Ce fut un défilé de Fierté Montréal sans char allégorique, mais tout aussi vivant et rassembleur. Des dizaines de milliers de personnes ont défilé dans les rues de la métropole, dimanche, portant haut et fort leurs couleurs.

« Je suis fière de ma ville, fière de ma communauté qui se met ensemble. Je ne pensais pas qu’il allait y avoir autant de monde ! », a lancé Caitlin Lepessec, perchée sur d’impressionnantes plateformes aux couleurs de l’arc-en-ciel. Elle n’avait pas tort : ils étaient tellement si nombreux qu’on peinait à voir la fin du contingent à l’horizon.

Le rendez-vous annuel des personnes issues de la diversité sexuelle et de genre et leurs alliés, qui concluait une semaine de festivités, avait pris une pause l’an passé – pour la première fois en 30 ans d’existence. Tambours, drag queens et même une troupe de samba brésilienne : il est revenu en force cet été, avec l’esprit festif et éclaté qu’on lui connaît. À commencer par ses participants hauts en couleur.

« C’est le temps d’être un peu plus extra avec son style. C’est une façon d’exprimer son identité », a témoigné Callisto Fortin, qui portait une jupe étoilée et tenait un drapeau non binaire. Fidèle participant.e* de Fierté Montréal, l’évènement lui avait manqué. « Moi, c’est ça que j’attends, l’été ! C’est tellement important de rencontrer des personnes comme toi. Surtout pour les personnes qui sont encore dans le placard ou qui se sentent seules. » « On est une famille ! », a surenchéri son amie Rooslyne Toussaint.

Le coup d’envoi a été donné au parc Jeanne-Mance à 13 h, et la marche s’est conclue dans le Village, rue Sainte-Catherine, peu après 15 h.

  • PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

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  • Callisto Fortin et Rooslyne Toussaint

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    Callisto Fortin et Rooslyne Toussaint

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De nouvelles revendications politiques

« J’ai l’impression de faire partie d’un renouveau et en même temps, de revenir aussi aux débuts du défilé de la Fierté. Après un an et demi sans se voir, on peut enfin sentir l’énergie des gens, voir où ils en sont rendus [dans leur cheminement]. On retourne vraiment à la base, à la connexion humaine », a confié la porte-parole de Fierté Montréal, Sandy Duperval, visiblement émue.

Mais le défilé n’aura pas été que bonne humeur et célébrations : il était aussi revendicateur. À la lumière de la découverte de centaines de sépultures d’enfants proches d’anciens pensionnats autochtones, Fierté Montréal a réclamé « l’urgence d’imposer une prise de conscience collective majeure des atrocités commises envers les personnes autochtones », et a condamné toute forme de racisme envers les personnes noires, autochtones, arabophones, asiatiques et latines.

Sandy Duperval a rappelé l’importance de mener ces combats en parallèle aux luttes pour la diversité sexuelle et de genre. « Les gens que l’on représente font partie de plusieurs intersectionnalités. On se doit de revendiquer leurs droits. Moi, par exemple, je suis lesbienne et une femme noire. Quand je pars de chez moi, je pars avec toute cette identité-là. Si je fais face à la discrimination, ça peut être sur un aspect ou tous les aspects. »

Le combat que mène Kamille Painchaud-Lavallée, présente à la marche, c’est celui d’une meilleure reconnaissance des droits des personnes trans. « Présentement, nous sommes très mal respectés dans la sphère publique. Il faut que ça change », dit-elle. Un exemple ? Lors d’un récent démêlé judiciaire concernant la garde d’un enfant, elle affirme que le juge s’entêtait à l’appeler « le père ». « La troisième fois, j’ai quitté la salle d’audience », laisse tomber celle qui organise une grève de la faim, le 5 septembre prochain, à Québec, avec Action Trans Québec.

Le confinement n’aura pas non plus été facile pour les communautés LGBTQ2+, qui carburent à l’esprit de solidarité. Au Groupe de recherche et d’intervention sociale (GRIS-Montréal), qui travaille à démystifier les questions qui touchent l’identité et l’orientation sexuelles dans les écoles, il a fallu faire preuve de créativité pour demeurer présent sur le terrain au cours de la dernière année.

« À l’adolescence, c’est super important d’avoir du soutien. Souvent, on pense qu’on est seul à vivre quelque chose, à se sentir comme ça. Un groupe de support, c’est primordial », explique Steve François, administrateur chez GRIS-Montréal.

  • Valérie Plante, mairesse de Montréal

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    Valérie Plante, mairesse de Montréal

  • Manon Massé, co-porte-parole de Québec solidaire

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    Manon Massé, co-porte-parole de Québec solidaire

  • Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois

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    Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois

  • Dominique Anglade, cheffe Parti libéral du Québec

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    Dominique Anglade, cheffe Parti libéral du Québec

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Une campagne électorale en toile de fond

Deux heures à peine avant le départ de la marche, le premier ministre Justin Trudeau se rendait à Rideau Hall, à Ottawa, pour demander à la gouverneure générale de dissoudre le gouvernement et lancer la campagne électorale. Lui qui n’a jamais manqué un défilé de Fierté Montréal depuis son élection en 2015 brillait pourtant par son absence. C’est la ministre du Développement économique et des Langues officielles, Mélanie Joly, qui était là, dimanche après-midi, pour représenter le Parti libéral et montrer sa « solidarité à la communauté LGBTQ2+ ».

Le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, et le chef adjoint du Nouveau Parti démocratique, Alexandre Boulerice, étaient également présents. Tous deux ont exprimé leur soutien aux communautés de la diversité sexuelle et de genre, et ont réitéré une fois de plus que la tenue d’élections fédérales à ce moment-ci n’était pas appropriée. Le chef du Parti conservateur, Erin O’Toole, n’a pas participé à la marche.

*Callisto Fortin est non binaire et utilise le pronom « iel ».