est opposé à la mise en liberté de l'accusé, invoquant la gravité des accusations et le fait qu'il lui était interdit d'entrer en contact avec les victimes lors du drame.

D'autres accusations pourraient être portées contre Pizzi. «À ce stade-ci, la Couronne n'a pas jugé qu'il y avait assez de preuves pour justifier l'accusation de tentative de meurtre», a indiqué Me Kominik.

L'enquête sur la mise en liberté de Vincenzo Pizzi a été fixée à mercredi. Pendant l'audience, il a demandé s'il pouvait rentrer chez lui entre-temps. «Quand c'est de la légitime défense, c'est quoi? a-t-il demandé. Vous me faites sortir avec une promesse de comparaître?»

Ses commentaires ont consterné les proches de Pierre St-Onge, qui ont assisté à la comparution. «Il arrive sans avocat, il pense qu'il est tout le temps correct, a déploré son fils, David St-Onge. Ce gars-là a un problème. Il ne devrait pas être mis en liberté.»

Une vidéo incriminante

Par ailleurs, La Presse a obtenu un extrait de la vidéo captée par la caméra que Pierre St-Onge avait fait installer sur sa maison à l'automne après avoir porté plainte contre Vincenzo Pizzi pour menaces de mort.

Sur la vidéo, on voit l'accusé reculer sa camionnette dans la rue Alsace. Pierre St-Onge sort du domicile de son ami Jocelyn Mathieu, qui habite en biais. Puis, le camion fonce à toute allure en direction de Pierre St-Onge, qui réussit à l'éviter de justesse.

St-Onge s'approche alors de Pizzi. Ils courent ensuite dans l'entrée de Jocelyn Mathieu, où les deux hommes se font poignarder. Enfin, l'accusé retourne dans sa camionnette pendant que la famille St-Onge arrive à la rescousse.

«C'est difficile de croire qu'après avoir fait de tels gestes, il est capable de dire que c'était une légitime défense», a conclu David St-Onge.