L’alternance de pluie, de neige et de bourrasques qui a frappé la province vendredi complique la vie de milliers de Québécois plongés dans le noir à la veille des Fêtes… et celle des travailleurs d’Hydro-Québec qui tentent de rétablir le courant.

« Oubliez ça, on ne sortira pas d’ici pour Noël. On va attendre de ravoir du courant pour bouger », lance René Tardif, appuyé sur sa pelle devant sa maison à Gore, dans les Laurentides. En début d’après-midi, l’homme de 69 ans regarde avec découragement le tapis de neige mouillée, et lourde, qui s’est déjà accumulé dans son entrée depuis un premier pelletage matinal.

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Un camion d’Hydro-Québec dans un rang enneigé de la municipalité de Gore, dans les Laurentides

Le couple est sans électricité depuis 6 h 45 vendredi matin, explique sa conjointe, Josée Mayer. Comme plus de 30 000 autres foyers dans la région, d’ailleurs, et plus de 340 000 clients d’Hydro-Québec à travers la province en fin d’après-midi.

Ils n’ont donc pas de chauffage, pas d’accès au téléphone (une ligne fixe) ni à l’internet ou à la télévision pour suivre l’évolution de la situation.

Isolés dans un chemin en forêt, ils espèrent pouvoir compter sur une entreprise de déneigement pour venir dégager leur entrée. Inquiets, ils ont décidé d’annuler leurs plans pour Noël.

La région des Laurentides a reçu une importante quantité de neige dans la nuit de jeudi à vendredi, explique un résidant du village de Mille-Isles, lui aussi privé d’électricité. Puis les bourrasques se sont levées. En après-midi, brume, vent, pluie et grésil se sont succédés sur les petits chemins montagneux.

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Déneigement dans un quartier de St-Jérome, dans les Laurentides

Entre les branches des conifères, les échos du vent donnaient à cette veille de vacances un air lugubre, sous un ciel d’acier.

Hydro-Québec au travail

Parlant de vacances – ou plutôt d’absence de congé –, quelque 1100 employés d’Hydro-Québec s’affairaient vendredi pour tenter de rétablir le courant dans les foyers québécois avant le 25 décembre. Parmi ceux-ci, Mathieu Gagnon travaillait sur une panne survenue dans la municipalité de Saint-Lin–Laurentides.

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Le conducteur d’une camionnette a perdu la maîtrise de son véhicule sur le chemin de la Rivière-du-Nord pour terminer sa course contre un poteau électrique, causant une panne.

Si, un peu partout dans la province, de la neige lourde, de la glace et des branches d’arbres ont été responsables des pannes de courant, ici, c’est une erreur humaine qui a obligé les employés de la société d’État à travailler sous une pluie glacée et dans la neige fondante.

Le conducteur d’une camionnette F-150 bleu royal a perdu la maîtrise de son véhicule sur le chemin de la Rivière-du-Nord pour terminer sa course contre un poteau électrique.

Un câble s’est décroché et la zone doit être sécurisée. En fin d’après-midi, le soleil décline rapidement. Habillés de combinaisons étanches, de casques, de lunettes de protection, de bottes et de gants, Mathieu Gagnon et son équipe sont encore loin d’en avoir terminé.

Une météo en yoyo à Montréal 

La métropole a été relativement épargnée par la tempête et les pannes de courant, avec de fortes pluies, de la grêle par endroits, et même quelques rayons de soleil en après-midi.

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Steve Messier travaillait à rendre accessibles les poubelles, les bancs de parc et les parvis d’église aux résidants du quartier, vendredi.

« On est prêts, on est là ! », a lancé Steve Messier, pelle à la main, à l’angle de la rue Sainte-Catherine Ouest et de l’avenue Union en matinée vendredi. Sa tâche : rendre accessibles les poubelles, les bancs de parc et les parvis d’église aux résidants du quartier.

Les élèves étant en congé, les rues étaient plutôt calmes, mais la météo n’a pas empêché les visiteurs de se rendre au centre-ville pour les dernières emplettes de Noël.

« On pensait que ce serait pire que ça ! », s’est réjouie Véronique Brodeur, rencontrée en face de La Baie d’Hudson, en compagnie de sa fille et d’une autre adolescente de 13 ans. Le trio est arrivé de la Mauricie jeudi. « Il faisait beau, on n’avait pas regardé la météo », ajoute-t-elle. Le plan de la journée : profiter des magasins montréalais avant de repartir vers l’est, en espérant que les conditions routières seront sûres.

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La jeune Joséphine Perani (à gauche) a profité de cette journée de congé pour d'amuser avec les dominos géants du square Phillips.

Un peu plus loin, dans le square Phillips, la jeune Joséphine Perani joue avec les dominos géants installés sur place. C’est le bonheur d’une journée de congé inopinée pour cette élève montréalaise.

À quelques pas, Christine Farran, qui vit à la Réunion, département français dans l’océan Indien, est en visite à Montréal depuis une semaine. « Je ne sais pas à quoi ça ressemble normalement, une tempête de neige », remarque-t-elle. Pour elle, le tapis blanc toujours en place est déjà impressionnant.

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La Presse a croisé Paul de Bellefeuille devant le magasin La Baie d’Hudson, rue Sainte-Catherine.

« On est chanceux, il fait doux », souligne aussi Paul de Bellefeuille, qui tend un verre aux passants à l’entrée du magasin La Baie d’Hudson pour recueillir de la petite monnaie. La marquise du magasin historique le protège bien des intempéries, mais pas du manque d’achalandage.

Après une journée pluvieuse, le vent s’est levé en début de soirée dans la métropole, porté par un front glacé et transformant, par endroits, la chaussée et les trottoirs en patinoires.