La Ville de Montréal doit envisager le vote par internet aux prochaines élections municipales, selon une commission d’élus, qui fait cette recommandation au moment où Élections Québec se prépare à mettre en place un projet-pilote à cet effet pour le scrutin municipal de 2025.

Pour tenter d’augmenter la participation des citoyens aux élections, qui diminue avec les années, Montréal doit mener une analyse de faisabilité « quant à la mise en place du vote numérique », recommande la Commission de la présidence du conseil, composée d’élus de tous les partis, dans son rapport déposé mardi.

Le vote par internet a été réclamé par plusieurs participants aux consultations publiques des derniers mois sur la question, a souligné la présidente de la commission, la conseillère municipale Véronique Tremblay.

« Nous devons maintenant laisser le temps à Élections Montréal d’en faire l’analyse », a-t-elle dit. Aux dernières élections municipales, le taux de participation pour l’ensemble de la métropole était de 38,3 %.

En 2005, le vote électronique utilisé dans 140 municipalités au Québec s’était avéré un fiasco, mais il s’agissait alors de bornes électroniques installées dans les bureaux de scrutin et non de vote à distance.

Projet-pilote pour 2025

Montréal pourrait participer au projet-pilote qu’Élections Québec vient d’annoncer pour les élections municipales de 2025.

Un avis d’appel d’intérêt a été lancé lundi par Élections Québec pour trouver une entreprise capable d’« offrir une solution de vote par internet permettant de voter à distance ».

Ensuite, l’organisme devrait tester le vote par internet avec des municipalités de différentes tailles et différentes régions, en privilégiant les villes de plus de 20 000 habitants.

« On va probablement limiter le vote internet à des groupes restreints dans la municipalité, comme certains districts électoraux ou arrondissements », explique Julie Saint-Arnaud-Drolet, porte-parole d’Élections Québec.

Lors des consultations menées sur la question en 2019, les opinions étaient très partagées au sujet du vote sur le web. Certains avaient de grandes réserves, mais une petite majorité des personnes consultées appuyait l’utilisation de la technologie, indique Mme Saint-Arnaud-Drolet. « L’accessibilité sociale évolue. La pandémie a peut-être fait changer les opinions », ajoute-t-elle.

Enjeux de sécurité

« Il y a quand même des enjeux de sécurité et de fiabilité du vote, alors la question mérite d’être bien étudiée », a fait valoir le conseiller municipal montréalais Alex Norris, lors de la présentation des recommandations sur la participation aux élections municipales.

Le vote par internet est utilisé par des municipalités en Ontario depuis plusieurs années, souligne André Blais, professeur de science politique à l’Université de Montréal et spécialiste des comportements électoraux.

« Il y a toujours des préoccupations quant au risque de piratage, mais je ne connais pas de cas de fraude avérée », note-t-il.

2 à 4 % d’augmentation

Par contre, le vote via le web n’est pas non plus une solution magique pour augmenter drastiquement la participation au scrutin : les hausses dans les municipalités utilisant cette méthode sont de deux à quatre points de pourcentage, dit-il, citant des études menées par des chercheurs ontariens.

Quelle est la méthode la plus efficace pour inciter les citoyens à exercer leur droit de vote ? « Le vote obligatoire, assorti d’amendes », répond M. Blais, qui fait remarquer que cette solution radicale et controversée existe dans une vingtaine de pays dans le monde, dont l’Australie, le Brésil, la Belgique et la Turquie.

Cette proposition ne fait cependant pas partie des 19 recommandations de la Commission de la présidence du conseil pour Montréal. On trouve parmi les recommandations la possibilité pour les électeurs de s’inscrire sur la liste électorale en ligne ou en personne le jour du vote, la mise en place du vote par correspondance pour raisons de santé ou de limitations fonctionnelles, l’installation de bureaux de scrutin dans les cégeps, universités, résidences pour personnes âgées et organismes communautaires, l’ajout d’une deuxième journée de vote anticipé et la publication des photos des candidats sur les bulletins de vote.

Ces recommandations seront déposées au conseil municipal en décembre ou janvier, et le comité exécutif de la Ville aura ensuite six mois pour y donner suite.

Lors de son bilan à la suite des élections de 2021, Élections Montréal a noté de fortes disparités selon les secteurs. Dans le district de Joseph-Beaubien à Outremont, la participation a atteint 61,7 %, tandis qu’elle était de 24,3 % dans le district de Saint-Michel, dans l’arrondissement de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension.

D’autres disparités existent en fonction des revenus et de l’âge des électeurs. Les plus de 50 ans étaient les plus nombreux à voter malgré la pandémie, grâce au vote par anticipation.